Limiter les abus plutôt qu’y mettre fin ?

8 août 2009

Le "JIR" d’hier, annonçant la prochaine fixation des prix des carburants dans les DOM, titre « Le gouvernement doit gérer deux difficultés : tenir compte de l’évolution des cours et limiter les abus ».
Notre confrère se targuant généralement d’être très bien informé, nous lui accorderons donc le bénéfice de croire à son information : le gouvernement serait à la veille de reconnaître son incapacité à mettre fin aux abus des pétroliers et, sacrifiant une fois encore les intérêts des automobilistes, se contenterait donc de seulement « limiter les abus ». Préparant le terrain aux pétroliers, le "JIR" annonce également « les automobilistes réunionnais [doivent s’attendre à ] subir vraisemblablement une nouvelle hausse ».
Ces informations sont tellement incroyables que tout lecteur non-averti pourrait penser que cet éditorial ferait la part belle à l’humour grinçant et à la dérision.
Ce n’est malheureusement pas le cas.
Les récents rapports : Inspection générale des Finances (IGF), Autorité de la concurrence (ADC), Commission sénatoriale, etc… sont unanimes sur un point : le manque total de transparence conduisant à la fixation des prix des carburants, à La Réunion notamment.
L’Autorité de la concurrence constate : « Les compagnies pétrolières donnent un prix au préfet qui s’exécute ». L’inspection générale des Finances confirme : « Les services de l’État [— la préfecture —] ne disposent pas toujours des informations sur les différentes composantes des coûts des carburants ». La commission sénatoriale déplore : « En réponse à un courrier de votre rapporteur, la DDCCRF (1) de La Réunion a elle-même indiqué ne disposer “que de données partielles sur la formation des prix des produits” ». Le rapporteur de la commission sénatoriale est encore plus explicite : « Le rapport de l’Inspection générale des Finances sur le prix des carburants met en effet en évidence des pratiques d’ententes anticoncurrentielles, face auxquelles les services de l’État sont restés inactifs ».
Les rapports de l’IGF, de l’ADC et du Sénat démontrent que, si les coûts des carburants à La Réunion ne sont pas plus élevés, c’est tout simplement parce que les taxes de la Région sont bien moins élevées qu’en France continentale.
Part des taxes dans le prix de vente du carburant


01.12. 2008 Réunion Métropole
Supercarburant 50,8 % 72 %
Gazole 35,8 % 59,7 %

Ces chiffres démontrent à quel point l’opinion a été manipulée par les pétroliers, leur comparse Mongin et le préfet en novembre 2008 lorsqu’ils ont mis en cause la Région. Et voilà pourtant qu’aujourd’hui, les mêmes qui ont voulu nous faire prendre des vessies pour des lanternes, envoient leurs éclaireurs journalistiques préparer le terrain en nous disant que le prix des carburants doit augmenter du fait non seulement d’une augmentation des cours, mais aussi parce que l’autorité préfectorale entendrait se contenter de « limiter les abus ».
En substance : Messieurs les pétroliers, continuez de vous gaver, mais, s’il vous plaît, faites en sorte que cela soit moins visible.
Que les automobilistes de La Réunion se rassurent, contrairement au préfet auquel « Les compagnies pétrolières donnent un prix [et qui aussitôt] s’exécute » "Témoignages" n’entend pas, mais alors pas du tout, participer à la mise en condition de l’opinion pour qu’elle se résigne à « subir vraisemblablement une nouvelle hausse ».

Jean Saint-Marc

(1) DDCCRF : Direction Régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes.

Prix des carburantsSpécial 50 ans du PCR

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