Opérations anti-stupéfiants, synonyme systématique de répression des classes populaires

30 janvier 2021, par Mathieu Raffini

Ces derniers jours, de vastes opérations de police ont eu lieu dans des quartiers de l’île. Ils étaient ainsi une quarantaine, notamment de la BAC à être présents mardi au Chaudron. Rebelote avant-hier avec une trentaine de policiers dans le quartier Titan, au Port. La gendarmerie et la police municipale ont de leur côté été envoyées dans une opération similaire à Bras-Panon. A l’occasion la sous-préfète s’était même rendue sur place.

On pourrait, au vu de l’important dispositif déployé espérer le démantèlement d’un vaste trafic de drogues telle que la cocaïne ou la chimique, et qui aurait des conséquences au minima à l’échelle du pays. Il n’en est rien. Les autorités ont (fièrement) annoncé avoir contrôlé quatre personnes positives aux produits stupéfiants au Chaudron et avoir saisi 10 pieds de zamal à Bras-Panon. Au-delà du ridicule des chiffres annoncés, il faut bien voir la véritable raison derrière ces opérations de police ou de gendarmerie. Car même au vu des chiffres de contrôles annoncés, nous étions très loin de la volonté d’effectuer des contrôles massifs : 41 personnes contrôlées à Bras-Panon, 33 dépistages en 3 heures au Chaudron. Alors pourquoi ces effets d’annonce ?

Il faut déjà analyser quelles sont les infractions qui ont été relevées et où se situent ces contrôles. En l’occurrence, il s’agit de détention et/ou de consommation de zamal, et de quartiers populaires. Passons outre les débats sur les méfaits ou les bienfaits du zamal, force est de constater qu’il s’agit sans doute de la drogue la moins chère à consommer à La Réunion, du fait qu’on puisse le faire pousser sur son balcon ou dans sa cour. Il s’agit donc d’un produit pouvant être consommé par l’ensemble de la population, et à fortiori par les populations précaires qui vivent donc dans ces mêmes-quartiers populaires qui ont été visés.
On est donc plus qu’en droit de penser qu’il s’agit, plutôt que d’opérations anti-stupéfiants, de véritables opérations de répression des populations vivant dans les quartiers populaires. Cette hypothèse se retrouve confortée lorsque l’on voit que la dernière opération policière de ce type avait eu lieu en avril dernier, dans les Camélias, encore une fois un quartier populaire.
Est-ce vraiment le rôle des forces de l’ordre que de venir réprimer les populations qui sont déjà parmi les plus précaires de l’île ?
Pour ne parler que des stupéfiants, il y a sans doute d’autres endroits à viser, qui permettraient peut-être de toucher un public plus aisé, et donc plus à même de consommer ou de vendre des produits se revendant plus cher, tels que la cocaïne ou encore la MDMA. Mais à part lors des saisies à l’aéroport, on ne voit jamais de contrôles alors que ces drogues circulent pourtant dans des lieux bien connus.

Plus largement, cela doit nous amener à repenser le rôle global des forces de l’ordre. Sauf exception, ce sont systématiquement les classes populaires qui se retrouvent visées par les opérations anti-délinquance, comme s’il n’y avait que les précaires qui pouvaient être coupables d’un délit. Pourtant, la délinquance bourgeoise existe bien à La Réunion, et fait d’importants dégâts. Or, la police n’agit jamais contre elle, et la justice encore moins. Alors exigeons la fin de ces privilèges et battons-nous contre la répression des classes populaires dans notre pays.

Mathieu Raffini

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