Planteurs, pêcheurs : définir un cadre de coopération adaptée

20 février 2019, par Ary Yée-Chong-Tchi-Kan

Depuis quelques jours, une information circule : un bateau malgache est arrivée avec une cargaison de poissons destinés au marché réunionnais. L’entrée serait illégale et la cargaison non contrôlée par les douanes. Des Malgaches feraient donc de la concurrence déloyale aux Réunionnais. Le bateau s’appelle “l’île Sainte Marie” et l’équipage est totalement malgache. L’opinion traduit que des Malgaches sont un danger pour les travailleurs réunionnais. Les réactions publiques dérapent vers la xénophobie.

En 2013, ce sont des tomates malgaches qui sont incriminées. Absence de traçabilité comme pour le poisson. Ces tomates malgaches sont accusées de tous les maux. Problèmes phytosanitaires et concurrence déloyale. Le Préfet entre en scène, pond un arrêté et bloque l’entrée de 2 containers. Conclusion de l’opinion : La Réunion a été sauvée de l’invasion de tomates malgaches et les Réunionnais ont évité des maladies importées.

Or, dans l’affaire des tomates, pourquoi les noms des opérateurs réunionnais n’ont jamais été cités ? Pendant des jours, l’information place le malgache en position d’accusé. L’impact négatif est terrible sur le vivre ensemble réunionnais vanté à tous les touristes. Dans le cas de la pêche, l’opérateur est connu, c’est le patron de Reunimer. Il reconnaît que les douanes font des contrôles épisodiques. Il a fait traduire en justice le président du Comité de Pêche et un manifestant pour entrave à la liberté de travail. Il leur a réclamé des dommages.

Les choses sont claires : aucun Malgache n’a été identifié comme faisant partie de la chaîne de responsabilité. Mais ce qui restera dans la mémoire de ses luttes : les Malgaches font concurrence aux producteurs réunionnais. En réalité, il s’agit de la concurrence que se font les importateurs réunionnais sur le dos des travailleurs malgaches. Les travailleurs et producteurs réunionnais sont victimes d’un même système d’exploitation capitaliste. Ils gagneraient à s’unir pour remettre de l’ordre dans le système en coopération avec… les Malgaches. Pour 2 raisons essentielles.

D’abord, les Accords de Partenariat Économiques signés entre l’Union Européenne et nos voisins vont entrer en vigueur, dans le but d’accentuer le libre échange, favorables aux opérateurs. Rien n’a été fait du côté réunionnais pour protéger les intérêts des planteurs et pêcheurs réunionnais. Quand les questions phytosanitaires et de traçabilité seront résolues par un cahier des charges imposés aux producteurs malgaches par les opérateurs réunionnais, et que les contrôles douaniers seront plus stricts et plus serrés, tous nos contre-feux tomberont.

Ensuite, à Madagascar, on produit des tomates et des poissons pour nourrir 24 millions de bouches aujourd’hui, 50 millions dans 30 ans. Tout au plus, La Réunion comptera 1 million d’habitants. Ces réalités sont connues mais seul le PCR a le courage de le dire. Il est urgent pour les producteurs réunionnais de coopérer avec leurs homologues malgaches pour tenter de sauver la production réunionnaise.

Ary

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