La Chambre régionale des Comptes examine l’impact de l’arrêt d’un projet

Pôle Océan : 11 millions d’euros perdus à jamais

5 mai 2011, par Manuel Marchal

Lors de l’audience solennelle de la Chambre régionale des Comptes, il a été question de la raréfaction des ressources des collectivités. Dans un tel contexte, les projets d’investissement sont un trésor qu’il est nécessaire de préserver. Mais la Chambre régionale des Comptes a étudié les conséquences d’une décision politique qui va à l’opposé : l’arrêt du Pôle Océan et le gaspillage de plus de 10 millions d’euros.

Mardi, la Chambre régionale des Comptes a accueilli Didier Migaut, premier président de la Cour des Comptes, à l’occasion de son audience solennelle. Les discours du président Roux et de Didier Migaut ont notamment décrit la situation financière tendue de nos collectivités. Le président de la Chambre régionale des comptes a souligné « un contexte économique où les ressources sont de plus en plus rares », tandis que le premier président de la Cour des Comptes a estimé quant à lui « le contexte actuel où, la ressource financière publique devenant plus rare ». Tous deux ont aussi mis en évidence de fortes dépenses de fonctionnement qui limitent les marges de manœuvres, et donc rendent plus difficile les investissements.
Autrement dit, l’heure des choix est arrivée selon Didier Migaut : « Les projets d’investissement d’avenir sont nombreux à La Réunion, la route du littoral, les transports en commun, l’alimentation en eau potable, l’assainissement ou encore les investissements aéroportuaires. Des choix stratégiques majeurs vont devoir être faits dans un avenir proche. Des arbitrages devront être pris. Des priorités vont devoir être fixées, dans un contexte financier qui reste difficile ».
Ce contexte de pénurie décrit par les deux magistrats rend d’autant plus graves les décisions prises par des responsables politiques d’arrêter les grands chantiers. La Région a stoppé ceux du tram-train, de la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise, repoussé celui de la nouvelle route du littoral. La conséquence, ce sont aujourd’hui plus de 146.000 demandeurs d’emploi dans notre pays.
Mais d’autres décisions de ce type avaient été prises à partir de 2007, ce qui déclencha la crise dans le BTP. Il y eut la suppression de la rocade du Tampon par Didier Robert, un projet de 100 millions d’euros. Et ensuite, le changement de majorité à Saint-Denis a entraîné celui du Pôle Océan. Les conséquences de cette décision ont été justement examinées à la loupe par les magistrats de la Chambre régionale des Comptes.
Dans les observations adressées au maire de Saint-Denis et rendues publiques, ils rappellent que le Pôle Océan, c’était un investissement prévu de 156 millions d’euros selon le dernier avenant signé en 2006, dont 20% à la charge de la mairie de Saint-Denis. En 2008, c’est le changement de majorité, et la nouvelle équipe décide d’arrêter le chantier. C’est chose faite en 2009, la municipalité décide de résilier la Convention publique d’aménagement dans laquelle était intégré le Pôle Océan. La Chambre régionale des Comptes a donc publié le coût de cette décision. Au total, ce sont 14 millions d’euros dépensés en pure perte.
À cette somme précisée par la Chambre des Comptes s’ajoute une autre perte qui n’est pas estimée. C’est celle du nombre d’emplois qui auraient dû être créés mais qui ont été enlevés aux travailleurs réunionnais.

Manuel Marchal


Le prix d’une décision politique

Voici un extrait du rapport d’observation adressé par la Chambre régionale des Comptes à la mairie de Saint-Denis :

Au 31 décembre 2008, le montant de la participation réglée par la commune, tel qu’approuvé par le conseil municipal dans le CRAC de pré-clôture, s’élevait à 30.227.000 euros (apport en foncier de 10.770.000 d’euros inclus). En 2009, la commune devra verser 6.117.000 d’euros (participation d’équilibre restant due), auquel devront se rajouter le rachat des terrains cédés à la SODIAC pour un montant de 47.137.000 d’euros, soit un total de 53.254.000 d’euros.
Au total, sur l’ensemble de la CPA (et après rachat du portage foncier à l’établissement public foncier de La Réunion (EPFR) dans les quatre ans), la commune aura déboursé la somme de 83.579.000 d’euros (participation d’équilibre + rétrocession du foncier). Près de 80% de ce montant auront été absorbés par l’opération Ilot Océan (66.452.000 d’euros).
Néanmoins, la chambre considère que l’opération Pôle Océan constitue un
échec au regard des objectifs fixés dans la CPA, puisque seules les acquisitions foncières et les études ont été réalisées. En outre, avec la résiliation de la convention et l’abandon de la ZAC Océan, et quel que soit le devenir du projet, la non réalisation du l’opération Ilot Océan aura engendré une perte pour la commune pouvant être évaluée à 11.000.000 d’euros sur dix ans (sur un total de 66.000.000 d’euros).
À ce montant, il convient d’ajouter les pertes liées aux opérations hors Ilot Océan, et notamment celles liées aux Galeries Leclerc (3.000.000 d’euros).
Au total, la chambre estime que l’échec de la convention publique d’aménagement aura finalement coûté à la commune de Saint-Denis près de 14 millions d’euros.

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