Edito
Un maximum de Réunionnais producteurs d’électricité : condition de l’autonomie énergétique
/ 15 octobre 2018
En France, le charbon disparaîtra du mix énergétique dans 4 ans au plus tard, c’est une des conditions pour que ce pays respecte l’Accord de Paris. Mais pour La Réunion, le délai est beaucoup plus souple : aucune date n’est fixée. En effet, lors du passage dans notre île de Sébastien Lecornu, secrétaire d’État à la Transition énergétique, le membre du gouvernement avait bien précisé que l’échéance 2022 ne s’applique pas pour les centrales thermiques qui ne sont pas connectées au réseau électrique français. Deux sociétés étrangères à La Réunion exploitent ce type d’installation polluante dans notre île, EDF et Albioma.
EDF n’a pas encore indiqué quand ses centrales du Port ne dégageront plus d’émission de gaz à effet de serre. Son concurrent vient pour sa part de prendre position.
En visite à La Réunion, Frédéric Moyne, directeur général d’Albioma, a dévoilé la stratégie du propriétaire des deux centrales thermiques charbon/bagasse de La Réunion. Sa société a décidé de prendre en compte cette contrainte en se fixant comme but de ne plus utiliser de charbon en 2023. Ce dernier sera remplacé par de la biomasse. Mais pour Albioma, dans les conditions actuelles, La Réunion n’est pas capable de fournir la ressource demandée. Aussi, 60 % de la source d’énergie remplaçant le charbon devra être importée. Ceci suppose encore de la pollution, car cette biomasse devra être transportée par bateau, puis par camion jusqu’aux centrales ce qui va donc provoquer des émissions de gaz à effet de serre. Les masses transportées devront être plus importantes que le charbon, ce qui implique une hausse significative de la pollution due au transport.
Ceci rappelle que ce n’est pas avec le modèle actuel que La Réunion pourra atteindre l’autonomie énergétique. En effet, le remplacement du charbon par de la biomasse ne remet pas en cause ce modèle, basé sur quelques puissantes centrales chargées d’alimenter toute l’île.
L’autonomie énergétique peut être réalisable, à condition de décentraliser le réseau de production. C’est un modèle que l’informatique a adopté, en passant des gros calculateurs centralisés à l’Internet. À La Réunion, le travail a déjà commencé avec la diffusion de panneaux photovoltaïques sur les toits de particulier ou d’entreprise. Utiliser au maximum les toits, les parkings et couvrir des routes de panneaux permettra d’aller beaucoup plus loin. S’il est possible d’ajouter à cela la valorisation de plantation de canne à faible rendement en sucre en plantation de canne-fibre à fort rendement énergétique, un autre grand pas sera fait. Cela suppose la construction de petites centrales au plus près de ces exploitations agricoles, afin d’être des sources d’énergie de proximité pour des quartiers ou le photovoltaïque a un développement limité. En effet, l’autonomie énergétique passe par la mise en production de moyens permettant de produire de l’électricité sans avoir besoin de transporter une matière première.
En ajoutant la valorisation des énergies de la mer grâce à la construction de centrales à l’abri de la montée du niveau de la mer dans les villes du littoral, alors il sera possible de se passer des grosses centrales d’EDF et d’Albioma, et de la noria de camions polluants nécessaires à leur alimentation.
Cela nécessite une volonté politique pour en finir avec un monopole stratégique contrôlé par des intérêts extérieurs : le monopole de l’énergie.
J.B.