Victoire — sans Appel — de la présomption d’innocence !

26 août 2009

Le combat fut rude !
Des années durant, “Témoignages” a milité en faveur du respect de la présomption d’innocence et du caractère exceptionnel de la détention provisoire.
Durant toutes ces années, nous avons constaté que ces deux principes étaient restés lettre morte.
Ces deux principes existent depuis fort longtemps en Droit français, mais des générations de juges d’instructions et de magistrats de Cour d’Appel pratiquaient — par “principe” — à l’inverse exact des garanties accordées à tout justiciable.
Le scandale était devenu tel que M. Balladur, alors Premier ministre, s’éleva à plusieurs reprises contre cette façon de procéder.
Finalement, après d’interminables débats, la loi sur la présomption d’innocence votée le 15 juin 2000 modifia le Code de procédure pénale et proclama mieux protéger les droits des personnes mises en examen, notamment en réformant la détention provisoire.
Mais tout continua comme avant.
Tout le monde a encore en mémoire l’Affaire du Comité des Fêtes de Saint-Pierre qui vit l’un des présumés innocents être jeté en prison sans aucune autre raison que celle avancée par le Procureur de la République Paul Rabesandratana : il doit aller en prison, car la vindicte populaire le désigne comme coupable. La Cour d’Appel confirma. La Cour de Cassation cassa. Qu’à cela ne tienne, à peine libéré — présumé innocent, ne l’oublions pas — il fut aussitôt remis en détention et la Cour d’Appel confirma encore avant que la Cour de Cassation ne casse une nouvelle fois.
Mais, cessons de nous plaindre, l’Avocat général, M. Michel Baud, juriste de qualité s’il en est, vient d’annoncer que, désormais, c’est le principe de la présomption d’innocence qui doit l’emporter et le maintien en liberté doit être la règle.
Que le principal et premier bénéficiaire de cette reconversion tant espérée soit M. Mamodtaky libéré à la suite d’un aussi incommensurable qu’historique pataquès initié à la demande de son collègue M. Basset, n’est que le fruit d’un pur hasard. C’est pur hasard si c’est lui qui inaugure ce nouveau cours et bien mal avisé serait celui qui cèderait à la tentation d’y voir la volonté de ne pas accabler plus encore M. Basset. En effet, M. Mamodtaky semble avoir mis à profit ce — pour une fois — rigoureux respect de la présomption d’innocence pour quitter La Réunion et s’aérer ainsi l’esprit bien qu’il ne dispose pas de passeport. Un bénéficiaire de l’entrée de La Réunion dans l’espace Schengen avant l’heure en somme.
Mais, ainsi que le déclare M. Michel Baud 1 au "Quotidien" : « N’oublions pas que la détention est l’exception et la liberté est la règle ».
Il en est cependant qui doivent regretter de n’être pas — comme c’est la cas pour M. Mamodtaky — au centre d’une tuerie à la kalachnikov. Le 25 mai 2009, ils ont entendu le même M. Baud déclarer : « les détentions sont parfaitement justifiées : Les dossiers sont gérés de manière autonome et il est donc normal qu’un nouveau mandat de dépôt soit prononcé contre A.M 2.. Compte tenu des événements, le remettre en liberté ne permettrait pas d’assurer sa représentation devant la justice ». Il est vrai qu’il s’agissait là d’un des protagonistes de la fameuse évasion héliportée où personne n’a été assassiné. Qui sait, d’ici son procès, ce pâle comparse aurait pu s’envoler dans les cieux !
M. Mamodtaky, pour sa part, est dans une situation tout à fait différente puisque, chacun l’aura constaté, c’est une décision de la Cour d’Assises qui l’a « évadé » sans qu’aucune garantie de représentation ne lui soit imposée.

Jean Saint-Marc

1 — "Le Quotidien" – 25 août 2009 : « La famille Remtoula fait appel au président Sarkozy » - p.5
2 — Respectant la loi du 15.06.2000, nous ne mettrons pas en cause cette personne. Celle-ci, tant qu’elle n’est pas définitivement jugée et condamnée est présumée innocente.


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