Elisabeth Borne engage la responsabilité du gouvernement par le 49.3
Budget de la Sécu : le volet recettes adopté sans vote
jeudi 26 octobre 2023
Elisabeth Borne a déclenché le 25 octobre un nouveau 49.3 à l’Assemblée, sur la partie « recettes » du budget de la Sécurité sociale, au deuxième jour de l’examen de ce texte. LFI et le RN ont annoncé une motion de censure. Les oppositions dénoncent ce projet de budget, craignant un sous-financement de la santé et une hausse des franchises médicales.
« Malgré nos ouvertures, une fois de plus, l’usage selon lequel les groupes d’opposition refusent de voter un budget, quel qu’il soit, a prévalu », a déclaré la première ministre dans l’hémicycle pour justifier ce nouveau recours à l’arme constitutionnelle de plus en plus décriée, notamment par les instances européennes.
En riposte, LFI a immédiatement déposé une motion de censure - avec des signatures communistes et écologistes et la promesse des voix du PS -, et le groupe RN de Marine Le Pen a annoncé qu’il en ferait de même.
La date d’examen de ces motions n’a pas encore été fixée mais elles pourront être mises au vote dans la soirée du 27 octobre. Comme les deux motions de la semaine dernière, elles ont peu de chances d’aboutir car le groupe LR exclut de faire tomber le gouvernement sur un texte budgétaire.
Avant l’arrivée d’Elisabeth Borne dans l’hémicycle, les macronistes avaient essuyé une série de revers, avec le rejet des trois premiers articles examinés. Ces articles comptables rectifiaient notamment la prévision de déficit pour 2023, revue à la hausse à 8,8 milliards d’euros, ou encore l’objectif de dépenses de l’assurance maladie pour 2023.
Les oppositions dénoncent un sous-financement du système de santé dans ce projet de loi de financement de la Sécu (PLFSS) pour 2024. Après être parvenues à rejeter de manière inédite en commission, les oppositions pointent du doigt des prévisions économiques « irréalistes » voire « insincères » dans ce budget, qui table sur un déficit de la Sécurité sociale de 11,2 milliards en 2024.
Quatorzième 49.3
Ce nouveau 49.3, sur le volet « recettes » du PLFSS en première lecture, intervient une semaine après celui déclenché sur le budget de l’Etat. Il s’agit de la quatorzième fois qu’Elisabeth Borne l’utilise pour obtenir l’adoption d’un texte sans vote.
Le gouvernement a provisoirement écarté une mesure vivement débattue : la possible mise à contribution obligatoire de l’Agirc-Arrco, la caisse de retraites complémentaires du privé, pour participer à « l’équilibre » du système de retraite.
Les partenaires sociaux avaient refusé catégoriquement la demande de l’exécutif de récupérer au moins un milliard d’euros par an dans ses excédents. « À ce stade, nous ne déposerons pas d’amendement réduisant les recettes du régime Agirc-Arrco », a assuré le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave.
Mais il n’a pas exclu la possibilité d’un amendement plus tard. « Nous demandons des avancées concrètes et rapides » aux partenaires sociaux « dans le temps ouvert par la navette parlementaire », a prévenu le ministre.
Aucune clarification
L’exécutif a aussi mit de côté le doublement du reste à charge des assurés pour les médicaments (actuellement 50 centimes par boîte) et les consultations (1 euro), dénoncée par les oppositions comme par les associations d’usagers. « On pense que c’est l’un des leviers qu’on croit pouvoir activer », a assuré Thomas Cazenave.
L’éventuelle hausse des franchises n’apparait pas dans le PLFSS, et le gouvernement pourra l’instaurée par voie réglementaire. « Il n’y a aucune clarification, pour nous c’est insupportable », a déploré le député PS Jérôme Guedj.
Pour freiner les dépenses de santé, le gouvernement vise au total une économie de 3,5 milliards d’euros en 2024, via des baisses de dépenses pour les médicaments, les laboratoires d’analyse ou encore les arrêts maladie. Le recours au 49.3 lui permet d’intégrer dans le texte les amendements de son choix, parmi les plus de 3000 déposés.
Dans ce volet « recettes », adopté avec le rejet attendu des motions de censure, l’exécutif a notamment inclus un amendement de la majorité « pour réduire l’augmentation des allègements de charges » pesant sur les comptes sociaux.
Le dispositif prévoit une révision du mode de calcul des exonérations de cotisations patronales sur les hauts salaires, et « évitera une perte de recettes de l’ordre de 600 millions d’euros », selon le ministre.
Il a aussi ajouté son propre amendement créant un délit de « promotion et de facilitation » de la fraude sociale, « pendant du délit qui sera instauré pour l’incitation à la fraude fiscale ».