Lettre ouverte de la CGTR-Santé au préfet de La Réunion, a la directrice de l’ARS-Réunion, et au président du Conseil départemental de La Réunion

CGTR-Santé : propositions pour une véritable politique de santé à La Réunion

13 août 2021

L’épidémie de coronavirus causée par les variants importés révèle les conséquences du désengagement de l’État dans les hôpitaux publics : manque de moyens humains et matériels pour faire face à la COVID-19. Dans une lettre ouverte adressée aux autorités sanitaires, au représentant de l’État et au président de la collectivité réunionnaise compétente en matière de santé, la CGTR Santé fait part de ses propositions pour une véritable politique de santé à La Réunion. Elle s’élève également contre toute menace de licenciement à l’encontre de travailleurs non-vaccinés : « Ceux qui, à la tête du CHU Réunion, ont pris les décisions successives de fermer le service d’urologie, le service de chirurgie pédiatrique à Terre-Sainte, unique service grands brulés de l’océan indien, et plus récemment, ont fait fermer la deuxième ligne d’intervention du SAMU, n’ont-ils pas mis bien plus en danger les malades et gravement perturbé l’ordre public ? Ont-ils été sanctionnés pécuniairement ? Non ! »

Objets :
– Problèmes posés par l’application du « pass sanitaire » et de l’obligation vaccinale dans les hôpitaux et autres structures sanitaires, sociales et médico-sociales ;
– Demande de moyens pour lutter contre la pandémie COVID et pour développer un système de santé capable de prendre en charge TOUS les besoins dans le respect des droits fondamentaux.

Madame, Monsieur,
La loi du 05 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire instaurant le « pass sanitaire » ainsi que l’obligation vaccinale des personnels des établissements sanitaires et médico sociaux est largement en deçà des moyens à mettre en œuvre pour faire face à la pandémie COVID 19 que nous connaissons depuis bientôt deux ans. Nous rappelons que l’OMS préconise le développement d’une véritable démarche de santé publique : convaincre et non contraindre.
De plus, la précipitation du gouvernement à faire adopter ces mesures plonge ces salarié-es dans des tensions et difficultés certaines pour envisager leur application pratique dans leurs établissements (tout comme les professionnels exerçant aux domiciles des usagers).
Inapplicables, insuffisantes et même contre productives à bien des égards, ces décisions entrainent des contestations et des mobilisations portant de nombreux problèmes et revendications qu’il est temps de prendre en compte.

Nous tenons à mettre un accent particulier sur l’absolue nécessité de récupérer les brevets vaccinaux dans le domaine public, ceci pour développer une stratégie internationale à moindre coût et en toute autonomie. Sans stratégie internationale, impossible de faire face à une pandémie !

Ce n’est pas en multipliant les menaces que l’on organise une société, mais en développant l’accès à la connaissance, et en développant la démocratie pour instaurer un climat de confiance. Ainsi les propos du Ministre sous entendant l’interdiction du droit de grève sont absolument inacceptables. L’heure est au développement d’une démarche de prise en compte des revendications de la population par l’ouverture de négociations sociales à tous les niveaux.
Conscients de la situation, nous vous demandons d’agir pour le développement d’une véritable politique de santé capable d’actionner tous les leviers utiles pour faire face à cette maladie.
Vous trouverez ci-dessous les éléments qui nous semblent essentiels pour faire face aux enjeux sanitaires qui sont posés dans le cadre de la pandémie COVID 19, mais aussi pour bien d’autres pathologies qui souffrent aujourd’hui, comme depuis de nombreux mois, de prises en charge inadaptées, voire de leurs absences (comme le report et l’annulation des opérations par exemple).

LES MOYENS DE MENER UNE VERITABLE POLITIQUE DE SANTE


Lutter contre la contamination :

– Tests antigéniques, autotests et masques gratuits pour l’ensemble de la population. La CNIL a d’ailleurs souligné que « la mise en œuvre d’un « pass sanitaire » permettant de réguler l’accès à certains lieux, établissements et évènements, en principe libre, ne se justifie qu’en complément d’une politique d’accès aux tests et aux vaccins active et équitable, ce dispositif devant s’inscrire dans une politique sanitaire globale et cohérente »,
– Mise en place à chaque entrée d’établissement, de personnels supplémentaires pour donner des masques neufs et efficaces, et assurer la décontamination des mains,
– Mise en place de filtration d’air spécifique dans les établissements,
– Rappelez que l’on peut être contaminant même en étant vacciné.

Développer la vaccination :
– Les services de l’Etat et les directions d’établissements doivent demander la levée des brevets des vaccins pour favoriser le choix dans les formes de vaccins, et pour permettre à l’ensemble des populations de tous les pays du monde (notamment les plus pauvres) d’accéder à la vaccination, et ainsi de réduire le risque de personnes gravement atteintes tout comme le développement des variants,
– Démarche volontariste pour aller à la rencontre des populations fragiles non encore vaccinées (personnes de plus de 80 ans, personnes privées de logement, personnes en situation de migration involontaire…),
– Information claire, complète et sereine (donc sans menaces de sanction) aux agents sur tous les établissements, même les plus éloignés,
– Réflexion sereine (donc sans menace de sanction) sur la vaccination des professionnels de santé et sur la conduite à tenir pour les personnels non vaccinés en collaboration avec les organisations syndicales.

Les moyens de prendre en charge correctement aujourd’hui et demain :
– Résorption du sous-effectif chronique dans tous les services et tous les grades,
– Renfort significatif de personnel dans les services COVID,
– Arrêt des fermetures de lits, et dimensionnement des capacités en lits et en structures adapté à la situation, et plus de visibilité sur le plan de déprogrammation en vigueur sur le département,
– Déblocage de postes d’internes supplémentaires en réanimation et dans toutes les spécialités en tension (généralistes, psychiatres…) dès le mois de septembre,
– Embauches immédiates d’agents de service dans l’objectif de pouvoir respecter les protocoles d’hygiène des locaux,
– Déblocage exceptionnel de budget pour augmenter de façon très significative les formations qualifiantes (Aide-soignant, Infirmier, Manipulateur radio, Psychologue…) et ainsi préparer l’avenir,
– Arrêt de tous les plans de retour à l’équilibre,
– Financement de la recherche publique à hauteur des besoins : la France est l’un des pays de l’OCDE ayant consacré le moins de budget à la recherche contre le COVID (environ 3 fois moins que l’Allemagne par exemple…).

Favoriser le recrutement et la fidélisation des personnels :
– Recrutement par stagiairisations pour les hospitaliers et en CDI pour le secteur privé,
– Ouverture de concours sur titres et CAP en urgence pour la titularisation de tous les contractuels de la FPH,
– Amélioration des conditions de travail et d’attractivité des métiers.
Reconnaissance des risques professionnels sur la santé des personnels :
– Suppression du jour de carence pour les arrêts maladie et reconnaissance comme maladie professionnelle de toutes les infections COVID touchant les personnels
– Reconnaissance comme accident de travail des éventuelles séquelles post vaccinales.
– Positionnement des personnels cas contact en télétravail si cela est possible ou en autorisation spéciale d’absence sans perte de droits (ASA).

RESPECTER LES DROITS FONDAMENTAUX

Accès aux soins et autres prises en charge :
– Aucune discrimination des usagers à l’accès aux prises en charge sanitaire, sociale ou médico-sociale n’est tolérable. Tout retard de prise en charge peut être à l’origine d’une dégradation de l’état de santé physique, psychologique ou social des usagers. Le risque que cela entraîne une saturation des services d’urgence doit aussi être pris en compte. Notre Système de santé et d’action sociale doit être en capacité de prendre en charge les patients COVID, et non COVID, qu’ils soient vaccinés, ou non. Un système de santé et d’action sociale efficace et ouvert à l’ensemble de la population, constitué sans discrimination, est l’une des garanties d ‘une société apaisée : c’est une question d’éthique. D’ailleurs, l’avis du conseil constitutionnel porte une contradiction puisqu’il précise qu’il ne devra pas y avoir d’entrave aux soins !
– Communication envers les patients pour qu’ils soient pris en charge même sans « pass sanitaire » en application du code de la santé publique, de la préconisation du conseil constitutionnel et du serment d’Hippocrate,
– Distribution gratuite de masques et de gels hydro alcooliques à l’entrée des établissements.
- Protéger le secret

CONCERNANT PLUS SPECIFIQUEMENT L’ILE DE LA REUNION :

La situation à la Réunion s’aggrave avec une intensification de la circulation du COVID-19.
De 27 cas pour 100 000 habitants en janvier, le nombre des contaminations est monté aujourd’hui à 420.5, ceci alors que le nombre de dépistages est en baisse., Ce que l’on peut craindre, c’est une explosion des hospitalisations dans les jours à venir, et donc un surcroit de travail pour tous les travailleurs.
Dans une situation où l’on a besoin de toutes les énergies pour soigner les malades, menacer les personnels non vaccinés de suspension de leurs contrats de travail est une aberration !
Comment l’État peut-il se permettre de les menacer de suspendre leurs contrats de travail, leurs salaires, et même, comme l’a déclaré la ministre de la Santé, d’être licenciés ?
Ceux qui, à la tête du CHU Réunion, ont pris les décisions successives de fermer le service d’urologie, le service de chirurgie pédiatrique à Terre-Sainte, unique service grands brulés de l’océan indien, et plus récemment, ont fait fermer la deuxième ligne d’intervention du SAMU, n’ont-ils pas mis bien plus en danger les malades et gravement perturbé l’ordre public ? Ont-ils été sanctionnés pécuniairement ? Non !
Aussi aucune sanction ne peut se justifier pour les agents non vaccinés.
Si tel était le cas, la CGTR appellera les salariés à riposter en se mobilisant pour faire échec à toutes les sanctions prévues dans la loi du 5 août 2021.
Il est urgent qu’enfin notre parole soit prise en compte. Si tel avait été le cas depuis le nombre d’années que nous portons les mêmes revendications, nous ne serions pas dans la situation si tendue que nous connaissons…
Restant dans l’attente du développement d’une véritable politique de santé pour faire face à cette maladie, veuillez recevoir, Madame, Monsieur, l’expression de nos salutations distinguées.

Fédération CGTR santé action sociale

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