Une interview de David Millian, chargé de communication à l’E.F.S

... Cherche associations de quartier pour populariser le don du sang

24 juillet 2007

Depuis la reprise des collectes de sang, le mois dernier, l’E.F.S s’efforce de trouver des relais pour l’aider à faire grandir dans la population le “réflexe du don”...

Les dons du sang ont repris depuis le 14 juin. La reprise a-t-elle permis d’atteindre, ou du moins d’approcher, un niveau suffisant ?

- A la reprise, on a eu un effet quantitatif - nous attendions 100 personnes et nous en avons reçu près de 250 - et un effet qualitatif, parce que les gens ont quelquefois attendu plus de deux heures. C’est ce qui me fait dire que le potentiel est énorme. Mais il peut y avoir un fossé entre le potentiel manifesté en une occasion exceptionnelle et le don quotidien... c’est comme “les petites choses de l’amour” : on sait qu’on doit les faire... et on ne les fait pas forcément !
Ceci dit, je n’ai pas l’impression que le don quotidien soit plus difficile ici qu’en Métropole. C’est notre “ampoule de donneurs” qui n’est pas assez importante. Il nous faut recruter de nombreux nouveaux donneurs. Avant la suspension des collectes, on faisait 17.000 prélèvements par an, ce qui représentait environ, d’après un mailing fait avant l’interruption, 10 à 11.000 donneurs.

Et maintenant ?

- Les résultats sont encourageants, mais pas suffisants. On avait l’objectif de 35 poches prélevées par collecte (Nord et Sud), soit environ 70 poches (par collecte) dans l’île. Mais on a aussi un taux de contre-indication très important : jusqu’à 30% et, en moyenne, sur Saint-Denis par exemple, on a eu 26% de contre-indication.

À quoi correspondent ces contre-indications ?

- C’est dû à ce que certains sont des nouveaux donneurs qui ne connaissent pas les “règles” : pas de piercing fait dans les quatre derniers mois ; pas de visite chez le dentiste dans les deux jours précédant le don ; cela dépend bien sûr de l’objet de la visite : pas d’arrachage de dents de sagesse par exemple... ; en cas de voyages en zone impaludées, il faut aussi laisser passer quatre mois ; si le donneur change de partenaire sexuel, le médecin va chercher à savoir s’il se protège, s’il change souvent... C’est comme pour la consommation de drogue, tout est question de pratiques.

Est-ce que vous avez identifié des obstacles au don du sang qu’on pourrait qualifier de “culturels” ?

- Déjà, il y a une difficulté : ceux qui ne veulent pas donner ne viennent pas. Donc, il est difficile de savoir pourquoi, et ce qu’ils pensent. J’ai surtout l’impression que ceux qui ne veulent pas venir, c’est par peur de l’aiguille ! Les garçons sont même moins courageux que les filles là-dessus...
Mais si vous pensez à des questions de croyances par exemple, la remarque est plus vraie pour nos amis qui travaillent pour le don d’organe. Je sais que pour eux, c’est une difficulté. Mais ça ne l’est pas pour nous. C’est dû au fait que le don d’organe touche à des morts, alors que nous sommes dans le vivant.

Mais est-ce qu’il n’y a pas des connaissances basiques à avoir ? Est-ce qu’on ne donne pas plus facilement quand on sait ce qu’on donne ?

- Bien sûr ! C’est pour cela qu’on parle d’ancrer le don dans le quotidien. C’est plus une question d’éducation. C’est l’éducation qui prédispose à acquérir un réflexe qui, après, va se traduire au quotidien.

D’où l’intérêt d’aller en parler dans les établissements scolaires, d’aller partout au contact des jeunes adultes...

- Oui, c’est dans nos projets ; mais le problème est que la collecte, c’est un peu les 12 travaux d’Hercule... On a une urgence qui est de “faire entrer” des poches tout de suite. Il nous faut revalider tous les points de collecte qu’on avait avant... dont un grand nombre n’était pas adapté. Il faut un local assez grand, assez propre, avec trois prises de courant, un extincteur... Pas d’escalier d’accès, ou alors pas trop important. Ensuite, quand on a le lieu qu’il faut, il doit aussi être sur un axe fréquenté, accessible, avec parking... Et troisièmement, il faut faire l’annonce du point de collecte, de la date. Il faut un affichage.

Vous avez des correspondants de collecte ; quel est leur rôle ?

- Ce sont les personnes référentes pour chaque lieu donné. Nous avons autant de correspondant(e)s de collecte que de lieux. Mais ce qui fait le succès d’une collecte, c’est la façon dont elle va être perçue dans un quartier. A La Réunion, contrairement à ce qui existe en France, il n’y a pratiquement pas d’associations de donneurs de sang, pour faire le relais. C’est aussi ce qui fait que nous travaillons dans l’urgence. L’autre étape, c’est la sensibilisation des jeunes. Historiquement, il a existé une association des donneurs de France-Telecom. Et une deuxième association est en train de se monter, dans le Nord (l’association réunionnaise des donneurs de sang bénévoles) : on leur explique qu’il faut commencer petit et pragmatique.

Qu’est-ce qui fait le succès d’une collecte ?

- Outre les donneurs déjà répertoriés, ce sont les nouveaux donneurs, en lien avec une publicité de proximité. Souvent, les gens disent : « Je veux bien donner, mais il n’y a pas de pub pour nous dire où aller... »

Comment concevez-vous cette publicité de proximité ?

- On part du constat qu’il existe déjà beaucoup d’associations, avec des jeunes déjà portés à la solidarité. Donc, nous recherchons des associations de quartier prêtes à travailler avec nous. L’idée est que les jeunes, les membres y trouveront la satisfaction de venir aider des malades, de participer à une mission de service public, pour l’animation de deux à trois collectes dans l’année.

Est-ce que, compte tenu de la rareté de certains groupes sanguins ici, vous intégrez cette donnée dans vos appels au don ?

- Il y a effectivement des groupes rares qu’on trouve ici et difficilement ailleurs : le groupe “bombay” est le plus connu. Le plus petit dénominateur commun est le groupe (A, B, O...) et le rhésus (+ ou -). Mais un groupe sanguin est une carte d’identité génétique, avec des phénotypes selon les caractéristiques génétiques - dont certains sont très rares. Le but d’une transfusion est de délivrer le bon produit au bon moment. Ce rôle de “conseil transfusionnel” est assuré par l’E.F.S. C’est important, surtout pour les maladies au long cours, et cela devient vraiment difficile si le malade à transfuser appartient à un groupe rare.
C’est la problématique du don du sang ici : il faut trouver assez de donneurs réunionnais, pour disposer des caractéristiques génétiques d’ici. C’est la même chose pour le don de moelle osseuse, qui pose en plus la question du “type C.M.H” (complexe majeur d’histocompatibilité) - qui est beaucoup une question de fratrie.
En fait, la problématique du don est large : on commence par donner son sang, puis on devient donneur de plaquette ou de plasma (si on est éligible) ; on peut aussi donner sa moelle, les jeunes surtout.

Vous avez parlé de sensibilisation de proximité. Est-ce que vous recherchez aussi des sponsors ?

- Depuis deux ans, nous avons un sponsoring avec SFR : les clients SFR ayant accès au portail WAP peuvent avoir aussi toutes les dates et les lieux de collecte. Nous sommes ouverts à toute forme de sponsoring.

Propos recueillis par P. David


Les collectes de la semaine

Mardi 24 juillet
Mairie de l’Entre-Deux, de 8h à 12h.
Mairie annexe de Trois-Bassins, de 8h30 à 12h30

Jeudi 26 juillet
Plaine des Cafres : mairie, de 8h à 12h
Saint-Denis, mairie : de 8h30 à 12h30

Vendredi 27 juillet
Sainte-Clotilde, Messageries : de 8h30 à 13h


Pour donner son sang :

Informez-vous sur les prochaines collectes. Soit en téléphonant à Saint-Denis (0262.90.53.81) ou à Saint-Pierre (0262.25.48.01), soit sur le site de l’EFS : www.dondusang.net: on y trouve toutes les dates et les réponses aux questions basiques que les gens se posent.


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