Initiatives citoyennes pour lutter contre le chikungunya

’Comprendre la population pour la sensibiliser’

1er juin 2006

Que faire en attendant le centre de veille et de recherche pour bénéficier d’un système d’alerte réactif ? Jean Alain Cadet, membre du “Collectif Contre le chik” et initiateur du réseau citoyen “Vigichik”, pense qu’autorités et citoyens peuvent travailler main dans la main. Il y a des idées, il faut de la volonté et des moyens pour les concrétiser.

La mobilisation de toute une population est un objectif pour lutter contre l’épidémie. Son importance est souvent martelée, mais sa mise en application est encore abstraite. L’hiver austral appelle pourtant à la plus grande vigilance : de nouveaux cas sont recensés chaque semaine, le problème des déchets sauvages n’est pas réglé.

“Vigichik” : un projet approuvé

Depuis sa création officielle, le 16 mai dernier, le réseau citoyen de surveillance et d’alerte sanitaires “Vigichik” compte 100 observateurs qui font remonter, via le net, des informations de terrain utiles pour freiner la propagation de l’épidémie. "Le but est de mener "Vigichik" les autorités, être un relais, auprès des autorités, en leur signalant les gîtes potentiels, les nouveaux malades, ceux isolés, une reprise épidémique".
Jean-Alain Cadet compte sur l’adhésion d’au moins 1.000 Réunionnais pour couvrir l’ensemble du territoire, et ainsi fournir aux autorités des informations en temps réel. "La DRASS, qui doit piloter les secteurs d’intervention en fonction des signalements (et il semblerait qu’ils ne soient pas uniformes sur tout le territoire), a bien compris l’utilité de cet outil. Elle est en train de s’en saisir".
Le ministre de la Santé, lors de son passage à La Réunion, a lui-même approuvé la démarche et envisagé d’éventuelles aides exceptionnelles. Mais en attendant, les associations membres du projet poursuivent leurs collectages, avec leurs propres moyens, sans outil de médiatisation susceptible de générer de nouvelles volontés. "Notre but n’est pas de nous substituer aux autorités, mais de les aider, de leur apporter notre regard de terrain pour qu’elles se saisissent de l’initiative". C’est aussi un moyen concret de faire participer la population à la lutte.

"Il faut un effort continu"

Les expérimentations au sein des quartiers menées en début d’année par “Collectif Contre le chik” (CCC) montrent également que la proximité est indispensable pour faire participer la population. "Les campagnes télé ont mobilisé beaucoup d’argent sans produire leur effet, constate le militant associatif pour qui, il faut mieux cerner et tenter de comprendre la population pour la sensibiliser. Sur les quartiers, la plus grosse difficulté n’est pas le travail avec la population, paradoxalement, mais le travail avec les "autorités". Les équipes municipales ont leur système de fonctionnement, elles ont du mal à s’adapter à un petit changement".
En répondant aux questions de la population, en instaurant des échanges ouverts, faisant de la prévention active, menant des opérations de nettoyage... "On va tous dans la même direction pour lutter contre le vecteur. C’est long, mais il faut un effort continu qui prenne en compte l’avis de la population". C’est ce que tente de faire entendre CCC aux autorités.

La piste Bio

Et CCC a d’autres projets en tête, d’autres pistes à explorer. Permettre à chaque foyer d’avoir des produits de lutte biologique, en vente libre, est l’une d’entre elles. L’association vérifie actuellement leur efficacité sur une ou deux maisons, un terrain infesté, avant d’essayer sur un plus large périmètre, à l’échelle d’une ville. "Nous avons tiré comme enseignement de nos précédentes expériences qu’il faut bien préparer les choses avec tous les acteurs. Il ne suffit pas d’avoir des idées, mais il faut que la population adhère et pour le cas, il faudra un maire qui s’inscrit dans la même dynamique d’initiative citoyenne. Si on s’y met tous, il n’y a aucune raison que cela ne marche pas".

Stéphanie Longeras


An plis ke sa

Trop de décharges sauvages

Les signalements transmis au réseau citoyen “Vigichik” via le net concernent en majorité des décharges sauvages. "Je fais partie des gens plutôt sceptiques, confie Jean Alain Cadet. Il y a trop de sources de gîtes potentiels pour dire que l’épidémie va être jugulée si on ne met pas le turbo. Les lieux inaccessibles, les sources publiques doivent être attaquées. Certes les militaires n’ont pas pour mission de nettoyer, mais on ne peut pas compter sur l’incinérateur pour régler le problème".


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