Faute d’un nombre suffisant de tests pour dépister les porteurs du COVID-19 au départ de Mayotte

Coronavirus en France : vers une quarantaine obligatoire en provenance de Mayotte

19 juin 2020, par Manuel Marchal

Pendant que Maurice ferme ses frontières jusqu’au mois de septembre, des patrons réunionnais réclament la fin de la quarantaine avant le 10 juillet alors que la situation sanitaire de la France est plus grave qu’à La Réunion. Mais pendant ce temps, la France veut se protéger des cas importés de Mayotte, où le virus circule de manière plus importante qu’en France. Faute de tests systématiques à l’embarquement, les voyageurs quittant Mayotte pour se rendre en France pourraient bien être obligés de subir une quarantaine de deux semaines à l’arrivée.

A La Réunion, un lobby anti-quarantaine a obtenu la levée de cette protection de la population. Cette barrière doit s’ouvrir le 10 juillet au plus tard. Si des Réunionnais sont à l’origine de cette demande, il n’en demeure pas moins que cette revendication a un aspect culturel qui n’est pas à négliger. En effet, des passagers d’origine extérieure à La Réunion se sont plaints de devoir subir une quarantaine à leur arrivée à La Réunion. Ils jugeaient les conditions de vie dans un hôtel de luxe, tous frais payés, indignes. Mais au fond, ils n’admettaient qu’en tant que Français, ils soient obligés de prouver aux Réunionnais qu’ils sont suffisamment « propres » pour se mêler à notre population.
Dans l’imagerie populaire, la France est un pays riche et La Réunion une île lointaine sous perfusion d’un pays que certains appellent encore « Métropole ». Il est donc difficile d’imaginer que La Réunion soit un pays plus propre que la France en termes de coronavirus. Il n’y a qu’à se pencher sur les nombreuses photos de déchets abandonnés qui sont exploités pour décrire une Réunion « sale ». Mais en l’espèce, c’est en France que la situation sanitaire est plus grave qu’à La Réunion, d’où la décision logique d’imposer une quarantaine pour protéger la population.
Au plus tard le 10 juillet, la fin de cette protection risque de relancer l’épidémie à La Réunion. L’accalmie est bien fragile. C’est ce que rappellent encore les chiffres d’hier. 5 nouveaux cas ont été dénombrés, dont 4 cas importés de France, et 1 personne contaminée par un cas importé. La procédure privilégiée pour remplacer la quarantaine est un test de dépistage obligatoire plusieurs jours avant le vol. Il ne fait guère de doute que des juristes sont déjà mobilisés pour chercher la faille permettant d’annuler ce test, qui ne manquera pas d’être décrit lui aussi comme un obstacle à la venue de touristes.

A quand les manifestations ?

Il est révélateur de constater que pour l’arrivée de résidents de Mayotte en France, la France prend ses précautions. Extrait d’un reportage de Mayotte Première :
« La directrice Dominique Voynet explique que l’on a actuellement la possibilité d’effectuer « un maximum de 300 tests par jour ». Si on dépistait tous les voyageurs au départ, il ne resterait aucun moyen pour surveiller l’évolution de l’épidémie à Mayotte. Manque de personnel pour réaliser les tests, des machines aux capacités limitées, et une tension constante sur les produits réactifs ; tout cela fait que l’idée de tester les voyageurs au départ vers la métropole, exprimée par le ministre de la santé Olivier Véran mercredi soir devant l’Assemblée Nationale, n’est pas réalisable. Reste une autre option : celle de la quatorzaine stricte obligatoire pour les passagers à l’arrivée. Elle est déjà appliquée à la Réunion. Cette solution est peu envisageable pour ceux qui voudront aller passer un mois de vacances ».
A ce jour, aucune manifestation d’ampleur contre le projet de quarantaine pour les Mahorais se rendant en France n’a été relevée. Pendant ce temps, des patrons réunionnais manifestent contre la quarantaine imposée aux touristes européens se rendant à La Réunion. Rappelons également que Maurice a réglé la question de la quarantaine de la manière suivante : aucun touriste ne sera accepté avant le mois de septembre, en raison de la fermeture des frontières jusqu’au 31 août au plus tôt. Maurice a eu près de 2 fois moins de cas de COVID-19 qu’à La Réunion, et accueillait l’an dernier 1,4 million de touristes qui y ont dépensé 1,4 milliard d’euros.
Ceci rappelle donc que la protection de la population contre le coronavirus est à géométrie variable, il est fonction du degré d’aliénation : faible protection là où il est fort.

M.M.

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