C’était il y a 30 ans

De la brucellose au chikungunya

14 janvier 2006

En 1976, à l’aube de la constitution de sa filière bovine, La Réunion était confrontée à une maladie nouvelle menaçant l’existence du cheptel et la santé des Réunionnais. Cette maladie, la brucellose, infectait génisses et taurillons importés d’Afrique du Sud. Décimant les troupeaux, elle menaçait de ruine les éleveurs.
Alerté par l’inquiétude des éleveurs, “Témoignages” établit avec certitude que décès et avortements des bovins importés étaient la conséquence de la brucellose. Restait à briser le mur de silence édifié par les services de l’État et la Chambre d’agriculture. Jour après jour, avec opiniâtreté “Témoignages” accrochait la brucellose à sa Une. Tous les jours, exposant les aspects dangereux de cette maladie, “Témoignages” appelait les services de l’État à assumer leurs responsabilités en abattant les animaux malades, en indemnisant les éleveurs et en mettant fin aux livraisons et au plan d’importation du bétail d’Afrique du Sud. Simultanément, le PCR sonnait l’alarme, alertant l’opinion notamment par les interventions d’Élie Hoarau au Conseil général.
Les quelques extraits des “Unes” de notre journal datées de mai et juin 1976, démontrent que - malgré le black out imposé par les services de l’État - la campagne de “Témoignages” a permis à La Réunion de connaître l’existence de la brucellose et du danger qu’elle représente pour les humains. En donnant la parole aux éleveurs sinistrés, “Témoignages”, a permis qu’ils s’organisent et, malgré la volonté contraire de l’État, finissent par obtenir l’abattage de toutes les bêtes éradiquant du même coup la brucellose et préservant donc toutes les chances d’un renouveau de la filière d’élevage à La Réunion.
Trente ans plus tard, on comprend mieux les réactions des Réunionnais face à une attitude des responsables des services de l’État qu’ils jugent totalement incompréhensible. Pour eux les atermoiements, la sous-évaluation originelle de l’épidémie de chikungunya, la diffusion de chiffres incompatibles avec les observations faites sur le terrain par les victimes, leurs proches, médecins, infirmiers, kinés, etc., leur rappellent trop bien l’époque de la brucellose.
C’est en tenant compte de l’histoire de ces luttes réunionnaises pour préserver leur île que les autorités actuelles pourront comprendre enfin que le droit à l’information des Réunionnais doit impérativement être respecté. Cette mobilisation de l’opinion grandit avec les ravages causés par l’épidémie et ne cessera qu’avec son éradication.

Manuel Marchal

Chikungunya

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