Chikungunya : l’EFS gère la crise et au-delà

Discret mais efficace

7 mars 2006

Depuis sa décision de stopper les prélèvements de sang afin d’écarter tout risque de transmission du virus chikungunya par transfusion sanguine, l’Établissement français du sang (EFS) de La Réunion gère quelque 600 lots d’approvisionnements par semaine. Il poursuit en revanche le prélèvement de plaquettes, pour lequel il a mis au point une technique totalement novatrice qui permet d’en éliminer virus et bactéries par photothérapie.

Face au développement spectaculaire de l’épidémie, l’EFS de La Réunion prenait le 23 janvier la difficile mais essentielle décision d’activer le principe de précaution sur les prélèvements de sang qui constituent pourtant le pivot de son activité, sa source d’autofinancement.

"Un véritable exploit"

Tous les stocks de sang de La Réunion et de Mayotte ont ainsi été jetés et remplacés par des lots provenant de l’EFS Nord de France. En 24 heures, les techniciens, à pied d’œuvre, ont dû les ré-étiqueter pour en assurer la qualité et la traçabilité. "Un véritable exploit", "un tour de passe-passe", commente David Millian, chargé de communication auprès de l’EFS de La Réunion. Bien que ce type d’approvisionnement soit courant dans les autres DOM, pour La Réunion, jusque-là auto suffisante en termes de prélèvement, de préparation, de qualification et de distribution du sang, cet exercice a nécessité la modification de toute la chaîne logistique de l’EFS, le transfert temporaire des personnels vers d’autres missions. Depuis la fin janvier, l’établissement a trouvé son rythme de croisière et n’a rien perdu de ses atouts d’anticipation en prévoyant un approvisionnement supplémentaire de globules rouges, en raison des intempéries, elle qui a l’habitude de travailler à flux tendus.

Tuer bactéries et virus

L’EFS a le monopole sur la préparation et la qualification du sang. Cette activité lui permet de financer ses recherches, ses projets de développement. L’EFS de La Réunion a jusque-là relevé le défi de la création d’une banque de cellules et de tissus à Saint-Pierre. Un projet audacieux qui permet de développer un savoir-faire local sur certaines techniques de pointe et inscrit La Réunion dans une dynamique d’excellence. L’EFS se fait discret mais avance, à grands pas, même. En effet, dans l’attente d’une reprise de son activité de prélèvements sanguins, il a élaboré une nouvelle technique pour le prélèvement des plaquettes qui offre (en plus de la RT-PCR*) un surplus de sécurité car elle permet non plus seulement de détecter le virus, mais bien de détruire toute bactérie et tout virus retrouvé dans le prélèvement. Cette inactivation virale et bactérienne ne peut être explorée que sur des produits issus de l’Homme tels que le plasma et les plaquettes, mais pas sur le sang. Le principe actif utilisé ne répond en effet qu’à la photothérapie et les globules rouges ne filtrent pas, quant à eux, les UV.
Cette étude, opérationnelle d’ici deux semaines, fait partie d’une série de propositions émises par l’EFS de La Réunion au ministère de la Santé. Il lui suggère également de pouvoir intégrer la RT PCR dans sa structure, avec sa logistique propre, favorable au traitement d’un grand nombre d’échantillons, pour un nombre restreint de dépistages. L’on connaît bien mal l’EFS dont on tendrait à limiter l’action aux opérations de don du sang. Il ne s’impose pas parmi les acteurs institutionnels de santé, mais sollicite leur attention à raison, car ses initiatives et ses projets méritent certainement un surcroît de reconnaissance et d’intérêt.

Estéfani

*La RT-PCR est une technique qui utilise un réactif pour amplifier les traces du virus dans l’ADN et l’ARN. Le test classique de sérologie consiste en une recherche des anticorps qui marqueraient le passage du virus.


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