Menace de nouveaux variants, manque de vaccins, perte de revenus et prix trop élevé des médicaments

L’impact de la COVID-19 sur l’Afrique sous-estimé

15 mai 2021

Une approche stratégique d’urgence s’impose en raison du nombre limité de vaccins et de la menace croissante de nouvelles variantes. Selon le dernier rapport de Partnership for Evidence-Based Response to COVID-19, le fort taux de positivité aux tests de dépistage souligne une épidémie bien plus étendue que ne le laissent entendre les statistiques officielles validées par l’OMS. Si elles sont acceptées majoritairement par les populations interrogées, les mesures de restrictions sont la cause de mise au chômage, donc de perte de revenu et par conséquent d’accès aux soins. Devant une telle situation, des mesures d’urgence sont proposées.

Source : OMS Afrique.

Alors que la planète lutte contre de nouvelles variantes de la COVID-19 et que le stock et le déploiement des vaccins sont extrêmement limités en Afrique, les récentes données figurant dans le rapport de Partnership for Evidence-Based Response to COVID-19 (PERC) — Partenariat pour une réponse à la COVID-19 fondée sur des données probantes - indiquent que les défis majeurs que doivent relever les populations des Etats Membres de l’Union Africaine sont on ne peut plus préoccupants : 81% des personnes interrogées ont déclaré avoir des difficultés à se procurer de la nourriture, 77% ont déclaré avoir subi une perte de revenus et 42% ont déclaré avoir manqué de soins médicaux. Le rapport préconise des mesures de santé publique axées sur les populations à haut risque, une vigilance plus accrue au regard des nouvelles variantes et un renforcement des stocks de vaccins par la communauté internationale à l’effet de circonscrire la pandémie en Afrique.

En raison de la recrudescence du nombre de cas dans le monde, de l’apparition de nouvelles variantes et de la lenteur dans le déploiement de vaccins, il est impératif que les États Membres de l’Union Africaine adoptent des stratégies fondées sur des données probantes pour une meilleure prise en charge de la COVID-19, a déclaré le Dr John Nkengasong, Directeur des Centres Africains de Contrôle et de Prévention des Maladies. Le rapport du PERC donne aux pays un aperçu des indications à suivre pour leur permettre de réorienter de manière pertinente les mesures en vigueur.

Plus de 10 % des tests positifs

Les insuffisances liées à la capacité de dépistage et de surveillance, de même que l’inégale demande de dépistage, masquent probablement la gravité réelle de la COVID-19 sur le continent africain, alimentant ainsi le dangereux mythe selon lequel une grande partie de l’Afrique n’a pas été touchée par la COVID-19. Les taux de positivité des tests étaient supérieurs à 10 % dans de nombreux États membres au cours de la deuxième vague de la COVID-19, ce qui est nettement supérieur au niveau d’alerte maximal de 5 % suggéré par l’Organisation Mondiale de la Santé confirmant de ce fait que de nombreux cas n’ont pas été détectés.

Le taux d’acceptation du vaccin était élevé chez les personnes interrogées — 67% des personnes ont déclaré qu’elles se feraient vacciner lorsqu’il serait disponible — avec toutefois quelques réserves considérables. L’acceptation varie largement d’un pays à un autre, de 91% au Maroc à 35% en Tunisie et au Cameroun. Au moment de l’enquête, la plupart des personnes interrogées n’avaient pas encore accès aux vaccins ou ne disposaient pas de beaucoup d’informations sur les vaccins spécifiques mis en place dans la région. En fait, le manque d’information était la principale raison chez les personnes qui hésitaient à se faire vacciner.

Campagne d’explication pour les vaccins

Les réticences face aux vaccins sont dues à des proportions alarmantes en termes de désinformation, d’informations erronées et de manque d’informations, qui sapent la confiance quant à la sécurité et à l’efficacité des vaccins, a déclaré le Dr Richard Mihigo, Coordonnateur du Programme, Vaccination et Développement des Vaccins, Bureau Régional de l’OMS pour l’Afrique. Il nous faudra dans les jours à venir, privilégier des campagnes continues et ciblées qui s’attaquent à la montée de l’infodémie autour des vaccins tout en diffusant des informations fondées sur des données probantes afin de dissiper les mythes et de renforcer la confiance dans les vaccins. La communication et l’engagement sont essentiels pour instaurer la confiance et tenir un discours en faveur des vaccins dès le départ.

9 personnes sur 10 portent un masque

Environ neuf personnes interrogées sur dix ont déclaré porter un masque, une fois en présence ou à proximité d’autres personnes en février 2021, soit un résultat presqu’identique à celui obtenu six mois auparavant. Cependant, dans certains pays les plus peuplés et les plus touchés, comme l’Afrique du Sud et l’Éthiopie, le port de masques déclaré par les personnes interrogées a eu tendance à diminuer en février, ce qui implique la nécessité de redoubler d’efforts afin de promouvoir cette intervention peu coûteuse et efficace dans certaines régions. Dans l’ensemble, le respect autodéclaré des mesures de restriction lors de rassemblements sociaux et de déplacements, a sensiblement diminué entre août 2020 et février 2021.

Compte tenu du retard accusé dans le déploiement des vaccins et de la menace que représentent les nouvelles variantes, tous les États Membres de l’Union l’Africaine devront renforcer les stratégies de dépistage efficaces permettant de détecter les premiers signes de recrudescence potentielle et de maintenir le recours à des normes stratégiques de santé publique afin de prévenir les nouvelles variantes tout en assurant la protection sociale. Les chercheurs concluent qu’une communication cohérente et efficace de la part des dirigeants et des responsables de la santé publique est déterminante pour instaurer la confiance et encourager les populations à suivre toute nouvelle mesure. Les personnes interrogées qui se sont montrées très satisfaites de leur gouvernement, des dirigeants de leur communauté ou du ministère de la santé étaient plus susceptibles de déclarer qu’elles adhéraient aux mesures de santé publique que celles qui se sont montrées insatisfaites.

Principales conclusions

Les principales conclusions qui se dégagent du rapport sont les suivants :

- Trois facteurs principaux ont favorisé l’adhésion des personnes aux mesures de santé publiques (MSP) : la conviction que ces mesures sont nécessaires, la perception du risque personnel et la satisfaction à l’égard de la gestion de la COVID-19 par le gouvernement.
- Un peu plus de la moitié (53%) des personnes interrogées sont favorables aux mesures de restriction des rencontres sociales, telles que la limitation de la fréquentation des lieux de culte, des rassemblements publics et des lieux de divertissement, contre 65% en août ; 54% soutiennent les mesures de restriction des déplacements (ordre de rester à la maison, réduction des déplacements au marché ou au magasin), contre 64% en août.
- La peur de contracter la COVID-19 est toujours la raison la plus fréquente de l’absence de soins au cours des six derniers mois (26%). 51% des personnes interrogées pensaient que les agents de santé devaient être évités car ils pouvaient transmettre la COVID-19.
- L’accessibilité financière des soins était un autre obstacle à l’absence de soins (20%), probablement lié à des charges secondaires telles que la perte de revenus.
- La perte de revenus et l’insécurité alimentaire se sont aggravées depuis le début de la pandémie. L’insécurité alimentaire est une préoccupation majeure : 81% des personnes interrogées ont signalé des problèmes d’accès à la nourriture et 48% ont déclaré avoir dû réduire le nombre ou la taille de leurs repas au cours de la semaine écoulée.
- Les ménages des populations à faible revenu sont les plus touchés et les moins atteints par les programmes de protection sociale (lorsque de tels programmes existent).

Il est recommandé aux gouvernements et à la communauté internationale d’investir dans les domaines suivants :

- Renforcer la capacité de détection, de test, de séquences et de traçabilité des cas et des nouveaux variants de COVID-19 ;
- Accorder la priorité aux mesures de santé publiques individuelles et ciblées dans les zones à haut risque afin de maximiser l’adhésion à long terme et de minimiser les effets secondaires ;
- Adopter une approche fondée sur des données probantes pour identifier et soulager les populations à haut risque ;
- Protéger les agents de santé au travers d’équipements de protection individuelle adéquats, d’une rémunération équitable, de congés maladie payés et d’un accès aux soins de santé mentale ;
- Privilégier la vaccination des agents de santé et communiquer stratégiquement avec le public afin de réduire la stigmatisation dont ils font l’objet et de renforcer l’idée que la recherche de soins de santé est sans danger ;
- Maintenir et renforcer les campagnes d’information sur la vaccination afin de rétablir la confiance, et encourager les efforts régionaux visant à combattre la désinformation et à instaurer la confiance, en prévision du moment où les vaccins seront plus accessibles ; et
- L’intensification de l’action de la communauté internationale visant à accroître la production de vaccins, à garantir une répartition équitable et à favoriser le transfert des compétences technologiques afin de faciliter la fabrication locale de vaccins par les États membres.

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