Le Sida chez les homos : un défi à relever

28 juillet 2007

Si la transmission du Sida est devenue majoritairement hétérosexuelle, cela masque la gravité d’un phénomène en recrudescence. L’épidémie chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes est inquiétante. L’Association Réunionnaise pour la Prévention du Sida (ARPS) tire la sonnette d’alarme, dans sa lettre d’information du 2ème trimestre 2007.

On sait que le Sida concerne tout le monde, qu’il ne suffit plus d’être toxico ou homo pour contracter la maladie. Pourtant, malgré les nombreuses campagnes de prévention, la France enregistre 6.000 à 7.000 nouveaux cas chaque année. Et l’ARPS de noter que « parmi celles ayant découvert leur séropositivité en 2005, 51% ont été contaminées lors de rapports hétérosexuels, 27% lors de rapports homosexuels et 2% par l’usage de drogue injectable. Pour les 20% restants, le mode de contamination n’a pas été précisé lors de la déclaration à l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) ».
Alors qu’elle ne représente que 1,5% des Français, la population gay paye un lourd tribut. Des études menées en France estiment que 12 à 14% des homos-bisexuels seraient séropositifs, soit 1 sur 8. La situation à La Réunion suivrait la même tendance. L’ARPS tente dans sa lettre d’information de donner quelques explications sur cette montée en flèche du nombre de cas d’infection au Sida chez les homos.

Comment l’expliquer ?

Les études sont formelles. Les risques sont multipliés par 100 à 200 fois pour un jeune homo de contracter le VIH/Sida qu’un jeune hétéro. De récentes études notent en parallèle que la vigilance face au Sida et le port du préservatif diminuent. Et même si aucune enquête ne peut réellement spécifier la situation à La Réunion, on peut se demander légitimement si l’usage systématique du préservatif n’est pas en train de régresser. En fait, les spécialistes établissent plusieurs raisons à la baisse de la vigilance. Du fait que le pronostic de l’infection au Sida s’améliore, et que les séropositifs ne sont plus condamnés à une mort certaine. « C’est désormais une maladie chronique qui a perdu de sa visibilité au sein de la communauté homosexuelle. Les jeunes gays n’ont pas connu l’hécatombe du milieu des années 1990. Ils ont du mal à se mobiliser face à un danger devenu abstrait. Pour ceux qui ont connu les premières années de l’épidémie, la lassitude s’installe et les comportements de prévention s’émoussent », lit-on. Et puis, certains se disent que la maladie concerne tout le monde, et qu’il n’y a pas de raison de s’en faire davantage. On recommande aussi de prendre en compte certains déterminants psychologiques et affectifs, qui favorisent les prises de risques. « Le sentiment de culpabilité, le manque d’estime de soi, l’homophobie intériorisée, la dépression sont des facteurs indéniables de prise de risque », lit-on encore. Les risques augmentent par ailleurs, sous l’influence de substances psycho-actives ou de consommation excessive d’alcool. Un antécédent d’abus sexuel peut aussi expliquer la prise de risque. Rappelons aussi que certains se revendiquent “barebakers”*, et décrient le port du préservatif. Attention ! la politique de l’Autruche n’efface pas les contraintes de la maladie.

Que faire ?

C’est simple. Déjà, oser porter, et fièrement, la capote. C’est le seul obstacle au Sida. L’ARPS recommande toutefois une communication sérieuse sur le sujet, non seulement dans les lieux de convivialité homosexuelles ou dans la presse gay. L’Internet a été investi comme média incontournable. Mais suffit-il de scander à qui voudra « pas de pénétration sans capote » pour que cela marche réellement ? Il suffit de constater la progression de la contamination au Sida. L’ARPS souhaite une information préventive, simple et pratique, « au plus près des identités, des pratiques sexuelles et des difficultés à gérer le risque », relayé par des associations proches des usagers. Sûrement faudra-t-il disposer d’espaces spécifiques. La prévention passe aussi par l’écoute, affirme l’association de prévention. Elle tire l’attention des décideurs sur l’importance de la mise en place d’équipes pluridisciplinaires comportant des sidologues, des psychologues et des sexologues, pour aider les séropositifs. Mais avant tout, pour faire de la prévention du VIH/Sida dans la communauté homosexuelle, il importe de lutter contre l’homophobie dans notre société, et notamment à La Réunion. L’ARPS joue un rôle prépondérant dans cette bataille. Cette association qui va à la rencontre des gays réunionnais informe et dispense des conseils pratiques. Ceux qui veulent proposer leur bénévolat sont attendus les bras ouverts. Tout le monde peut apporter son aide pour faire reculer le Sida, à La Réunion, et partout dans le monde.

Willy Técher

*Les barebackers constituent une minorité d’hommes séropositifs ou séronégatifs adoptant volontairement consciemment et fièrement des comportements à risque.


Association Réunionnaise pour la Prévention du Sida
11 bis rue Saint-Jacques 97400 Saint-Denis
Tél : 0262.21.88.77
Fax : 0262.94.12.60
Consulter arps-info.com
Email : [email protected]


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