Des parlementaires dans l’île

Mission chikungunya

6 juin 2006

Aujourd’hui, débarque à La Réunion une Mission parlementaire dénommée “chikungunya”. Il faut rappeler que celle-ci a été créée, suite à une demande expresse - déposée le 16 janvier de cette année - d’Huguette Bello, député de La Réunion, qui réclamait une Commission d’Enquête chargée d’éclairer les parlementaires sur les différentes causes de l’épidémie, sur les méthodes de dénombrement de cas (qui en sous-estimèrent le nombre au début de l’épidémie), sur la coordination des divers moyens de lutte, et sur la mise en place d’uns stratégie de sensibilisation de la population.
Répondant à l’initiative d’Huguette Bello, le Président de l’Assemblée Nationale, Jean-Louis Debré a préféré une structure moins lourde qu’une Commission d’Enquête, en instituant une Mission Parlementaire dont les membres sont issus de tous les groupes parlementaires du Parlement. Toutefois, il ne faudrait pas que ces participants oublient les objectifs qui étaient ceux de la Commission.

Pourquoi ne pas rencontrer la Région et l’Association des Maires ?

Effectivement, on peut s’interroger sur les objectifs que veut assigner, à cette mission, son Président-Rapporteur, Bertho Audifax, en oubliant, sur le “programme des auditions dans l’Océan Indien” distribué début juin, de rencontrer les représentants du Conseil Régional et l’Association des Maires de l’île. On se demande les raisons qui poussent Mr Audifax à privilégier 3 maires (Saint-Louis, Trois-Bassins et Le Port). L’épidémie du chikungunya n’épargnant aucune municipalité, n’aurait-il pas été préférable de rencontrer l’association qui les représente toutes ?

Outre son Président-Rapporteur, cette mission est composée d’Huguette Bello, René-Paul Victoria, Denis Jacquat, Gabrielle Louis-Carabin, Mansour Kamardine et de Christine Juberthe.
En métropole, elle a déjà rencontré plusieurs scientifiques et chercheurs. Et sa venue à La Réunion et à Mayotte doit offrir à ses membres la possibilité d’auditionner, pendant 3 jours, tous les acteurs de la lutte contre le chikungunya.

Un programme chargé, mais pas représentatif
des divers acteurs de la lutte contre le chikungunya

Dès leur arrivée, ils rencontreront les chefs des pôles des services de l’État ainsi que les sous-préfets qui se sont engagés dans cette lutte, et le Docteur Vincent Pierre de la CIRE présentera un bilan épidémiologique. Puis, ils verront le personnel de la DRASS.
Ensuite, ils examineront les répercussions économiques avec la SGAR, l’IEDOM, l’ADIR, le MEDEF, le Président de la CCIR, et celui de la Chambre des Métiers.
Le volet social sera abordé avec les organisations syndicales, ainsi qu’avec la Présidente du Conseil Général qui doit présenter le plan d’action de la collectivité.
Le deuxième jour sera consacré à étudier le volet santé et recherche, au GHSR de Saint-Pierre, en auditionnant le Docteur Christian Lassalle, médecin général de la Santé Publique, des médecins hospitaliers, et différents responsables des services sanitaires publics et privés.
Puis, les membres s’entretiendront avec 3 maires de l’île.
Dans l’après-midi, 3 associations (pourquoi que 3 ?) viendront dresser un bilan de leurs actions. Et pour finir, un “débriefing” aura lieu avec le Préfet.
Le jeudi, avant de s’envoler vers Mayotte, les parlementaires rencontreront le délégué de la DDRT, de l’INSERM, et les représentant de l’Université de La Réunion à la Technopole.
Dans nos prochaines éditions, nous présenterons le calendrier de la mission à Mayotte, ainsi que le compte-rendu des auditions. La député Huguette Bello sera, pour ainsi dire notre envoyée spéciale, car elle nous livrera chaque jour ses “impressions d’auditions”.


Des chiffres inquiétants

L’annonce d’une nouvelle catastrophe
si rien de plus n’est fait

Le nombre de 1.200 personnes supplémentaires contaminées par le virus du chikungunya la semaine dernière (entre le 22 et le 28 mai) est à rapprocher de certains chiffres de l’an passé : durant 17 semaines, avant le 4 décembre dernier, 83 cas nouveaux de malades du malades étaient recensés officiellement en moyenne par semaine.
Par ailleurs, depuis le 22 février 2005, date du début de l’épidémie, jusqu’au 11 septembre, 3.120 personnes avaient été atteintes par la maladie, toujours selon les chiffres officiels.
Ces “réservoirs” de virus furent hélas suffisants pour que cinq mois plus tard (semaine du 30 janvier au 5 février), on atteigne jusqu’à 47.000 nouveaux malades en une seule semaine. Une catastrophe sanitaire, avec toutes les autres conséquences que l’on sait. 262.000 personnes ont contracté la maladie, selon les chiffres fournis par la Préfecture.
Les derniers chiffres annoncent donc une nouvelle catastrophe, qui risque d’être encore plus grande si l’on se situe dans une simple logique mathématique, et surtout si l’on ne met pas en œuvre de nouveaux moyens de lutte contre les moustiques. Parmi ces nouveaux moyens, il y a l’épandage de masse par toute la population réunionnaise du bio-pesticide appelé Bti, pour tuer les larves de l’aedes albopictus.


Un numéro spécial de “Sciences et Vie”

"Moustiques : La grande menace"

À la “une” du numéro de la revue “Sciences et Vie” qui vient de paraître, on trouve une gigantesque photo de moustique. Cette photo illustre le sujet du dossier principal traité par ce numéro : "la grande menace" que représentent les moustiques pour l’humanité au cours du siècle qui vient de commencer.
"Paludisme, chikungunya, dengue... Responsables de millions de morts, ces maladies, et d’autres, ont un point commun, écrit “Sciences et vie” : elles se transmettent via les moustiques. Or ceux-ci n’en finissent plus de coloniser de nouveaux territoires aux quatre coins du monde, tout en devenant résistants aux insecticides. Un véritable fléau pour l’avenir, qui met aujourd’hui les scientifiques au défi de trouver des parades".
Un défi qui concerne également les autorités de l’État, responsables d’un problème majeur de santé publique, ainsi que les élus et toute la population en général.


Rats et moustiques

Une contradiction difficile à comprendre

La prolifération des rats à La Réunion au cours des derniers mois a provoqué une forte augmentation du nombre de malades de la leptospirose. Au point d’atteindre le chiffre de 5 décès en cinq mois.
Devant ce problème de santé publique, les autorités ont décidé de réagir. Elles ont lancé une vaste campagne de distribution de raticides à la population. Espérons que cette mobilisation de masse va réussir et qu’elle va permettre d’éliminer la leptospirose de La Réunion. Espérons aussi n’aura pas de conséquence négative sur l’environnement et sur les Réunionnais car il faut savoir que ces kits de raticide contiennent un poison mortel.
Mais alors on ne comprend pas pourquoi les mêmes autorités ne permettent pas à la même population de se mobiliser également en masse avec le Bti contre les larves de moustiques, qui ont déjà tué 228 Réunionnais depuis le début de l’épidémie. Soit 45 fois plus que les rats.
Rappelons que le Bti, lui, n’est pas dangereux pour l’environnement ni pour les humains. Il ne tue que les larves des moustiques vecteurs du virus du chikungunya. Il y a là une contradiction difficile à admettre.


Grippe aviaire et chikungunya

Deux poids et deux mesures

Il y a quelques mois, une menace d’épidémie de grippe aviaire est apparue en métropole. Des cadavres d’oiseaux porteurs du virus de cette grippe ont été découverts dans la région de Bourg-en-Bresse, un des hauts-lieux de la volaille en France.
Fort heureusement, aucune personne n’a été touchée par ce virus. Néanmoins - et avec juste raison -, les autorités de l’État ont pris très vite des mesures adaptées à la gravité de la menace. Avant que le virus atteigne une personne, elles ont fait de la lutte contre le danger de la grippe aviaire une cause nationale. Dans ce cadre, trois départements furent bloqués et toute la population fut mobilisée pour prévenir cette catastrophe sanitaire. Une mobilisation de masse qui a semble-t-il porté des fruits, puisqu’on entend moins parler de la grippe aviaire en France actuellement.
Question : pourquoi la même orientation politique n’est-elle pas prise et mise en œuvre à La Réunion avec le Bti dans la lutte anti-larvaire du moustique, où le chikungunya a déjà provoqué 228 décès directs et indirects ? N’y a-t-il pas là deux poids et deux mesures ?


Il faut d’urgence un véritable service de prophylaxie

Malgré tous les discours de responsabilisation de l’État, un service de prophylaxie digne de la période d’éradication du paludisme n’est toujours pas pérennisé. En 2002, plus de 70 agents de la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales (Drass) avaient été affectés à la démoustication. En fin de carrière pour beaucoup, ils n’ont pas été remplacés. Fin 2005, en plein boom du chikungunya, ils n’étaient plus que 40.

ChikungunyaHuguette Bello

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