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par le Dr Raymond Vergès

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Ni sauvetage, ni réforme mais injustice sociale

Le projet de loi de la réforme adopté

mercredi 21 juillet 2004


À l’issue de trois semaines de débats, les députés ont achevé dans la nuit de lundi à mardi l’examen en première lecture du projet de loi réformant l’assurance maladie, présenté par Philippe Douste-Blazy, ministre de la Santé, et Xavier Bertrand, secrétaire d’État à l’assurance maladie.


L’issue du vote des députés sur le projet de loi gouvernemental sur l’assurance maladie ne faisait aucun doute hier : la réforme est “passée” à l’Assemblée nationale, avec le seul vote UMP. Les groupes PS et PCF ont voté contre, une partie de l’UDF a voté contre, une autre partie s’est abstenue (voir en encadré les résultats) .
Le Sénat devrait examiner ce texte à partir de la fin de la semaine, le gouvernement souhaitant le voir adopter définitivement au début du mois d’août. Les premières mesures seront applicables dès 2005.
Ce plan avait été présenté comme une “grande réforme”, comme un “plan de sauvetage”. Au final, il en reste que les dispositions votées par la droite UMP auront des conséquences dramatiques sur le quotidien des patients, et surtout des plus défavorisés. Sans compter qu’il remet en cause certaines libertés. Par exemple, la création du dossier médical personnel (DMP) est le début d’une remise en cause du secret médical. La désignation d’un "médecin traitant" qui sera le seul à pouvoir adresser ses patients à un spécialiste n’est pas, loin s’en faut, pertinent.

L’assuré va payer

Et surtout, l’instauration d’une contribution forfaitaire d’un euro à la charge de l’assuré pour tout acte médical est la porte ouverte à tous les dérapages. Un euro aujourd’hui, mais combien demain ? Un euro pour quelqu’un qui gagne plus que le SMIC n’est pas très sensible. Mais pour une famille qui perçoit le RMI, cet euro a beaucoup plus de poids.
Quant à l’apposition d’une photographie sur la carte Vitale d’ici 2006, la mesure - initialement destinée à limiter les fraudes - coûtera très très cher.
Rappelons également que ce texte renforce le rôle du Parlement en matière de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale (ce qui en soit n’est pas forcément une mauvaise chose, si ce contrôle respecte les principes fondamentaux d’égalité aux soins).
Le projet de loi évoque aussi la réforme de la "gouvernance" de l’assurance maladie. Et là les modifications apportées sont substantielles : par exemple, l’instauration d’un comité d’orientation de l’assurance maladie aura - entre autres - pour mission de pouvoir dérembourser totalement ou partiellement certains médicaments.
La création d’un Institut des données de santé (INSEE de la santé) peut être intéressante. Mais cela permettra-t-il d’éviter des dysfonctionnements ? Des choix arbitraires ? Permettra-t-il d’anticiper sur l’extension de certaines maladies, ou les postes médicaux ou para-médicaux dont les générations actuelles - et surtout futures - auront besoin ?
Ce texte, que Philippe Douste-Blazy a présenté comme étant un élément de "responsabilisation" des patients, n’est en fait qu’une vaste mesure d’injustice sociale et de culpabilisation des assurés.

Objectif 2007

Qui plus est, il ne réglera en rien les difficultés à venir de la Sécu. La note “confidentielle” de Bercy et les analyses de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) ou de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) qui estiment, en substance, que les mesures prises aujourd’hui n’auront qu’un faible impact et que dans quelques années (2007), on reparlera du “trou” de la Sécu.
Car ni l’élargissement de l’assiette de la contribution sociale généralisée (CSG), ni celle de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), n’auront de conséquence à moyen terme, mais cela pénalisera les ménages.
Quant à la “contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité des sociétés”, elle a été, elle, relevée nettement moins fortement... Le gouvernement soigne le MEDEF...!

D. B.


Aveu

Le projet de loi réformant l’assurance maladie - dans son article 45, que seul l’UMP a voté - prévoit de transférer à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) la charge de financement de la dette de la branche maladie du régime général. Il envisage la prise en charge des déficits des exercices 2005 et 2006, dans la limite de 15 milliards d’euros, et prévoit d’allonger la durée de vie de la CADES jusqu’à l’achèvement du remboursement de la dette sociale.
Cet article est hallucinant : si le plan Douste-Blazy avait réellement été un plan de sauvetage, il n’y aurait pas eu besoin de recourir à ce stratagème, puisque la dette se serait effacée “d’elle même”. Mais en confiant à la CADES "la charge de financement de la dette de la branche maladie du régime général", c’est bien que le plan de sauvetage n’en est pas un. Et surtout pas à long terme.
Ce qui donne raison tant à la CNAM qu’à l’OFCE sur la pertinence des mesures contenues dans cette réforme. "La réforme de la dernière chance", pour reprendre l’expression du président de la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, Jean-Michel Dubernard.
Une “réforme” qui n’est qu’un plan “bidon”, une “illusion” et une attaque intolérable contre les acquis sociaux et la santé des plus démunis.

D. B.


Projet adopté par 358 voix contre 195 et 15 abstentions...

Avec 553 suffrages exprimés sur 568 votants, l’Assemblée a voté solennellement hier le projet de réforme de l’assurance maladie : 358 voix contre 195 et 15 abstentions, après 16 jours (142 heures) de débat. À l’UMP, sur 363 membres, 358 ont voté pour, au PS 149 voix se sont exprimées contre, les députés du groupe communiste républicain ont tous voté contre. À l’UDF, 16 députés ont voté contre, 14 se sont abstenus (la quinzième abstention est celle d’un député UMP).
Pour La Réunion, Huguette Bello et Christophe Payet ont bien évidemment voté contre. Bertho Audifax, André Thien Ah Koon et René-Paul Victoria, eux, ont voté pour.


Huguette Bello : "Une réforme injuste et inefficace"

Hier, un communiqué du secrétariat parlementaire a été envoyé à la presse : à l’Assemblée nationale, Huguette Bello a voté contre le projet de réforme de l’assurance maladie, "qui ouvre la voie à une médecine à deux vitesses". Cette réforme aura "des conséquences négatives sur la qualité des soins et sur l’égalité dans l’accès aux soins", affirme la députée dans le communiqué publié ci-après.

"Après plus de trois semaines de débat, l’Assemblée nationale a adopté [hier] la réforme de l’assurance maladie.
Huguette Bello, qui était intervenue à la tribune de l’Assemblée lors de la discussion générale, a voté contre ce texte qui ouvre la voie à une médecine à deux vitesses.
La députée du PCR a ainsi confirmé son opposition à une réforme qui fait peser l’essentiel des efforts sur les assurés.
En plus d’une nouvelle augmentation du forfait hospitalier - passant de 13 à 16 euros - et de l’instauration d’une franchise pour chaque acte médical qui sera fixé - dans un premier temps - à 1 euro, le plan gouvernemental prévoit plusieurs menaces de pénalité financière à l’encontre des assurés.
C’est ainsi que, selon ce texte, chaque assuré devra désormais désigner et consulter un médecin-traitant sous peine de risquer une diminution du remboursement des soins.
De même, chaque assuré sera doté d’un dossier médical personnel informatisé qui centralisera l’ensemble des informations médicales le concernant. Là encore, le remboursement des soins sera subordonné à l’autorisation d’accès à ce dossier.
Par ailleurs, cette réforme, qui fait l’impasse sur la prévention, reporte sur les générations futures une partie de la charge du déficit de l’assurance maladie.
Il s’agit donc d’une réforme injuste et inefficace : si l’objectif de réduire le déficit de l’assurance maladie est plus qu’incertain, il ne fait par contre aucun doute que cette réforme aura des conséquences négatives sur la qualité des soins et sur l’égalité dans l’accès aux soins".


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