Nos quatre rizeries face à toute la Thaïlande...

15 février 2006

Le riz entre pour une part que l’on devine importante dans l’alimentation des Réunionnais. En moyenne, nous en consommons 65 kilos par habitant par an, soit 15 fois plus que chaque Européen. Comme on dit familièrement, il n’y a pas photo : le riz n’est pas un produit marginal à La Réunion...
C’est pourquoi, au fil du temps, le tissu économique de notre île a été amené à s’adapter à cette réalité sociale. Quatre rizeries s’y sont implantées, trois au Port (Compagnie des Grains du Capricorne, Soboriz, UCR) et une à Saint-Pierre (Soderiz). Ces unités industrielles emploient directement près de 150 personnes et font travailler parallèlement une centaine d’autres. Elles ont modernisé progressivement leurs outils de production.
On estime que sur les deux dernières années, plus de 5 millions d’euros d’investissement ont été réalisés pour garantir la qualité du riz usiné, c’est à dire un peu plus de 50.000 tonnes sur les 60.000 que consomment annuellement les ménages réunionnais. On l’a compris, les quatre usines réceptionnent du riz cargo (brut), le traitent pour parvenir à un niveau de blanchiment qui réponde aux exigences des normes imposées par la Communauté européenne et l’ensachent avant la commercialisation.
Jusqu’à l’année dernière, Bruxelles, par le biais du FEOGA, allouait une subvention de 10 millions d’Euros pour que le prix de cette activité créatrice d’emplois et de valeur ajoutée ne pénalise pas le consommateur réunionnais face au riz traité importé de Thaïlande. Là-bas, compte tenu du coût de la main d’œuvre et des quantités énormes de produit brut usiné, le prix de vente est évidemment extrêmement bas. Déjà, notre île en importe 10.000 tonnes et seul le soutien de l’Europe, au titre de l’éloignement et de l’insularité des départements d’Outre-mer dont les marchés se résument à leurs populations réduites, peut nous aider à nous en sortir.
Or, depuis le début de l’année, ces subventions FEOGA n’existent plus de manière directe pour l’industrie des rizeries réunionnaises.
Dominique Bussereau, le ministre français de l’Agriculture et de la Pêche, assure avoir "conscience qu’il est nécessaire de maintenir un écart significatif entre le riz décortiqué et le riz blanchi afin de maintenir la protection de l’industrie réunionnaise".
Jusqu’à présent, il n’y avait pas lieu de prévoir un dispositif de protection sur le riz. D’où l’absence totale d’Octroi de mer sur le riz blanchi arrivant directement de Thaïlande. Aujourd’hui, la donne est autre. Sans l’aide du FEOGA qui a été redistribuée d’une autre façon sur une masse plus large de producteurs, notamment céréaliers, le riz usiné localement est menacé. D’où "la possibilité d’examiner l’éventualité de l’utilisation, dans le respect du dispositif communautaire, de l’Octroi de mer" que suggère le gouvernement français aux fins "d’éviter la déstabilisation du secteur de la transformation du riz à La Réunion".
La prudence du discours gouvernemental ("la possibilité"... "l’éventualité"... "dans le respect du dispositif communautaire"...) laisse à penser que la solution n’est pas évidente. En tout cas pour ses effets dans l’immédiat.
L’A.D.I.R. et l’Association des Riziers de La Réunion (A.R.R.) s’inquiètent à juste titre de la situation. Sachant toutefois que cette situation (nouvelle) ne laisse personne indifférent. Face à toute la Thaïlande, la partie forcément est inégale.

R. Lauret 


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