Risque sanitaire passé sous silence par les partisans du projet

NRL et importation de roches : et si par ce biais la peste venait à La Réunion ?

20 mai 2015

Il n’est pas dans nos intentions de jeter l’opprobre sur Madagascar, mais simplement de signaler les risques que nous font prendre les inconséquents qui préparent l’importation de centaines de milliers voir des millions de tonnes de roches de Madagascar. Ce risque a été évoqué dans le séminaire de Saint-Pierre du PCR, il y a quelques semaines. Quelques recherches font apparaître que ces risques sont hélas très réels, n’en déplaise aux apprentis sorciers de tous acabits et aux nouveaux chercheurs de fortune. Le lecteur trouvera ci-dessous des extraits d’une interview du directeur de l’institut Pasteur de Madagascar parue dans l’Express de Madagascar qui signale notamment la résurgence de la peste dans ce pays.

Le directeur de l’Institut Pasteur de Madagascar (IPM) fait le point sur la situation de la peste à Madagascar, et sur les missions de l’IPM dans la promotion de la santé publique à Madagascar. Le professeur Christophe Rogier déclare : ”la surveillance des rats et des puces suspendues depuis 2006"

Madagascar dispose d’un vrai institut pasteur. Celui-ci a été créé en 1898 et est régi par une convention qui lie depuis 1961 l’Institut Pasteur à Paris et le Gouver­nement de Mada­gascar. Cette convention fait de l’IPM un établissement scientifique malgache, sans but lucratif, reconnu d’utilité publique et placé sous le haut patronage du Gouver­nement. Sa direction scientifique et administrative répond aux exigences de l’Institut Pasteur à Paris.
La mission de l’IPM de Madagascar est de mener les travaux les plus profitables à la protection de la santé publique, et au développement économique de Madagascar. À ce titre, il effectue les études et les recherches demandées par le Ministère de la santé (…), et fournit gratuitement les sérums et vaccins nécessaires au traitement de la rage pour toute la population de Madagascar, cela depuis plus de 110 ans sans aucune interruption. Dans les temps anciens, la fourniture gratuite de vaccins par l’IPM a permis à Madagascar d’être le premier pays au monde à éliminer la variole (…).
Un personnel bien formé. L’IPM est bien un Institut malgache au service de Mada­gascar. L’institut dispose d’un personnel bien formé et particulièrement dévoué : plus de 350 employés malgaches de l’IPM dont une vingtaine de cadres supérieurs, un peu moins de 20 membres du personnel du ministère de la Santé publique, et une douzaine d’expatriés français, belge, italien et britannique.

(…) L’IPM est Centre collaborateur OMS pour la peste, laboratoire national de référence OMS pour la grippe, la poliomyélite et la rougeole, Centre ou laboratoire national de référence pour le ministère de la Santé ou le ministère de l’Elevage pour la rage, les virus transmis par des insectes (arbovirus), pour les bactéries qui provoquent le choléra, la typhoïde ou la dysenterie, pour la tuberculose, pour l’analyse des eaux dans les industries agro-alimentaires et le contrôle des denrées animales, et pour de nombreuses autres maladies touchant le bétail… L’IPM accueille aussi des laboratoires du Ministère de la Santé comme le Laboratoire central de la bilharziose. Dans ces laboratoires très spécialisés, les techniciens et les biologistes effectuent les diagnostics et les recherches qui permettent à Madagascar de lutter au mieux ou de prévenir les maladies provoquées par des microbes souvent dangereux

La surveillance épidémiologique qui repose sur les travaux de laboratoire(…) implique aussi un vaste réseau de sites sentinelles, trente-quatre centres de santé de base, dix-sept hôpitaux et près de quatre-vingts agents de santé communautaire qui, tous les jours ou une fois par semaine, dans l’ensemble du pays, envoient par SMS ou par internet des informations sur la santé des populations, sur les fièvres…

Ce système sentinelle et les examens de laboratoire ainsi que les connexions étroites avec les responsables du ministère de la Santé, au niveau des districts, des régions et au niveau central, permettent de détecter rapidement des épidémies, d’en identifier les causes, et d’orienter les responsables de la lutte vers les méthodes les plus appropriées.

– Qu’est-ce qui est à l’origine de la réémergence à Madagascar de cette maladie qui, à un moment, semble avoir été maîtrisée ?

(…). L’utilisation de traitements antibiotiques et le renforcement des mesures de santé publique ont réduit très fortement la morbidité et la mortalité dues à cette maladie, mais ne peuvent pas permettre de la faire complètement disparaître, car la bactérie de la peste circule chez les rats et des mammifères sauvages qui sont les réservoirs naturels de la peste, et peut persister plusieurs années dans le sol. Comme ces réservoirs et le sol ne peuvent pas être traités, supprimés ou désinfectés, il n’est pas possible d’éradiquer la peste.

La surveillance des vecteurs de la peste a cessé depuis 2006

La stratégie de Madagascar contre la peste est souvent donnée en exemple, mais sa mise en œuvre se heurte à des problèmes d’organisation et de logistique que les crises économiques et sociales que notre pays connait depuis de nombreuses années peuvent aisément expliquer. Ainsi, la surveillance des rats et des puces dans la capitale et dans le pays, qui permettait d’évaluer et de mieux cibler la lutte a été suspendue depuis 2006, faute de moyens. Elle devrait prochainement reprendre grâce à une aide de la Banque Mondiale.

– les principales causes de la réémergence de la peste ?

Le problème récurrent de la gestion des ordures et de l’insalubrité de l’habitat contribue aussi à augmenter le contact entre les rats, leurs puces et les humains… multipliant les occasions de transmission de la peste à l’Homme. Elle se manifeste alors sous sa forme bubonique, avec de la fièvre et des ganglions qui grossissent et sont douloureux. C’est ce qui pourrait expliquer la réémergence de la peste dans des quartiers d’Antananarivo après 7 à 10 ans de silence. L’accès au diagnostic et au traitement est un point critique (…)… Lorsque la peste bubonique n’est pas traitée à temps, elle peut se transformer, en environ une semaine, en peste pulmonaire et être alors transmise directement et beaucoup plus rapidement, d’humain à humain. Dans ce cas, la maladie puis la mort peuvent survenir en deux à trois jours seulement. Les rites funéraires traditionnels qui impliquent un contact avec le corps du défunt sont alors à très haut risque de transmission. C’est pour cette raison que les corps doivent être désinfectés et enterrés à part dans des conditions assurant la sécurité des vivants… mais qui sont parfois mal acceptées par les familles(…).

– la situation de la peste en 2014…

La situation de la peste en 2014 à Madagascar reste sensiblement la même que les années précédentes en termes de nombre de cas et de décès. Les faits marquants ont été la survenue de deux cas dans la capitale, dont un mortel, et une proportion élevée de cas de peste bubonique décédés, le plus souvent à cause d’un recours tardif à des soins appropriés rapidement

– les principales maladies ou pathologies que Madagascar devrait craindre aujourd’hui ?

(…) Il existe une multitude de maladies infectieuses dont beaucoup restent négligées. Je pense en particulier à la bilharziose qui est transmise lorsque l’on entre en contact avec l’eau douce de lacs ou de rivières. Elle provoque des hémorragies dans les selles et les urines et peut finir par tuer. Une campagne de traitement de masse du Ministère de la santé financée par la Banque Mondiale commencera dans les prochaines semaines. L’IPM a contribué à l’analyse de l’étendue du problème. Je pense aussi à la tuberculose qui reste à un niveau très élevé dans notre pays, bien que les infections par le VIH soient trop rares pour en expliquer l’importance : elle est d’abord due à la promiscuité, à l’état nutritionnel et au niveau économique et social d’une grande partie de notre population. Il ne faut pas oublier non plus des maladies non transmissibles comme le diabète et l’hypertension artérielle qui, avec le tabagisme, provoquent des maladies cardiovasculaires comme les AVC (accidents vasculaires cérébraux) ou les infarctus : elles sont la première cause de mortalité à Madagascar, avant les maladies infectieuses… L’IPM a donc commencé des recherches sur ces maladies.

– Obligation de déclarer les cas de peste.

Il existe un petit nombre de maladies dont le potentiel épidémique planétaire oblige les pays à la déclaration. C’est le cas de la peste. L’OMS, cependant, ne rend public que les données que les Ministères de la santé veulent bien déclarer. Il n’y a donc pas d’antagonisme possible entre l’OMS et les autorités sanitaires des pays.

Propos recueillis par Lova Rabary-Rakotondravony

La bactérie de la peste circule chez les rats et des mammifères sauvages qui sont les réservoirs naturels de la peste, et peut persister plusieurs années dans le sol. Comme ces réservoirs et le sol ne peuvent pas être traités, supprimés ou désinfectés, il n’est pas possible d’éradiquer la peste.

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  • L’article explique bien les modes de transmission de la peste : peste bubonique, de la puce de rat contaminée par la bacterie Yersinia pestis à l’homme et la peste pulmonaire, toujours avec le même germe mais de l’homme à l’homme. le risque de l’importation de ces germes dans la terre existe comme ce fut le cas pour les larves du hanneton du ver blanc.
    Mais, le fleau de l’introduction de la bilhiaziose est une réalité. La Réunion en est indemne malgré la découverte de l’hôte intermédiaire (mollusques gasteropode) à Grand Etang, son aire de répartition. Ce mollusque ( Bulinus cernicus) a complétement disparu depuis 1981.
    C’est la deuxième endémie parasitaire mondiale après le paludisme avec 800 000 décès par an. Cette maladie mortelle qui est en extension dans le monde, existe à Madagascar et le risque d’importation de cette hôte intermédiaire avec de la terre presente un réel danger pour les réunionnais, bien plus grave que la peste.


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