Chikungunya, grippe aviaire, Europe, solidarité nationale...

Paul Vergès : ’Comment s’adapter à une situation nouvelle ?’

16 mars 2006

Décryptant les signes de l’actualité, une nouvelle fois le président de la Région, Paul Vergès, invite tous les élus à quitter l’immédiat pour s’impliquer de manière globale en pensant toujours à l’avenir. Un impératif politique d’autant plus crucial que de nouveaux facteurs handicapent La Réunion et que vont bientôt se négocier Schéma d’aménagement régional, contrat de plan État-Région et nouveau DOCUP.

Chikungunya, Route du littoral, pluies diluviennes et c’est non seulement l’économie, mais tout le moral de La Réunion qui s’effondre ou qui du moins est mis quotidiennement à rude épreuve. Si dans les embouteillages, nous ne cessons de nous demander ce que font les élus, nous oublions que ceux d’aujourd’hui ne sont pas ceux qui ont décidé le tracé de la route. Des maisons qui sont emportées par les flots et c’est à nouveau l’élu actuel qui est mis en cause... Pour éviter aux générations futures le même sort, c’est aujourd’hui que doit se construire l’anticipation, dans l’unité. Voilà résumé l’entretien que Paul Vergès a eu avec les journalistes réunionnais hier.

Chikungunya : vivre avec

Paul Vergès estime que le chikungunya s’est établi à La Réunion et bien qu’il espère que les mesures soient efficaces et que le nombre de malades chute, il n’exclue pas que désormais, nous devons vivre avec : "Il existera de manière permanente, on éliminera les plus grands risques, mais nous menons un travail de Sisyphe. D’un stade aigu de l’épidémie, nous sommes passés à un stade chronique de la présence de la maladie à La Réunion". Nul doute que le chikungunya sera au centre des discussions de la COI entre Maurice, les Seychelles, les Comores, Madagascar. Paul Vergès craint même que le virus gagne, avec l’été, la Méditerranée : "Le problème de la diffusion c’est juste une question de délai, il y aura cette dispersion".

Déclarer les volailles

Paul Vergès illustre ce mécanisme de dispersion : "À La Réunion, il y a une vieille habitude d’élever les poulets dans la cour, aussi, le risque est-il plus grand ici si le virus de la grippe aviaire apparaît. En moins de 10 ans, la contamination s’est étendue du Sud-Est asiatique à l’Europe, il gagne l’Afrique. Est-ce qu’on peut penser que La Réunion est un oasis infranchissable ? La menace est plus grande que pour le chikungunya. Tous les petits élevages représentent une menace infiniment grave et le poulet est l’espèce la plus répandue dans le monde entier. Que faire ? Comment modifier nos comportements ?". Revenant au chikungunya, il se demande : "Comment adopter une autre stratégie touristique ? Il faudra faire preuve d’imagination".

Cyclone d’eau

Des querelles existent pour savoir si le nombre des cyclones va augmenter ou pas à cause des changements climatiques, un constat fait cependant l’unanimité : "Avec le réchauffement de la planète, l’évaporation de l’océan est plus dense, et les pluies diluviennes. Nous avons eu autant de dégâts que lors d’un cyclone avec le vent. Ce cyclone d’eau a fait des dégâts considérables. Comment protéger les zones sensibles de La Réunion ? Endiguer les ravines ? Avec quels moyens réaliser cet aménagement considérable ?".

Route du littoral

Si l’État est responsable du programme des routes, il en délègue la maîtrise d’ouvrage à La Région. Dans le cadre de la décentralisation, la Route du littoral passera sous la responsabilité du Conseil régional. Le président de la collectivité souligne la charge émotionnelle qu’est cette route pour tous les Réunionnais et insiste sur les risques énormes qu’elle nous fait courir. Plusieurs solutions sont envisagées pour une solution définitive, mais toutes ont leur avantage et leur inconvénient. Des études demandées par la Région devraient permettre d’opter pour la moins désavantageuse d’ici juin ou juillet mais, prévient-il : "aucune solution n’écarte des inconvénients majeurs". Son commentaire rappellera un manque de clairvoyance et une dissolution des responsabilités car "au-delà du coût d’investissement, combien d’heures perdues chaque jour par plus de 50.000 personnes ?".

Quelle solidarité ?

Paul Vergès évoquera aussi le futur DOCUP et les Accords de partenariat économique à tisser avec notre environnement, mais dans la situation actuelle, comment aller vers un désarmement douanier ? Il précisera que selon lui, le mot d’ordre central de l’Union européenne est en ce moment le problème de la cohésion territoriale et sociale. Dans le même temps, ce qui fait débat en France c’est la cohésion de la société française et sa capacité d’intégration. En ce qui concerne le chikungunya, "la solidarité institutionnelle est venue. Est-elle suffisante ? Est-ce tardif ? Mais elle marque une communauté de destin. Cependant, pourquoi n’a-t-on pas su exprimer l’émotion ? Pourquoi n’y a-t-il pas eu de solidarité spontanée ? Comment une aide ministérielle de 80% passe-t-elle à 60% ? Cela ne donne pas le sentiment d’une solidarité pleine et entière. Comment l’expliquer et le corriger ?". Le président de la Région pose ainsi un problème de fond, rappelant que la demande de départementalisation, elle, fut un geste volontaire, pour les mêmes devoirs et les mêmes droits.

Eiffel

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