Plan anti-pesticides

11 juillet 2006

Au début du mois, “Que Choisir” faisait paraître une enquête alarmiste sur l’usage des pesticides. Bien que cela ne concerne en grande partie que la métropole, on est en droit de se poser des questions - comme le fait Jean Saint-Marc ci-contre - sur les répercussions des divers épandages qui ont été effectués durant la campagne contre le chikungunya et sur la sous-estimation d’une recrudescence de la maladie si on ne prend pas les mesures adéquates.
Les autorités préfectorales ont beau tenté de nous rassurer sur les précautions prises et sur le caractère ’inoffensif’ des moyens mis en œuvre, chacun peut malheureusement constater les dégâts effectués par les pesticides.
Et curieusement, les déclarations préfectorales minimisent les dangers comme le fait le mal nommé L’UIPP (Union des Industries de la Protection des Plantes) qui en fait représente les intérêts des fabricants de pesticides.

Ce que dit “Que Choisir”...
Fort de constats accablants (75.000 tonnes de produits contenant des pesticides vendues en 2004, 9% des Français ont déjà bu de l’eau contenant des pesticides, les effets sur la santé de l’Homme sont prouvés...), le gouvernement lance un plan anti-pesticides sur 3 ans.
Au fil des différents tests et enquêtes menés par “Que Choisir” sur les produits phytosanitaires, le bilan est toujours aussi désespérant : l’usage des pesticides se banalise et les ventes de produits contenant des substances dangereuses ne cessent de progresser. À partir du même constat, les Ministres de l’Agriculture et de l’Écologie ont présenté en Conseil des Ministres un plan "destiné à réduire les risques que l’utilisation des pesticides (phytosanitaires et biocides) peut générer sur la santé, notamment celle des utilisateurs, l’environnement et la biodiversité".

Des mesures de lutte gouvernementales contre les effets néfastes des pesticides
L’objectif avoué de ce plan est de réduire de 50%, d’ici 2009, les quantités vendues de substances actives les plus dangereuses. Pour ce faire, le gouvernement va inscrire son action dans plusieurs directions.
Afin d’éviter les transferts de pesticides vers l’eau, les agriculteurs devront laisser vierge de tout traitement une bande de 5 mètres le long des cours d’eau. Un contrôle obligatoire des matériels d’épandage (pulvérisateurs) sera également instauré.
Les jardiniers amateurs, grands consommateurs de produits phytosanitaires, ne pourront trouver dans les rayons des magasins que des produits portant la mention "emploi autorisé dans les jardins" ; les autres produits seront interdits à la vente.
Autre nouveauté : l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) aura la responsabilité d’évaluer les nouveaux produits sur le marché, le prix des homologations passera de 750 à 20.000 euros à la charge de l’industriel afin d’assurer un plus grand sérieux des examens. Les produits déjà autorisés à la vente en France seront réévalués. L’Agence Française de Sécurité Sanitaire et Environnementale (AFSSET) sera quant à elle chargée de mettre en place un observatoire des résidus de pesticides et le site Internet qui va avec (www.observatoire-pesticides.fr).

80% des eaux de surface et 57% des eaux souterraines contaminées par les pesticides
Quand on sait que la France occupe le troisième rang mondial et le premier européen en ce qui concerne le marché des produits phytosanitaires, que 80% des eaux de surface et 57% des eaux souterraines sont contaminées par les pesticides, ces mesures gouvernementales ne semblent pas suffisantes face à l’usage intensif de pesticides. L’intervention de deux agences (AFSSA et AFSSET), la création d’un observatoire et d’un site Internet ne ressemblent pas au remède de cheval attendu. Quant aux moyens mis à disposition (Qui vérifiera que la bande de 5 mètres de long est bien respectée sur les 400.000 kilomètres concernés ? Qui, et à quel intervalle, procédera au contrôle “périodique” des pulvérisateurs ?), ils risquent, comme dans bien d’autres dossiers, de ne pas assurer le bon déroulement de ce plan anti-pesticides.

Franck Attia (“Que Choisir”)


Pesticides

Contre-information de la profession

L’UIPP (Union des Industries de la Protection des Plantes) persiste et signe : malgré les six procès que leur campagne de publicité a suscités en 2005, les fabricants de pesticides réitèrent l’expérience cette année. Avec pour slogan, "Qui sème des questions récolte des réponses". L’objectif est le même : améliorer l’image, plutôt désastreuse il est vrai, des produits phytosanitaires. Encarts dans la presse familiale, site Internet rénové et censé répondre à toutes les questions que peut se poser tout un chacun, stand au Salon de l’agriculture avec “clinique des plantes” et activités pédagogiques à l’intention des enfants... l’UIPP met le paquet. Pourquoi une telle obstination ? Difficile de ne pas faire le lien avec le rapport publié conjointement par le CEMAGREF (Institut de recherche pour l’ingénierie de l’agriculture et de l’environnement) et l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) en décembre dernier, qui réaffirmait la nécessité d’aller vers une réduction de l’utilisation des pesticides, d’ailleurs imposée par la Commission européenne. Un impératif qui implique de rompre avec 50 ans de pratiques intensives. Car celles-ci fragilisent les cultures vis-à-vis des ravageurs (insectes, micro-organismes, etc...) et renforcent la dépendance à l’égard des pesticides. L’utilisation raisonnée des produits phytosanitaires, tout en maintenant le système actuel, n’est pas viable sur le long terme, ont conclu les experts. Visiblement, l’UIPP n’a pas entendu le message !


Éclairages

“Que Choisir” et le nouveau plan anti-pesticides

Pas de quoi rassurer La Réunion

Pour nous rassurer quant à l’innocuité des pesticides utilisés dans la lutte contre le chikungunya, la Préfecture nous dit qu’une bande de 5 mètres de long en retrait des cours d’eau est respectée. Outre le fait que cela ne rassure personne compte tenu de la pente des berges des ravines et des rivières, "Que Choisir" s’interroge sur le nouveau plan anti-pesticide annoncé. Pour "Que choisir" dont les experts ne cessent de dénoncer l’utilisation massive de pesticides, ce nouveau plan n’est pas "le remède de cheval attendu" et l’association de défense des consommateurs s’interroge : "Qui vérifiera que la bande de 5 mètres de long est bien respectée sur toute la longueur des ravines et cours d’eau ?". "Qui, et à quel intervalle, procédera au contrôle “périodique” des pulvérisateurs ?". Chacun comprend qu’une fois encore, comme pour l’épidémie de poliomyélite, comme pour l’épidémie de brucellose, c’est aux Réunionnais de prendre en main la protection de leur environnement et de leur santé.
Chaque jour qui passe nous rapproche d’une double échéance : celle de l’absence d’un véritable service de prophylaxie et celle d’une nouvelle flambée de l’épidémie de chikungunya qui prouvera - à nos dépens malheureusement - l’inefficacité du dispositif retenu par la Préfecture.

Jean Saint-Marc


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