Plan Santé au Travail :
- Ni le stress, ni la dépression ne sont à l’ordre du jour
- 9.000 morts par an de cancers liés au travail et non reconnus

9 août 2007

Alors que le ministre du Travail Xavier Bertrand s’est réjoui de « l’amélioration globale des conditions de travail » lors du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels (CSPRP) du 10 juillet dernier, la réalité dépeinte par les syndicats est moins optimiste.

Le « chemin déjà parcouru dans le cadre du Plan Santé au Travail (PST) », d’après Xavier Bertrand, vient de se concrétiser par la mise en opération de l’Afsset. C’est en effet seulement depuis février dernier que l’Agence française de sécurité sanitaire et de l’environnement au travail a vu le renouvellement de son Conseil d’administration.??
Adopté en 2005 par le gouvernement pour renforcer la prévention, la réglementation et la prise en compte des risques professionnels, le Plan Santé au Travail de Jean-Louis Borloo doit encore faire ses preuves. « Le PST est sur le gué », résument les syndicalistes, « il manque surtout de moyens humains ». ?? L’Afsset, au cœur du programme du PST, n’a fait que peu d’expertises, telles que celle sur les fibres minérales artificielles. « Cette agence est opérationnelle depuis 6 mois, les expertises restent donc très théoriques ». Pas de grande révélation faite par l’agence, donc. Peu de moyens également, et donc peu d’auto-saisine, reconnaît la Directrice de l’Afsset, Michèle Froment-Védrine (1) . « Nous sommes 100 et il y a du travail pour 120 personnes. Il faudrait être beaucoup plus pour pouvoir travailler sur des sujets intéressants, comme au Royaume-Uni où l’auto-saisine est plus spontanée », regrette-t-elle.
Selon le syndicat, il faudrait « trois fois plus d’experts toxicologues pour mener à bien les expertises » dirigées par cette agence, qui mène des recherches en partenariat avec 21 établissements de recherche sur les risques chimiques, tels l’INRS, le CNRS, l’Inserm (2) . « Evidemment, des experts peuvent avoir travaillé avec des producteurs de risques, ce qui peut biaiser les résultats », concède-t-on du côté des syndicats. « Mais apparemment, l’Afsset a mis en place un protocole transparent de désignation des experts », ajoutent-ils.

Autre point de désaccord : ni le stress, ni la dépression ne sont à l’ordre du jour de l’Afsset, alors que « les risques psycho-sociaux sont un aspect important de la santé au travail, autant que les risques chimiques », ainsi que vient de le démontrer tragiquement la série de suicides enregistrés tant chez Renault que chez PSA. « C’est l’Institut de veille sanitaire qui se charge de cela », répond Michèle Froment-Védrine.??
La prise en compte des morts par cancers liés au travail est un des sujets sur lesquels le PST doit également avancer. En effet, alors que seulement 1.889 cas de cancers professionnels sont reconnus pour 2004 par la Caisse nationale d’assurance maladie, les estimations épidémiologiques de l’InVS dénombrent environ 9.000 morts par an de cancers liés au travail et non reconnus.?? Quant au nombre d’inspecteurs du travail, s’il a été renforcé de 180 postes en 2007, il n’atteindrait pas encore les effectifs de l’Allemagne, de l’Espagne et d’autres pays de l’UE. Idem pour les professions de la prévention des risques. Même si « l’engagement du PST sur la voie de la pluridisciplinarité » s’est traduit par le recrutement de 1.200 ergonomes, ingénieurs, psychologues, etc... ces professions sont encore en sous-effectif par rapport aux médecins du travail, qui « demeurent l’ossature de la santé au travail », déplorent les syndicats.?? Le PST ne fait pas naître d’a priori négatifs à son encontre. Reste à prouver que ses efforts en matière de santé du travail sont fructueux. Efforts dont il sera question, ainsi que des résultats, lors de la conférence sur les conditions du travail en octobre prochain.?

(1) Lire la déclaration faite par Mme Michèle Froment-Védrine, Directrice de l’Afsset, lors de son audition, le 11 octobre 2005, par la Mission d’information de l’Assemblée nationale présidée par le Député Jean Le Garrec.
 ?(2) INRS : Institut national de recherche et de sécurité ?- CNRS : Centre national de recherche scientifique ? - Inserm : Institut national de la santé et de la recherche médicale


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