Surmortalité et COVID-19 : La Réunion paie le prix d’une stratégie inadaptée
Une hausse du nombre de décès trois fois supérieur à celui de la France en 2022 par rapport à 2019
samedi 25 février 2023, par
Par rapport à 2019, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion ont connu une hausse du nombre de décès deux à trois fois supérieure en 2022 à celle de la France. C’est au cours des deux premiers mois de l’année 2022 que la différence est la plus forte. Cette période coïncide avec une stratégie de laisser circuler le coronavirus avec la fin progressive des restrictions sanitaires. Le but était d’atteindre l’immunité collective par le biais de l’infection compte tenu d’un taux de vaccination insuffisant. Cette stratégie a donné des résultats différents de la France dans ces pays. Comment l’expliquer ?
+16 % en Guadeloupe, +17 % en Martinique et Guyane, +23 % à Mayotte et +26 % à La Réunion : c’est la hausse en pourcentage des décès constatés en 2022 par rapport à 2019 dans ces territoires selon une étude publiée ce 24 février par l’INSEE.
En 2022, la hausse des décès en 2022 était supérieure de 10 % sur la même année de référence.
Pour La Réunion, l’explication avancée est la suivante : l’épidémie de coronavirus a amplifié les effets du vieillissement de la population. C’est ce dernier point qui est la première explication.
Mais force est de constater que, selon l’INSEE, « la hausse des décès est particulièrement marquée en janvier et février 2022, lors de la période où les taux d’incidence et d’hospitalisation pour cause de Covid-19 ont atteint leur niveau le plus haut sur l’île depuis le début de la pandémie : +56 % par rapport à 2019 ».
Conséquence d’une stratégie
Janvier et février 2022 correspondent aux premiers effets de la nouvelle stratégie des autorités sanitaires pour lutter contre la pandémie de coronavirus. Face à l’impossibilité d’atteindre l’immunité collective par la seule vaccination, il a manifestement été décidé de laisser circuler le virus. C’était à l’époque le variant Omicron qui était dominant, et il était jugé moins virulent que les précédentes évolutions de la souche originale de la COVID-19. Mais il était aussi très différent de cette souche, ce qui rendait les vaccins anti-COVID moins efficaces : un vacciné pouvait être infecté par Omicron et transmettre le virus.
Décidée pour la France, cette stratégie a été appliquée dans d’autres pays : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion. Elle n’a pas donné les mêmes résultats.
Le choix de laisser circuler un virus potentiellement mortel
Compte tenu d’une population plus jeune que la France, ces pays comportaient en 2022 une proportion de personnes à risques logiquement plus faible. Le taux de mortalité aurait donc dû être comparable, mais ce n’est pas le cas.
Le graphique publié dans l’étude de l’INSEE de ce 24 février est éloquent. Par rapport à la France, les plus de 50 ans ont subi une hécatombe. Et elle se concentre en janvier-février, pendant la période où le virus a le plus intensément circulé à La Réunion au moment où les restrictions d’ordre sanitaire étaient progressivement levées.
En effet, le ver était dans le fruit. La possibilité de venir à La Réunion depuis la France sans test de dépistage ni quarantaine au prétexte d’avoir un « schéma vaccinal complet » a favorisé l’importation massive du variant Omicron. Le choix d’autoriser le Sakifo en novembre alors qu’Omicron était déjà bien présent est l’illustration de cette baisse du niveau de restriction.
La France avait les moyens de cette stratégie, pas La Réunion
En France, le taux de contamination était alors équivalent à La Réunion, mais le nombre de décès était proportionnellement moins élevé. Ceci montre que cette stratégie était bien plus adaptée à la situation de la France que celle de La Réunion.
Parmi les explications de ce résultat différent se pose immanquablement la question des moyens consacrés pour identifier et soigner les personnes contaminées par le variant Omicron. En France, ces moyens ont permis d’amortir le choc du choix de l’immunité collective, bien plus qu’à La Réunion.
Le constat est le même pour la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte.
Quels sont donc les moyens qui était à disposition de la France mais par de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion ?
Si les Réunionnais avaient la responsabilité de la politique sanitaire et migratoire, une telle catastrophe se serait-elle produite ?
M.M.