Conférence de Mexico sur le Sida

Un passage obligé pour des échanges entre les associations du monde entier

13 août 2008, par Edith Poulbassia

La 17 ème conférence internationale sur le Sida a eu lieu du 3 au 8 août à Mexico. L’association Rive y a représenté pour la première fois l’Océan Indien au sein de Ravane+, jeune réseau régional des personnes vivant avec le VIH. Marie-Laure Veyrat, chargé de communication de Rive, a participé à cette conférence. Elle revient sur cet événement.

Cette conférence a réuni près de 24.000 personnes représentant ainsi 190 pays, plus de 600 débats ont eu lieu. Que retenez-vous de ces rencontres ?
- Il était difficile de suivre ne serait-ce qu’une dizaine de ces débats. Nous avons fait un choix en fonction des problématiques réunionnaises : l’homophobie, les violences faites aux femmes, la stigmatisation. Nous avons moins participé à la partie liée à la prise en charge des malades car la situation est optimale à la Réunion.
Nous retenons surtout ce système de village global, une grande place où étaient présentes toutes les associations du monde entier. Rive y avait un stand par l’intermédiaire du réseau Ravane+. L’association représentait pour la première fois l’Océan Indien, avec Jacques Rollin directeur de Rive et vice-président de Ravane+.
Ce réseau rassemble des associations de Madagascar, de Maurice, des Comores, des Seychelles et de la Réunion ; C’est un réseau qui va permettre de donner plus de force aux actions, de porter ensemble des plaidoyers. Par exemple pour l’homosexualité aux Seychelles, où c’est interdit par la loi, la lutte contre le VIH reste un grave problème. La personne homosexuelle a tendance à s’isoler, difficile dans ces conditions de traiter le VIH.
La présence de l’Océan Indien était importante car on a l’habitude de ramener ces îles à l’Afrique, on les considère rarement comme une région à part entière. Ce qui a permis beaucoup d’échanges sur différents problèmes.
Nous avons ainsi appris que les personnes vivant avec le VIH en Afrique sont touchées en ce moment par la tuberculose. Ce qui entraîne des centaines de morts chaque jour. Des familles entières sont touchées par ces pathologies liées au sida comme la tuberculose, et l’Océan Indien est à proximité, avec l’Afrique du Sud, pays le plus concerné. Une des formes de tuberculose peut se transmettre et il n’y a pas de réel médicament. On voit le drame que cela peut engendrer.

Vous évoquez cette rencontre avec les associations. Qu’est-ce qui vous a marqué ?
- Les personnes vivant avec le VIH ont eu la force de se mettre en avant et de témoigner. On a constaté aussi une présence des associations de femmes, plus vulnérables à la maladie. Une présence importante également de transsexuels. Au centre du village des associations, une scène permettait à chaque pays de s’exprimer. Des transsexuels du Népal ont ainsi présenté une vidéo sur la vie quotidienne dans le pays, et les tortures qu’ils subissent. La lutte contre le sida pose dans de nombreux pays la question des droits de l’Homme.
On a pu découvrir les actions menées par les associations. Pour parler de la maladie, certains pays utilisent les spectacles de marionnettes, d’autres se servent du théâtre de rue comme en Inde au Népal.

33 millions de personnes sont atteintes par le virus et sur les 10 millions de personnes qui ont besoin d’un traitement, seulement 3 millions y ont accès. Comment se situe l’Océan Indien dans ce contexte ?
- L’accès aux traitements est optimal à la Réunion. Le traitement est pris en charge à 100%. En revanche, Madagascar et les Seychelles n’ont pas accès aux dernières molécules. Et si le traitement est parfois accessible, le patient doit payer le taxi pour se faire soigner. Il arrive que les patients développent des résistances aux médicaments. Le problème c’est que les îles de la région n’ont pas accès à tous les traitements possibles, contrairement à la France. Les médicaments restent encore très chers malgré l’effort de certains laboratoires.

La conférence a souligné l’importance de la prévention. Elle pourrait éviter 15 millions d’infections par le VIH d’ici 2015. A la Réunion, comment pourrait-on améliorer la prévention ?
- Il y a encore beaucoup à faire en terme de prévention au niveau des scolaires. Deux heures obligatoires en classe de 3ème sur la contraception et le VIH, ce n’est pas suffisant. Nous avons fait une demande en ce sens au rectorat, pour une plus large information sur les MST mais nous attendons les fonds.
Dès que nous en avons l’occasion nous tenons un stand sur le VIH, la contraception, la sexualité. Nous pouvons toucher 400 personnes en une journée, par exemple dans une foire. Ce genre d’opération est à compléter par les campagnes de sensibilisation, comme celle récente sur l’importance de parler de la sexualité. Elles permettent d’ouvrir le dialogue. Mais il faut les relancer régulièrement pour qu’elles portent vraiment.

Au final, en quoi ce genre de conférence est-il utile ?
- La conférence est un passage obligé, elle permet beaucoup d’échanges. Au niveau médical, il n’y a pas eu vraiment de scoop, comme l’année dernière. Les scientifiques avaient annoncé en 2007 de nouvelles molécules, une découverte équivalente à celle de la trithérapie il y a une dizaine d’années. Le prochain colloque de l’Océan Indien qui se tiendra en novembre à Maurice, sera l’occasion de faire un premier bilan de ces avancées thérapeutiques.
Il y a eu tout de même cette année la découverte de molécules pour les patients qui présentent une résistance au virus. Un nouveau sirop pour les enfants a aussi été présenté. Il a l’avantage de se conserver hors du frigo. Ce qui n’était pas le cas en ce moment et pose problème dans des endroits comme l’Afrique.

Propos recueillis par Edith Poulbassia


Le VIH/Sida dans l’Océan Indien

A la Réunion, les premiers cas d’infection au VIH sida ont été diagnostiqués en 1987. Depuis, le nombre de personnes vivant avec le virus VIH augmente lentement mais de façon régulière. En 2006, on comptait 621 personnes infectées, eux fois plus qu’il y a dix ans.
A Maurice, les premiers cas datent aussi de 1987. Jusqu’en 2000, une vingtaine de cas étaient recensés chaque année, mais on assiste à une explosion de l’épidémie. Fin 2006, 2587 personnes étaient atteintes du VIH/Sida.
A Madagascar, le nombre de séropositifs est évalué à 49.000 en 2005 par l’ONUSIDA mais d’autres sources estiment à 100.000 voire 200.000 le nombre de séropositifs.
Les Seychelles, on estime à 244 le nombre de personnes infectées, dont 130 suivis à l’hôpital de Mahé.
Aux Comores, on dispose de peu de données sur l’infection VIH/Sida. Une quarantaine de cas ont été rapportés 20 ans après le premier cas détecté. Les traitements sont disponibles depuis 2006.
A Mayotte, une centaine de cas ont été enregistrés depuis 1989, et 66 patients étaient suivis à l’hôpital de Mamoudzou en 2005.

Source Arps


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