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par le Dr Raymond Vergès

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« Nous avons réparé une injustice »

Présentation du programme européen BEST pour la protection et la valorisation de la biodiversité dans les Outre-mers de l’Union européenne

mercredi 15 juin 2011


En juillet 2008, 400 experts de 43 pays participent à la Conférence de l’UICN sur la biodiversité et le changement climatique dans les îles, coorganisée par la Région à Saint-Denis. Les participants y adoptent le Message de La Réunion. Trois ans plus tard et deux ans après l’élection d’Elie Hoarau au Parlement européen, cette déclaration trouve une première concrétisation avec l’adoption par la Commission européenne du programme BEST. BEST est issu d’un amendement déposé par le député réunionnais lors de la discussion du budget de l’Union européenne au Parlement européen. Il donne enfin aux Outre-mers un accès à des financements adaptés pour protéger et valoriser leur biodiversité d’une richesse incomparable. Elie Hoarau et ses deux colistiers, Maya Césari et Younous Omarjee, ont présenté hier publiquement cet outil de valorisation de la biodiversité des Outre-mers.


« Nous avons réparé une injustice » : jusqu’à présent, l’Union européenne accordait des financements pour la valorisation et la protection de la biodiversité, mais les Régions ultrapériphériques (RUP) et les Pays et Territoires d’Outre-mer (PTOM) étaient quasiment exclus de ces dispositifs. Elie Hoarau rappelle que ce sont pourtant ces Outre-mers de l’Union européenne qui sont le principal réservoir de biodiversité. À eux seuls, les DOM représentent 80% de la biodiversité de la République.
Mais à ce jour, nos pays ne disposent pas des outils mis en place par l’Union européenne pour protéger et valoriser cette richesse.
Cette injustice est désormais réparée avec la publication d’un nouveau règlement européen. Il fait suite à la validation par la Commission européenne du programme BEST, Régime volontaire pour la biodiversité et les services écosystémiques dans les territoires des Régions ultrapériphériques et les Pays et Territoires d’Outre-mer de l’Union européenne. Ce programme est le résultat d’un amendement au budget de l’Union européenne défendu par Elie Hoarau en septembre dernier au Parlement européen.

« Un premier pas intéressant »

Hier, le député de la section océan Indien a présenté ce programme aux côtés de ses deux colistiers réunionnais : Maya Césari et Younous Omarjee. Outre des journalistes, des représentants d’associations œuvrant dans la biodiversité ont participé à cette conférence de presse.
Elie Hoarau précise que le programme BEST vise à appuyer, jusqu’à 95% du montant final, les actions liées à la protection et à la valorisation de la biodiversité. Deux millions d’euros sont affectés pour ce programme cette année, et les premiers projets peuvent être soumis à la validation d’ici le troisième trimestre. Les projets éligibles peuvent se situer dans tout l’Outre-mer de l’Union européenne, c’est-à-dire les RUP, et aussi les PTOM.
Ces 2 millions d’euros sont déjà « un premier pas intéressant, il conviendra par la suite de se battre pour que les actions soient pérennisées et que les enveloppes allouées puissent être revues à la hausse », ajoute en substance le député au Parlement européen.
Autrement dit, « la concurrence sera rude », mais « nous avons à La Réunion une biodiversité particulièrement riche ». L’espace maritime des RUP, ce sont des enjeux écologiques extrêmement importants, poursuit le parlementaire.
Ce type de programme traduit une évolution de nos relations avec l’Union européenne. Elle s’inscrit dans la nouvelle stratégie de l’Europe vis-à-vis des RUP qui souhaite s’appuyer sur les atouts de nos régions, indique Younous Omarjee. C’est la traduction d’une prise de conscience. La biodiversité est un enjeu majeur, et grâce aux Outre-mers, l’Union européenne est aux avant-postes sur cette question, précise Younous Omarjee. Cela signifie que ce sont des mécanismes de financement supplémentaires qui commencent à entrer en action.

« Nous avons le potentiel à La Réunion »

Maya Césari abonde dans ce sens, en indiquant que jusqu’à présent, l’Europe participe aux investissements à La Réunion par le biais des fonds de la politique régionale. BEST est du ressort de la politique européenne de la recherche. Et à la différence de ce à quoi nous sommes habitués, les appels à projets de la DG Recherche mettent en compétition toutes les régions. Participer à BEST, c’est donc pour les Réunionnais un moyen d’acquérir de l’expérience, afin d’anticiper l’éventualité d’une baisse des crédits de la politique régionale. Car BEST ouvre la voie à une diversification du partenariat financier entre La Réunion et l’Union européenne.
Mais pour ne pas rater ce rendez-vous, il est important que les acteurs réunionnais arrivent à se structurer. « Nous avons le potentiel à La Réunion, avec le Parc national, la Réserve marine, l’Université, le CIRAD ». Ce potentiel inclut aussi les associations qui peuvent se fédérer afin de répondre à cet appel à projets. La conseillère régionale souligne qu’il est important que La Réunion participe à cet appel à projets afin qu’elle montre à l’Europe qu’elle a de l’ambition et des propositions pour satisfaire ses besoins.
Maya Césari rappelle également que dans un tel contexte, la création d’une structure d’accompagnement sur le modèle de l’AGILE est nécessaire, afin que les initiatives réunionnaises arrivent à s’exprimer sur ce nouveau terrain.
Au moment où s’ouvrent donc de nouvelles opportunités, il est important que notre île continue à jouer dans le peloton de tête.
D’ailleurs, Elie Hoarau conclut en rappelant que BEST est dans la continuité de l’action entreprise à La Réunion, « la Région avait initié cette bataille » : une bataille pour faire prévaloir la nécessité de protéger cette biodiversité.

Manuel Marchal


Maya Césari

L’apport de La Réunion à une avancée qui enrichit l’Europe

Maya Césari revient sur trois dates qui ont préparé l’adoption par la Commission européenne.
C’est tout d’abord le 16 février 2005 avec l’ouverture des travaux du GIEC à la Région Réunion. L’initiative de cette manifestation revient notamment à Paul Vergès, président de l’ONERC et alors président de la collectivité.
Ce 16 février, le monde célébrait l’entrée en vigueur du Protocole de Kyoto.
Le choix de La Réunion comme lieu de l’ouverture de ces travaux ce jour-là témoigne de l’intérêt manifesté par le GIEC pour notre île.
Deux ans plus tard, en mars 2007, la réponse avec la Région à un appel à projets de la DG Recherche aboutit à la création de NETBIOME.
NETBIOME, c’est un réseau de chercheurs des RUP et des PTOM travaillant sur la biodiversité.
L’année suivante, en juillet 2008, l’UICN choisit La Réunion pour accueillir son congrès sur la biodiversité et le changement climatique. En conclusion de cette rencontre, les 400 participants de 43 pays adoptent le Message de La Réunion.
Appel à projets BEST est une réponse à cette déclaration.
Voici quelques questions présentes dans le Message auxquelles BEST s’attache à financer les moyens d’y répondre : comment s’adapter au réchauffement climatique ? Comment effectuer l’évaluation économique de la biodiversité, et rôle de cette évaluation dans la stratégie des territoires ? Comment renforcer le rôle de la société civile ? Quelles stratégies de recherche et développement dans les RUP ? Quels partenariats entre RUP et PTOM ? Comment renforcer la coopération régionale ? Comment réussir la révolution énergétique ? Comment relever le défi des océans ? Quel mécanisme financier mettre en jeu ?


Younous Omarjee

« Une responsabilité pour nous et le monde »

« Ce programme BEST concrétise la nouvelle stratégie de la Commission européenne vis-à-vis des Régions ultrapériphériques (RUP) », explique Younous Omarjee. « La Commission veut valoriser les atouts des RUP et des PTOM pour renverser l’approche de nos relations », précise en substance l’attaché parlementaire d’Élie Hoarau.
En effet, « la biodiversité est un enjeu majeur pour le monde et l’Union européenne, et dans cette lutte globale, l’Outre-mer est aux avant-postes ».
La biodiversité est en effet confrontée à la 6ème extinction de masse des espèces. Cette extinction est la plus grave dans son intensité et sa rapidité : 16.000 espèces sont menacées. Younous Omarjee précise que selon les experts, si le rythme de prédation actuel est maintenu, il n’y aura plus de poissons, ni de crustacés disponibles en 2050-2060.
L’an dernier, la Conférence de Nagoya sur la biodiversité a rappelé la gravité de la situation. Pour faire face, des engagements doivent être pris.
Or, il est impossible pour l’Union européenne d’atteindre son objectif de préservation de la biodiversité si elle ne s’appuie pas sur les Outre-mers, ajoute le colistier d’Élie Hoarau. C’est là que se trouvent les hotspots de biodiversité. C’est donc « une responsabilité pour nous et le monde ».
Pour La Réunion, valoriser la biodiversité, c’est répondre à un besoin d’éducation à l’environnement.
Pour le monde, sachant que ce programme concerne l’ensemble des Outre-mers de l’Union européenne, il peut « nous donner plus de force dans la manière dont l’Union européenne nous regarde ».
Et de conclure en rappelant qu’il ne faut pas perdre de vue que « la lutte contre le changement climatique doit aider à la prise de conscience de la lutte contre la perte de biodiversité ». Le programme BEST est donc une continuité dans l’action depuis le "Message de La Réunion".


Calendrier de l’appel à projets

Pour la première année du dispositif BEST, le calendrier est fixé. Les premiers projets doivent être envoyés à l’instance d’évaluation à partir du troisième trimestre.
C’est au plus tard au mois de décembre que seront rendus publics les accords pour subvention. BEST peut prendre en charge jusqu’à 95% des coûts du projet.


A la rencontre des agriculteurs, des industriels et des maires

Elie Hoarau indique que mise à part l’information de tous les acteurs concernés par la défense de la biodiversité, son travail dans sa circonscription va également consister à rencontrer tous les professionnels et institutions concernés par la réforme du POSEI (aides directes aux agriculteurs), et par l’Octroi de mer. Pour ce dernier point, l’élue rencontrera notamment les industriels, la CCIR et les communes.
C’est au mois de juin que le rapport sur l’Octroi de mer sera examiné par le Parlement européen, et en septembre viendra le tour de celui sur le POSEI.
Outre ces deux colistiers Maya Césari et Younous Omarjee, Elie Hoarau est également accompagné par Olivier Plumandon, assistant parlementaire.


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Messages

  • L’injustice n’est absolument pas réparé pour qui sait ce que sont les appels à projet pour financements européens dans le secteur de l’environnement et la conservation.
    Trois mois pour monter un projet (délai 9 sept), 2 millions d’euros disponibles (rien avoir avec un PO de convergence y compris sur une région ultrapériphérique) pour des projets pouvant aller jusqu’à 3 ans, disponible sur l’ensemble des RUP et des PTOM, pour permettre une vision d’ensemble de ce que pourrait être la conservation des écosystèmes ultrapériphériques et constituer une « vitrine de projets »… semble montrer une politique mensongère de la part des commissions Européennes, une enveloppe ridicule fonctionnant comme un appât nous est proposée. L’objectif est de récolter un maximum d’informations sur ce qui se trame sur les territoires des PTOMS et RUP (telle une enquête) afin de définir d’autres processus ultérieurs d’appels à projets adaptés et de plus grosses enveloppes pour 2012 (ou plus tard ???). Ainsi seuls les projets axés sur les corridors écologiques à grande échelle et intégratifs seront validés.
    A titre informatif un projet de conservation par le WWF en Guyane 1.2 millions, un projet de restauration des habitats dans les caraïbes par l’ONF 0.8 millions ... voyez ce qu’on peut faire avec 2 millions ... RIEN !!! Cependant je pousse tous les acteurs à jouer le jeu pour être pris en compte lors des prochains processus !!!
    A bon entendeur salut


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