Contre le SIDA, faire progresser vers plus d’humanité

9 novembre 2006

Suite au compte-rendu que nous avons fait hier de la table ronde “Religion et VIH”, dans le cadre du 5ème Colloque VIH Océan Indien, Monseigneur Gilbert Aubry a souhaité faire connaître son intervention en entier. Voici donc sa contribution...

Tout le monde, dans chacune de nos îles et partout, tous, nous devons nous mobiliser contre le SIDA. On ne joue pas avec cette peste. En ce qui concerne le positionnement de l’Eglise catholique, nous insistons d’abord sur le sens de la sexualité. Il est nécessaire de redonner à la sexualité tout son sens comme langage privilégié pour un amour humain à réussir dans la fidélité, la responsabilité et la vie ouverte sur la vie. Nous affirmons cela de manière très forte, non seulement au point de départ, mais de manière permanente dans toutes nos démarches touchant à l’amour humain.

En arrière-plan, nous avons les deux récits bibliques de la genèse où l’homme et la femme sont côte à côte. Eve n’est-elle pas tirée de la côte d’Adam, chair de sa chair, os de ses os ? Il s’agit pour eux de regarder dans la même direction, de progresser ensemble. Ils sont aussi en vis-à-vis, pour le don de l’un à l’autre avec une parole en dialogue qui leur permet de se construire à travers leur sexualité, sexualité reçue avec leurs différences réciproques, sexualité vécue au cœur de la création qu’ils ont à maîtriser, à faire fructifier et non pas à détruire. Il est à noter que le livre de la Genèse n’est pas un livre d’Histoire mais un poème de sagesse qui dit le sens de la vie dans la contemplation de la Vie qui vient de Dieu source de vie. Et le Christ reprend à son compte l’amour entre un homme et une femme comme un chemin qui dit Dieu faisant alliance avec les hommes au creux de la chair humaine.

A nos yeux, une banalisation de la sexualité se retournerait donc contre une responsabilisation des personnes, des couples et de la société, non seulement immédiatement, mais surtout à moyen terme et à long terme. En même temps, nous reconnaissons que notre société est dans une situation de détresse spirituelle, morale et sexuelle, et que beaucoup de catholiques ont de la peine à suivre cet idéal, tout comme la majorité des membres de la société. Il importe donc de rappeler le devoir de ne pas donner la mort. Si des personnes ne vivent pas la fidélité et s’installent dans une situation de multiples partenariats sexuels, même si un seul membre du couple ne vit pas la fidélité, il appartient aux partenaires de tirer les conséquences et de prendre, sous leur responsabilité, l’utilisation du préservatif. Mais l’Eglise ne dira pas de manière abrupte « Prenez le préservatif ».

Pourquoi ? Si l’Eglise tenait ce langage, elle serait à côté de sa mission puisqu’elle ouvrirait automatiquement la porte au défoulement sexuel et à sa bénédiction. Il faut dépasser le langage simpliste du permis et du défendu. Ce n’est pas l’objet du préservatif qu’il faut ou bénir ou diaboliser. Il faut engendrer des comportements responsables avec les moyens appropriés selon telle ou telle situation. L’Eglise catholique propose un idéal, le rappelle et essaie de tout faire pour que les gens soient responsables en essayant d’atteindre l’optimum. Nous pensons surtout à la mission des familles qui doivent élever leurs enfants. Les familles sont déstructurées et broyées par le climat de permissivité qui se développe tandis que les conseils donnés publiquement en matière de sexualité vont, trop souvent, à l’encontre d’une éducation humaine.

Actuellement, dans nos paroisses et sur l’ensemble du diocèse, nous faisons porter nos efforts sur la lutte contre la polytoxicomanie. Le mois dernier (12 octobre), nous avons organisé un colloque en multi-partenariats sur le sujet... et l’action continue. Il y a une dizaine d’années, nous avions deux prêtres qui ont développé un effort particulier concernant la prévention contre le SIDA et le SIDA, dont notre regretté André Lendger décédé. Ce que nous avions dégagé à l’époque comme lignes d’actions est toujours valable pour l’ensemble du diocèse. Sans doute faudrait-il relancer une campagne en multi- partenariats en tenant compte de ce que nous avions déjà fait et de la philosophie qui est la nôtre :

1- Il y a une dimension spirituelle et éthique à la santé. C’est un bien que nous avons à gérer nous-mêmes, nous en sommes les premiers responsables : faire gagner la vie, ne pas donner la mort.

2- Aider à découvrir que la satisfaction momentanée du plaisir ne doit pas détruire les plaisirs à venir en détruisant la vie elle-même. Nul ne réussit sa vie tout seul.

3- S’informer et informer sur le SIDA en faisant appel aux compétences et en formant nos animateurs auprès des jeunes.

4 - Faire comprendre que le SIDA n’est pas une maladie infamante. Il est nécessaire d’accueillir les malades du SIDA comme les autres malades : aider les membres d’une famille à accueillir pour que les personnes concernées puissent se dire et être soutenues.

5- Mettre en relation avec des groupes spécialisés ou des associations pour que le découragement soit battu en brèche, que l’accès au traitement soit effectivement possible et que les traitements ne soient pas abandonnés.

6- Inviter à se faire dépister pour que l’ennemi soit repéré le plus tôt possible et combattu efficacement.

Enfin, il nous faut nous souvenir de la parole du Christ qui non seulement nous demande de ne pas juger les personnes, mais de les aimer comme on s’aime soi-même et comme lui, Jésus, nous aime : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ». Nous avons à faire progresser vers plus d’humanité et non pas à condamner.

Monseigneur Gilbert Aubry


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