Université de La Réunion : Fermeture du service gynécologique de la médecine préventive

Étudiantes sans gynéco...

20 juin 2006

Alors que la politique de la santé exige une action accrue pour l’éducation sexuelle de la jeunesse réunionnaise, la médecine préventive doit se priver d’un de ses services. Sous silence, la gynécologie sera un service bâclé, au détriment des étudiantes réunionnaises, qui ne comprennent pas.

Plus de budget ? Nouvelle orientation dans la politique de santé du Conseil général ? Les questions vont bon train, depuis l’annonce de la fermeture du service gynécologique du Campus du Moufia. Nous disons "fermeture", ce n’est pas tout à fait vrai. Ce service sera assuré en septembre par l’AROF, Association réunionnaise orientation familiale, par le biais d’un médecin généraliste à raison de 3 demi-journées par semaine.
Vous l’aurez compris, il semble que la spécialité gynécologique pose problème à certains. "Ce service est d’un intérêt capital pour les étudiantes", explique l’équipe soignante de la médecine préventive, qui désavoue la perte de temps que cela génèrera, notamment pour une interruption de grossesse médicamenteuse. "Un médecin généraliste, selon la loi 2002 sur l’IVG, après signature d’une convention entre l’association et le CHD, peut faire l’IVG médicamenteuse dans son cabinet", explique un médecin de l’AROF, qui précise "mais les étudiantes seront sur le même plan que les autres patientes". Tout serait une question de budget. 2380 euros pour défrayer trois médecins et une infirmière spécialistes en gynécologie, le Conseil général ne peut plus assurer cette charge. Ce n’est pas une question d’argent, répond le Département. Ce serait plutôt une manière départementale de revoir ses lignes budgétaires au vu de la loi et du domaine des compétences partagées. 900 étudiantes sont encadrées tous les ans, selon les chiffres de la médecine préventive.

Une perte de temps pour les étudiantes

Médecine préventive, synonyme de démocratisation de la santé sur le campus universitaire ? C’est apparemment fini. "Nous disposions enfin d’une équipe pertinente, avec des médecins généralistes, un psychologue, un service de nutrition, et un service de gynécologie", lance la médecine préventive, qui note que cela a pris du temps pour que s’installe une cohérence de travail en matière de santé. Et celle-ci de faire valoir le progrès auprès du public réunionnais, soumis à un panel de tabous. L’usage de la pilule ne s’est pas démocratisé comme il le faudrait, surtout au sein d’une société réunionnaise qui connaît un grave problème d’éducation sexuelle. "Toutes les facultés ne disposent pas d’un tel service", lance une personne de l’équipe médicale, qui note que "l’avantage d’avoir des médecins spécialistes issu du CHD, c’est que les étudiantes sont suivies dans l’instant, avec un suivi psychologique si besoin est", avec une rapidité que ne cherche pas à nier l’AROF elle-même. Ce problème est un tant soit peu gênant, quand on sait que l’Université de La Réunion veut encourager la création d’un CHU dans notre île, avec la mise à disposition de médecin-enseignant. C’est sûr, il y a encore beaucoup à faire. En septembre, l’équipe soignante du CHD qui s’exécutait sur son temps de repos cèdera la place à une autre équipe, dont les compétences sont inférieures à celles requises, pour une parfaite pertinence du dispositif. Le médecin de l’AROF est-il formé pour cela ?

Que l’État se débrouille...

De son côté, le Conseil général, par la voix du docteur Claude Alcaraz, est catégorique. "La collectivité ne veut plus de compétence croisée. L’université n’est pas de notre compétence. Nous financions la planification et d’éducation familiale, et à partir de la prochaine rentrée universitaire, nous souhaitons éviter les croisements budgétaires. Que l’État se charge de la médecine préventive, c’est de la responsabilité. Le département a assez de compétences obligatoires et de dépenses obligatoires pour assurer d’autres missions qui ne sont pas les siennes". Pour autant, le médecin du Conseil général indique que "ce ne sera pas de la médecine au rabais. L’AROF dispose d’une autorisation préfectorale pour exercer, et cela rentre parfaitement dans les missions de cette association. Par ailleurs, ce serait dévaloriser le travail des médecins généralistes". Et Claude Alcaraz de noter qu’il est simple de prescrire une pilule du lendemain, ou du moins du ressort d’un médecin généraliste. Pourtant, la gynécologie est toujours une spécialité médicale.

Willy Técher


Témoignage

S. Bellanger, 24 ans, étudiante en filière scientifique

Ça me paraît grave parce que le médecin que nous propose l’AROF, ne pourra pas répondre à des questions spécifiques, contrairement à ce que pourrait faire des gynécologues. Ils ont formé une équipe performante, qui dispose d’un psychologue, d’une assistante sociale, d’un nutritionniste, de gynécologues et de médecins généralistes. Il propose aussi de la sophrologie, des cours de secourisme, de gestion de la dépression et du stress, et le service a des infirmières très compétentes. D’autant plus que c’est généralement rapide et totalement gratuit. Pour les étudiants, c’est génial, puisque nous n’avons pas beaucoup d’argent et qu’il nous faut avancer l’argent chez les spécialistes et la plupart des pharmacies, dû à notre statut d’étudiant. On est à la sécu étudiante. D’un point de vue médical, tout est plus rapide avec la médecine préventive. Pour les urgences gynécologiques, c’est rassurant de savoir que l’on peut être prises en charge par un gynécologue, et pas un médecin généraliste. Il y en a déjà deux ou trois, nous n’avons pas besoin d’un autre généraliste.


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