Semaine nationale de lutte contre le Cancer

24 mars 2007

“Ecoute Cancer” : le téléphone pleure

“Ecoute Cancer” a ouvert sa ligne en février 2004. Mis en place par le Comité régional de La Ligue contre le Cancer, ce service téléphonique anonyme et confidentiel est assuré uniquement par une poignée de bénévoles dont Annie Guézelot, qui en a pris la charge à sa création. Un service aux moyens modestes, mais qui s’avère bien souvent être la seule bouée de secours pour les malades rongés par l’isolement.

Durant 2 ans, le service “Ecoute Cancer” était assuré seulement par 2 personnes. En avril 2006, une petite relève a été assurée. Beaucoup de bénévoles formés quittent le train en marche, car concilier bénévolat et vie professionnelle n’est jamais évident.

« Beaucoup de personnes isolées face à la mort »

« Ce n’est pas facile à gérer, mais nous faisons preuve de bonne volonté pour apporter un service en plus aux malades », soutient Annie Guézelot. Un service qui, de l’aveu même du corps médical, répond à la demande de certains patients. « Certains osent les groupes de paroles, les visites de bénévoles à domicile, mais d’autres préfèrent l’anonymat », explique Annie, qui fait état, dans le respect de son engagement, de confidentialité, de « cas très poignants », de « beaucoup de souffrance ». Comme chez ces femmes mariées qui sont abandonnées pendant la maladie. « Elles doivent continuer seules, poursuit l’écoutante. Certaines n’ont pas d’emploi, pas d’enfant : elles retournent chez leurs parents. La maladie est assez dure, alors, avec ce type de problème en plus, c’est difficile de garder le moral ». Et Annie parle en connaissance de cause. En 1997, elle est terrassée par un cancer du sein. Le choc, la douleur, le traitement, la chimiothérapie furent des épreuves très dures à vivre, mais Annie n’était pas seule dans son combat pour la vie. « J’ai reçu beaucoup d’amour et d’aide. Quand j’ai commencé à me relever, je me suis dit qu’il fallait que je donne à ceux qui avaient moins de chance ce que j’avais reçu. L’entourage dans la maladie aide à se relever, car quand un malade souffre, il a tendance à se refermer ». Durant son traitement, Annie a rencontré « beaucoup de personnes isolées face à la mort : ça a été un détonateur ». Alors qu’elle était en rémission, encore affaiblie, l’idée d’encourager les autres à se battre ne la quittait pas. Mais comment aider ? Elle commençait à s’apitoyer sur elle-même lorsqu’à la fin de l’année 1999, « un petit noyau de malades et d’anciens malades, avec le Docteur Gréget, a décidé de relancer le Comité régional ». Annie en faisait partie.

« C’est ce que l’on peut faire pour les autres qui est important »

« Le Docteur Gréget m’a beaucoup aidée, elle m’a acceptée comme j’étais et m’a fait confiance. C’est important, car quand on est malade, on est complexé, on ne se sent plus comme les autres, pas crédible ». La relance du Comité s’est concrétisée d’abord par la mise en place de groupes de paroles, puis des soins palliatifs, quasiment inexistants à l’époque. Annie a suivi les formations nécessaires pour aider à l’organisation des différents services. Puis, comme personne n’osait prendre en charge le service “Ecoute Cancer”, Annie s’est finalement portée volontaire. « Pendant ma rémission, avoir un objectif m’a rendu service, car cela m’a permis de relativiser sur mon cas. Il y a bien pire autour de moi ». La maladie a changé radicalement le regard d’Annie sur la vie, sur les autres, sur elle-même. Elle a soif de vérité et d’essentiel. Elle se partage aujourd’hui encore, comme beaucoup de bénévoles qui prêtent mains fortes au Comité, entre son travail et son action associative. « Je ne veux pas que l’on parle de moi, c’est ce que l’on peut faire pour les autres qui est important, ce que l’on peut apporter d’amour et de don de soi sans rien attendre en retour », confie Annie, qui se défend d’être la responsable de quoi que soit au sein du Comité. Elle ne veut pas de titre. Elle accepte de témoigner à titre exceptionnel pour que le travail du Comité soit connu et reconnu, afin qu’il puisse, grâce à la récolte de dons, assurer son fonctionnement d’adhésions et de volontés, continuer son action auprès des malades.

« On n’a pas le droit d’abandonner »

Pour ceux qui vivent leur maladie dans l’isolement, soit parce qu’ils s’en cachent, soit, le plus souvent, parce qu’il s’agit de personnes âgées en phase terminale, “Ecoute Cancer” joue dans ce cas le rôle de passerelle, en répercutant ces cas de détresse, soit vers des visiteurs à domicile, si la personne l’accepte, soit en proposant une hospitalisation à domicile. « Beaucoup de personnes âgées vivent seules, atteste Annie, et rares sont celles qui ont la chance d’avoir un voisin qui leur rend visite pour voir si tout va bien ». Pour ces personnes isolées, comme pour les mères de famille par exemple qui ont du mal à assurer toute la charge quotidienne de leurs enfants lors de leur lourd traitement, le prochain objectif du Comité est de leur mettre à disposition des aides à domicile, des auxiliaires de vie. Ce serait bien, mais voilà, cela coûte cher. « On fait de petits pas, mais on a le courage nécessaire pour avancer, positive encore et toujours Annie. Il faut aller chercher la force en soi pour aller de l’avant, et dans les moments de fatigue, il suffit de regarder tout ce qui a été fait à force de travail depuis 1999 pour se dire que l’on n’a pas le droit d’abandonner ».

Stéphanie Longeras



0262.300.600
Faute de moyens, le Comité régional n’a pu mettre en place un numéro vert. Un appel à “Ecoute Cancer” correspond donc pour l’usager au prix d’un appel normal. Un correspondant est joignable du lundi au vendredi de 8 heures à midi, puis de 14 heures à 17 heures, et un répondeur s’active à partir de 18 heures. Exceptionnellement, et ce jusqu’à la fin de la semaine, le numéro est mis à disposition pour toutes les promesses de dons.


Guillaume Kichenama ...

... socio-esthéticien

C’est le premier poste financé à La Réunion par le Ministère de la Santé, par le biais de l’Agence Régionale de l’Hospitalisation. Guillaume Kichenama est le seul homme à exercer ce nouveau métier... à La Réunion. Et sur tout le territoire français, ils se comptent sur les doigts d’une main.

Discussion, hier en milieu d’après-midi, à la Clinique de Saint-Clotilde Saint-Denis, avec Guillaume Kichenama, Socio-esthéticien. Cette profession, il l’exerce par ailleurs dans la même ville, mais au CHD de Bellepierre. Ce métier ne vous dit peut-être rien ! Mais aux services où l’on s’occupe des malades du cancer, il est, depuis peu, un maillon important. Vous savez, lorsque le cancer est diagnostiqué, il vous l’est annoncé dans la foulée.

Et là, tout s’écroule. Pourquoi moi ? Et puis, le traitement est long et les effets secondaires de la chimiothérapie occasionnent des dégâts physiques. La personne se pose de multiples questions sur son devenir. Surtout sur son image, dans une société où les publicités ne cessent de montrer des corps parfaits. A-t-elle encore sa place dans ce monde ? À ce moment, Guillaume Kichenama intervient.

Retrouver la féminité

Il est à l’écoute des besoins de 85% de femmes et 15% d’hommes atteints du cancer. Il pose sur eux un regard humain. Il les considère comme des personnes tout simplement. Elles (les femmes) ne veulent pas perdre leur féminité, alors, il les aide à le retrouver. Il les conseille dans leur maquillage, le choix d’une perruque. Si une femme a perdu un sein, avec elle, il va chercher la meilleure solution !

Elles se confient à lui très facilement, non pas sur leurs états d’âme, mais sur leurs espoirs en la vie. Les retrouvailles avec les compagnons et enfants sont des moments émouvants où l’on retrouve une femme qui, même malade, donne le meilleur d’elle-même. Elles ont envie de vivre, de plaire. Certains hommes voient leurs femmes métamorphosées. Ils les trouvent plus ravissantes. D’autres, dans la maladie, voient leur rêve se réaliser, comme cette adolescente, qui voulait avoir des cheveux lisses.

Socio-esthéticien, Guillaume Kichenama a dû affronter vents et marées pour parvenir à ce but. Il a été formé dans un premier temps au métier d’esthéticien à Paris France. À la fin de sa formation, il exerce le métier, mais au bout de quelque temps, il veut venir en aide aux autres. Il s’inscrit dans une école privée pour la formation de socio-esthéticien aux Cours d’Esthétique option humanitaire et sociale. Fin du cursus, diplôme en poche, débute pour lui un véritable challenge.

Une aide appréciée

Il travaille d’abord en France, mais des voyages vont l’emmener dans sa Réunion. Il rencontre le Docteur Sandra Gréget, oncologue et Présidente de La Ligue contre le Cancer Réunion. Le manque de socio-esthéticien est flagrant. Tout s’emballe ! Il ne perd pas une minute et concrétise son projet. Le voilà à redonner une autre image à des femmes plongées un instant dans le désespoir. Guillaume par ci, Guillaume par là !

Sa venue est une bouffée d’oxygène pour elles. En plus, le travail d’équipe marche bien. Au service d’Onco-Hémathologie du Docteur Henni, à Bellepierre, sa présence est appréciée.

Ses projets, il ne souhaite pas nous les dévoiler. Mais il se rendra dans les collectivités pour les exposer. Ils sont très intéressants et créateurs d’emplois.

J.-F. N.


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