Distinction régionale pour les femmes réunionnaises

’ C’est un combat de civilisation... ’

9 mars 2005

La salle était comble. Le vase “fragile” y avait toute sa place. On le célébrait. La femme ? Les Réunionnaises étaient là. Une chanteuse ouvre le bal. Théâtre sur les femmes.

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La fin de la première partie était éloquente. Paul Vergès, Président de la Région Réunion, conclue la cérémonie des distinctions de la Région. Une remise de reconnaissance, de faire valoir, oui... de distinctions. Les sept femmes, honorées pour leur travail, leur mérite, leur révolution, sont féminité. Paul lui-même le rappelait. Elles sont artiste, chef d’entreprise, religieuse, sportive, étudiante, grutière, politicienne.
On célèbre d’abord Françoise Guimbert, la Cesaria Evora de La Réunion, celle qui, orpheline, éleva ses neveux et nièces, et contribua à leur éducation. Elle reçoit la distinction régionale de la “Culture”, à trois mois de ses 60 ans. On ne lui portait cet âge, mais Tantine Zaza porte la jeunesse dans son art. On célèbre une grande dame, fière d’être honorée pour son travail. Après l’album "Paniandy", cette voix réunionnaise continue de travailler. L’œuvre, elle le dédie aux femmes de son pays, à ses musiciens, mais d’abord à une maîtresse de maison bénédictine, chez qui elle a passé de nombreuses années sa vie. Salut à toi grande dame !

L’olympe régional porte ses déesses réunionnaises

Après Françoise Guimbert, place au “Sport”. Sabrina Richard est honorée pour ses prestations sportives. Elle a porté les couleurs réunionnaises en Championnat de France, durant 13 ans consécutifs. Elle s’est distinguée sur le plan international au championnat d’Europe, du monde, aux jeux olympiques de Sydney, et au Canada. Merci grande dame, toi qui fais de l’haltérophilie, et qui garde une prestance des grands palais. Adèle Bouquerel n’est malheureusement pas présente. Sa mère viendra prendre le totem, qui récompense le studieux travail de sa fille. Meilleure bachelière en 2004, elle est aujourd’hui à Paris, au lycée Saint-Louis, en préparation à Normal Supérieur, une prestigieuse formation. On ne pouvait que lui rendre hommage, elle qui obtint son baccalauréat scientifique avec 18 de moyenne.
En “Économie”, on salue le courage émérite d’Annette Langevin, qui s’est lancée dans la création et la créolisation d’un hôtel 2 étoiles, à Saint-Gilles les Hauts. La Villa des songes est un joyau, un défi dans le marché du tourisme. 12 chambres, dans un pays de rêve, qui vit presque miraculeusement. En fait, son affaire marche à merveille, une entreprise entre les mains d’une ancienne sage-femme, qui s’était entichée de La Réunion en 1978. Chapeau Bas !
“Formation professionnelle” ! Une femme qui fait un métier d’homme. Sur les quatre femmes qui le pratique, elle est la première Réunionnaise. Martine Cerveaux est grutière. Sœur Marie-Bernadette Vardin est religieuse de la Congrégation des sœurs de Marie immaculée. Elle fait un travail bienfaisant pour les malentendants et non-voyants. L’association Développement des actions spécifiques pour les sensoriels des îles (DASSÎ), qu’elle dirige depuis 1999, œuvre à l’insertion sociale des personnes déficientes visuelles ou auditives, à La Réunion, comme dans la zone océan Indien. Catherine Gaud, qui œuvre elle-même dans une association caritative, lui remet son totem régional, son trophée. Malgré sa modestie, on imagine l’ampleur de son travail, elle, qui professeur de français, a choisi un jour d’aller vers la différence, en se formant à l’Ecole nationale des jeunes aveugles à Paris. C’était en 1975. de nombreux sourds et aveugles réunionnais connaissent cette ancienne directrice du centre de la Ressource etancienne professeur spécialisée à l’institut Nancy.

Nassimah Dindar, femme politique de l’année

Une des grandes surprises, c’est la nomination de Nassimah Dindar au rang de femme politique de l’année 2004. Malgré tout l’antipode de leur conception politique, c’est le président Vergès en personne qui lui remettra son prix. Élue l’année dernière à la présidence du Département, cette professeur de lettres est avant tout une grande militante en faveur de la place de la femme dans la société. Paul Vergès lui-même le soulignait. Nassimah Dindar est émue. "Si il fallait vous décerner un prix, monsieur le président, il faudrait vous remettre le prix de l’ouverture".
Paul Vergès rappelait l’égalité entre l’homme et la femme, une grande leçon de civilisation. Que serait l’homme sans la femme ? Les actrices de Ze Tantines, Alice, Sarah et Colette présentaient deux saynètes, dont la chute de la deuxième histoire est éloquente. La femme est d’abord la mère de l’homme. Elle porteuse de la vie. Si elle ne connaît pas la liberté, comment l’homme peut-il la connaître, cette liberté ? Après le déni de la femme noire au cours des années cruciales de l’esclavage, il incombe à l’homme réunionnais de ne pas soumettre la femme réunionnaise à un tel sort.
"Il n’y aura jamais de civilisation, tant que la femme n’aura pas conquis sa totale égalité", dira le président Vergès, sous les applaudissements de l’assemblée de femme. La Région compte un personnel majoritairement féminin. 4 vice-présidentes à la tête de la Région. C’est déjà une bataille gagnée, mais il reste une guerre à finir. Quant finira-t-elle ? Le jour même de la Journée internationale de la femme, à l’heure des grands préparatifs, nous apprenons par voie de presse, qu’un homme de 73 ans avait tué sa femme de 69 ans. La femme n’a pas fini de se battre. Les hommes devront se battre ensemble dans cette lutte pour la civilisation.

Bbj


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