Violences conjugales et familiales : comment en sortir ?

Coups et blessures entre ennemis intimes

18 octobre 2006

Quoi faire quand la vie commune devient un enfer ? Quand un compagnon décharge sa propre détresse dans des coups répétés et qu’il n’existe plus aucune sérénité au sein de la famille ? Comment protéger ses enfants ? Et que se passe-t-il quand, après avoir vaincu de nombreux obstacles, une femme battue se décide ou se résigne à porter plainte ? C’est ce « parcours d’une plainte » pour violence conjugale que nous avons essayé de retracer avec des femmes en détresse et un médiateur de justice bénévole.

Peu de structures peuvent accueillir les femmes battues et leurs enfants à La Réunion. Rose des Bois à Saint-Denis, la pension des Pluies d’Or à Saint-André offrent un toit provisoire à des femmes qui ont quitté leur domicile pour fuir la violence d’un compagnon devenu un bourreau, ou un boulet.

Saint-André, au local de Momon Papa lé la, l’une des associations de soutien aux femmes maltraitées, Margaret R., 34 ans et Céline R., 35 ans. Deux personnalités et deux parcours très différents, réunis par la volonté de fuir une situation familiale violente.
Il aura fallu près de dix ans à Margaret pour se sortir d’une union libre qui s’est révélée au bout d’un an être une prison, une impasse, la fin sans issue d’un malentendu avec un homme qui se met à boire et dont elle découvrira trop tard qu’enfant, il était battu par sa mère. Dix ans de harcèlement, fuite, menaces et coups... A sa troisième plainte, un procureur demandera qu’on trouve un abri pour Margaret. Elle retrouve aujourd’hui le goût de vivre avec l’association Momon Papa Lé La, où elle s’active en bénévole.
A 35 ans, Céline a besoin d’un refuge. Elle n’arrive pas à imaginer pouvoir vivre seule avec sa petite fille de 4 ans. Premier mariage et deux enfants, qui ont 7 et 5 ans quand elle divorce ; puis, de 1999 à 2004, elle traverse une liaison difficile, dont elle met cinq ans à se sortir. « On a honte de se trouver dans cette situation... tellement honte qu’on n’ose pas en parler », dit-elle en décrivant l’isolement où elle s’est trouvée. La honte de l’autre, la peur pour soi et pour la fillette née en 2002.
Toutes deux ont porté plainte : Margaret, trois fois ; Céline, après une main courante qui a consigné des coups de son deuxième compagnon, a vu cette année sa plainte enregistrée à la gendarmerie de Bras-Panon pour « menaces de mort » et « tentative d’homicide ». Fait peu banal, l’homme violent n’est pas son compagnon, mais celui de sa fille, âgée aujourd’hui de 16 ans et mère d’un enfant de 9 mois, dont le père (20 ans) a lui aussi un comportement violent.

Saint-Denis, les Camélias. « Le premier obstacle est le double sentiment de honte et de culpabilité exprimé par les femmes battues par leur conjoint. C’est curieux, mais c’est ce qu’elles expriment ». Daniel Pellegrin, médiateur pénal, intervient comme bénévole auprès de l’AMAFAR depuis avril de cette année, en application d’une Convention passée entre l’association et le Parquet de Saint-Denis. Il prodigue écoute et soutien psychologique, « pour dédramatiser et redonner confiance ». Ancien commandant de Police, il estime que ce qu’il fait aujourd’hui n’est pas très éloigné de ce qu’il faisait quand il était policier. Ses explications sont précieuses pour comprendre les obstacles dressés sur la route d’une femme battue et comment les vaincre.

P. David


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