Harcèlement au travail

David fait face

20 juin 2012, par Jean Fabrice Nativel

Sous sa véranda de l’Est, David, dans l’anonymat, confie sa situation de harcèlement au travail. Elle est le fait d’un collègue.

David, brièvement, dites-nous quel est votre emploi.

- Depuis 4 ans, je suis l’un des employés de bureau d’une entreprise de prestations de services. Je fais partie d’une équipe d’une quarantaine de personnes. On est polyvalents, rédige les courriers, enregistre les factures, accueille divers interlocuteurs, etc. Ce métier me plaît, il m’a permis de me réaliser. Cependant, j’ai dû faire preuve de détermination et m’affirmer au jour le jour.

« Cet état d’esprit plaît et déplaît » 

Expliquez-nous cela.

- L’accueil des salariés à ma présentation a été chaleureux ! Et tout de suite, je me suis fondu au sein des collègues. J’ai la formation (Bac +4) et l’expérience requises (10 années) pour ce poste. Ce qui me guide avant tout, c’est la conscience professionnelle et le travail bien fait. Pour y parvenir, je me perfectionne, me remets en cause. Cet état d’esprit plaît et déplaît.

Mais encore ?

- Avec des collègues, on s’épaule, se complète, se conseille. Par exemple, avant l’envoi d’un courrier, je demande régulièrement une relecture. Un jour, un collègue, sur un ton agressif, me lance que je suis « un incapable ». Sur ce, je lui demande des explications. Il me répond : « Tu te fais aider et on en a marre de tes manières. Avant ton arrivée, tout allait bien ». Surpris, je me suis fait tout petit.

« Des relations devenues insupportables » 

Et ensuite ?

- Avec ce collègue, les relations sont devenues insupportables. Il ne cessait de me brimer : « Tu ne sais pas faire ceci ou cela, comme la rédaction d’une lettre de relance » et ainsi de suite. « Ou lé in moukat », m’a-t-il lancé alors que j’allais prendre l’ascenseur. Je me suis maîtrisé et lui ai répondu : « Ces propos s’adressent à toi ». Il est entré en colère, je pensais qu’il allait me frapper.

Trois mois durant

Combien de temps cela a duré ?

- Au moins 3 mois jusqu’au jour où je me suis confié d’abord à mes collègues puis à mon employeur. Sa méprise envers moi, il le faisait en l’absence des personnes citées précédemment. Elles ont constaté que j’avais pris un peu de distance envers eux. Ils étaient cependant loin de penser ce que je vivais.

Comment ont-elles réagi ?

- A mon grand étonnement, elles ne semblaient pas surprises. Je ne suis pas le premier à me plaindre. A ce poste, j’ai succédé à une collègue. Elle a vécu en plus du harcèlement moral, le sexuel. Sauf qu’elle n’a pu le prouver. Tout se passait sournoisement et sans la présence du personnel. J’ai appris qu’elle avait dû démissionner.

Une discussion avec mon employeur

Et vous ?

- Je me suis confié à mon employeur. Il a convoqué le collègue concerné. Bien entendu, il a nié ce que je lui reprochais. Mon responsable a pris très au sérieux ce que je lui ai dit. Il y a eu des antécédents et pas seulement envers cette collègue. Des sanctions ont été prises, notamment une procédure de licenciement. Pour ma part, j’envisage de porter plainte.

David s’est forgé tout seul. Face à cette situation de harcèlement, il a su faire preuve de détermination. Cette injustice, il a pu la dénoncer. Mais combien ne peuvent le faire ?

Jean-Fabrice Nativel 

Agir

• Quelles sanctions à l’encontre de l’auteur de harcèlement moral ?

Tout salarié ayant procédé à des agissements constitutifs de harcèlement moral est passible d’une sanction disciplinaire (qui peut aller jusqu’au licenciement pour faute grave). Par ailleurs, les faits de harcèlement moral sont punis d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 15.000 euros. La juridiction peut également ordonner, à titre de peine complémentaire, l’affichage du jugement aux frais de la personne condamnée dans les conditions prévues à l’article 131-35 du Code pénal et son insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu’elle désigne. Ces frais ne peuvent excéder le montant maximum de l’amende encourue.

Aux termes de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 (JO du 28), est assimilé à une discrimination tout agissement lié à l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, la religion, les convictions, l’âge, le handicap, l’orientation sexuelle ou le sexe, et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, intimidant, dégradant, humiliant ou offensant.

• Quels recours ?

Les salariés victimes de harcèlement moral peuvent intenter une action en justice auprès du Conseil de prud’hommes pour faire cesser ces agissements et demander réparation du préjudice subi. Le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. 
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Toute organisation syndicale représentative dans l’entreprise, avec l’accord écrit du salarié, peut engager à sa place une action devant le Conseil de prud’hommes et se porter partie civile devant le juge pénal. Le salarié peut toujours intervenir à l’instance ainsi engagée et y mettre fin.

(Source : http://travail-emploi.gouv.fr/informations-pratiques,89/fiches-pratiques,91/sante-conditions-de-travail,115/le-harcelement-moral,1050.html)


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