Compte secrets de l’ancien dictateur chilien dans des banques américaines

Deux plaintes contre Pinochet

23 juillet 2004

Quelques jours après les révélations, par une commission sénatoriale américaine, de comptes bancaires secrets de Pinochet aux États-Unis, deux plaintes ont été déposées au Chili contre l’ancien dictateur. La première au nom de l’État, remonte à mardi. Le Conseil de défense de l’État chilien, chargé de veiller aux intérêts de l’État, a déposé un " recours " devant la cour d’appel de Santiago, sans spécifier d’ailleurs le délit incriminé. Mais, pendant le week-end, la présidente de ce conseil, Clara Szcaranski, avait indiqué que la situation pourrait correspondre à une évasion fiscale.
Elle avait notamment expliqué au quotidien “El Mercurio” avoir nommé une équipe d’inspecteurs dont la mission était de déterminer l’origine de l’argent (4 à 8 millions de dollars) déposé sur six comptes auprès de la banque Riggs à Washington. Laquelle banque est soupçonnée d’avoir créé des sociétés écrans aux Bahamas pour aider ce prestigieux client. La période mise en cause, 1994-2002, inclut les 18 mois pendant lesquels le général Pinochet était retenu prisonnier à Londres, alors que le juge espagnol Baltasar Garzon essayait d’obtenir son extradition. Des transferts de fonds auraient été alors effectués en dépit du gel des avoirs de l’ex-dictateur.
Ce recours de l’État chilien fait suite au dépôt, également mardi, d’une plainte pour "fraude" par deux avocats, auprès de la même Cour d’appel de Santiago. "Il est nécessaire que la justice chilienne enquête sur les activités illicites commises par Pinochet", a expliqué l’avocate Carmen Hertz, en déposant le recours, avec Alfonso Insunza. Peu après, la cour d’appel a désigné le juge Sergio Munoz pour décider s’il y a lieu de poursuivre ou non Pinochet. Si le magistrat accepte la plainte, il devra demander à ce tribunal de priver Pinochet de son immunité d’ancien chef d’État.
Cette immunité avait été levée fin mai dans le cadre d’une autre enquête sur l’implication de l’ex-dictateur dans l’opération Condor, plan d’élimination systématique des opposants aux dictatures latino-américaines des années 1970-1980. Mais les avocats de Pinochet avaient à leur tour engagé une action devant la Cour suprême pour faire classer l’affaire.
C’est cette instance qui avait classé sans suite en juillet 2002 le premier procès ouvert contre l’ancien bourreau (à l’initiative d’un groupe de sept avocats dont Hertz et Insunza) pour une partie des 3 000 meurtres et disparitions dont est responsable sa dictature (1973-1990). Le procès avait été classé parce que les magistrats de la plus haute juridiction chilienne avaient estimé que Pinochet, quatre-vingt-huit ans, souffrait de démence légère. Le vieux dictateur échappera-t-il encore une fois à la justice ?
(Source “l’Humanité”)


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