Grand d’angle d’Yvon Virapin

Droits du travail : L’Union européenne critiquée

25 avril 2007

Dans cette campagne électorale, il est beaucoup question de l’Europe. Son élargissement, ses directives, son fonctionnement, les répercussions de la politique communautaire sur la vie des Français, autant de thèmes qui suscitent débats et controverses. Il faut dire que cette Europe élargie, encore en construction avec l’arrivée récente de nouveaux pays, n’est pas exempte de critiques dans bien des domaines. Ainsi, en matière de droits du travail, l’Union européenne (l’UE) est vivement dénoncée par la Confédération Syndicale Internationale (CSI). Dans un rapport récent, la CSI invite l’UE à s’appliquer à elle-même les règles concernant les droits fondamentaux du travail : droits syndicaux, non discrimination et égalité de rémunération, interdiction du travail des enfants et du travail forcé.

L’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) veille sur les politiques commerciales de l’Union européenne qui, avec 20% du commerce mondial, représente le bloc économique le plus important au monde. Celle-ci constate que dans ses accords commerciaux avec les pays tiers, l’UE impose régulièrement des clauses de respect des normes de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Ces règles figurent dans 8 conventions qui portent sur les droits fondamentaux du travail. Or, la Confédération Syndicale Internationale a publié fin février un rapport intitulé “Les normes fondamentales du travail reconnues internationalement dans l’Union européenne”. Le rapport révèle que l’UE manque d’exemplarité, en particulier au niveau des 12 nouveaux entrants : ainsi, l’Estonie et la République tchèque n’ont toujours pas signé l’ensemble des conventions. Les principes sont inscrits dans les législations, mais l’examen des pratiques fait apparaître de nombreuses entraves dans des pays comme la Bulgarie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie et la Slovaquie. Mais les 15 pays les plus anciens n’échappent pas non plus aux critiques en raison notamment des limitations mises à l’exercice du droit de grève. En Allemagne, les fonctionnaires ou travailleurs de secteurs dits sensibles sont exclus de ce droit. On assiste à une multiplication des recours judiciaires pour interdire des grèves (Belgique, Grèce...), ainsi qu’à une complexification des démarches (règles de négociations collectives, de préavis). En outre, le rapport note que les sanctions sont insuffisantes à l’encontre des comportements anti-syndicaux.

En ce qui concerne l’égalité de rémunération, les femmes gagnent jusqu’à 40% de moins que les hommes, surtout dans les pays de l’Est de l’UE. Par ailleurs, elles sont partout plus souvent au chômage, avec des temps partiels contraints et elles restent sous-représentées dans les emplois supérieurs. Les discriminations concernent toujours fortement les homosexuels, les personnes handicapées, les malades (SIDA). Par ailleurs, le type de discriminations ethniques varie selon les pays. Ainsi, pour la France, les discriminations fondées sur l’origine ethnique et l’ascendance nationale sont particulièrement dénoncées : le taux de chômage des jeunes diplômés de ce groupe est 4 à 5 fois plus élevé que les autres jeunes diplômés. Mais à l’échelle européenne, ce sont les ROM (Région d’Outre-mer) qui sont les plus discriminés avec un taux de chômage nettement plus élevé que tous les autres groupes ethniques.

Enfin, l’exploitation économique des enfants par la violation de l’âge minimum légal et travail forcé existent dans beaucoup d’États de l’UE. Les enfants travaillent de manière informelle dans les entreprises agricoles et familiales (Bulgarie, Roumanie, Pologne, Italie, Portugal). Mais ils subissent aussi le travail forcé à travers le service domestique, la mendicité, la prostitution, le tout favorisant la délinquance. Le rapport dénonce également le travail forcé des prisonniers mis au service d’entreprises privées (Pays-Bas).

Les conclusions du rapport invitent l’UE à respecter ses propres engagements et à mettre réellement en pratique les principes qu’elle encourage par ailleurs dans sa politique commerciale.


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