La députée visite le centre de détention du Port

Huguette Bello : ’Des conditions inhumaines de détention’

10 septembre 2004

’Ici, c’est un chaudron dans lequel on met pêle-mêle des personnes condamnées à de courtes peines et d’autres à de longues peines. Il en sort des âmes mortes ou de grands criminels’, lâchait à la presse la députée Huguette Bello à l’issue de sa visite du centre de détention de la Plaine des Galets. ’C’est une véritable cocotte-minute’, ajoutait un syndicaliste.

Dans le petit local affecté aux organisations syndicales, les commentaires vont bon train hier matin. Huguette Bello, en sa qualité de député, n’en est pas à sa première visite dans une prison. Pour celle de La Plaine des Galets, c’est la seconde fois. Elle a déjà également visité les maisons d’arrêt de Saint-Denis et de Saint-Pierre, "même si ce n’est pas politiquement correct de visiter des prisons", ironise la députée, pour qui règnent dans ces geôles "le caïdat et la violence en même temps qu’une grande misère et une détresse humaine".
De cette visite et de la discussion qui s’en est suivie avec les représentants de la CGT-pénitentiaire et de l’Union fédérale autonome pénitentiaire (UFAP), il ressort que la situation est grave, ce qui n’est hélas pas nouveau. Il ne faut pas compter avant 2008 pour voir la mise en service de la nouvelle prison de Saint-Denis, à Domenjod et pas avant 2015, dans le meilleur des cas, pour que le cloaque infâme qui tient lieu de maison d’arrêt de Saint-Pierre soit remplacé.

Un concentré des problèmes de la société

Si l’univers carcéral est par définition une sorte de vase clos, en revanche, on y retrouve en concentré tous les problèmes que l’on retrouve ailleurs dans la société. Ainsi, la disparition des emploi-jeunes touche aussi les prisons.
Comme l’explique un travailleur social, un dispositif d’information à destination des familles des détenus avait été mis en place avec un emploi-jeune dont le contrat arrive bientôt à échéance. "Encore un secteur sinistré, un de plus" constate ce travailleur social.
Autre sujet de préoccupation : la mobilité des... prisonniers. Comme le prévoit le Code de procédure pénale, les détenus condamnés à de longues peines doivent bénéficier d’une cellule individuelle ainsi que d’un certain nombre de mesures, notamment un travail occupationnel, ce qui n’est pas le cas à La Réunion. Résultat des courses : "on incite ces détenus à aller purger leur peine dans un centre de détention en Métropole. On leur fait miroiter des choses, c’est une sorte de volontarisme forcé. Pourquoi ne pas créer ces conditions à La Réunion ? Sommes-nous Français à part entière ou entièrement à part ?", s’interrogent les syndicats.

Calamiteux

Ce n’est un mystère pour personne : le taux d’occupation des prisons réunionnaises est calamiteux. On a dépassé depuis fort longtemps la saturation. "La France fait partie des 55 pays qui ont été épinglés par l’observatoire international des prisons" rappelle Huguette Bello.
La députée rappelle également que la France a été condamnée pour "traitement dégradant" par un comité contre la torture. "Et ce n’est pas le fait du personnel", souligne Huguette Bello qui souhaite qu’un tel comité soit également mis en place à La Réunion.
Nul doute qu’il y aurait du pain sur la planche, lorsque l’on voit ce que la députée qualifie de "conditions inhumaines d’incarcération" et pour lesquelles elle "conseille et incite les Réunionnais à s’adresser directement à l’observatoire des prisons".
Après cette nouvelle visite d’un établissement pénitentiaire, la députée de la seconde circonscription ne mâche pas ses mots : "la situation à La Réunion est tout simplement scandaleuse. Ce n’est pas, comme le croient certains, un hôtel de luxe. Prévenus et détenus de longue peine sont mis ensemble. Ce matin, j’ai vu dans une même cellule quelqu’un condamné à 30 ans et un détenu condamné à une peine de deux ans !"
De son côté, Marseille Dijoux, de l’UFAP, insiste : "si nous demandons du personnel supplémentaire pour faire face aux charges de travail, et avec l’arrivée du bracelet électronique, ce n’est pas pour faire de la répression. Mais surtout pour être davantage disponible, pour être à l’écoute des détenus, c’est nous qu’ils voient en premier. En fait, nous sommes les éternels oubliés. Vu de Paris, l’Outre-mer, c’est un ensemble dont certains ne savent pas grand-chose. La Réunion, la Nouvelle-Calédonie, les Antilles, pour eux, c’est du pareil au même..."

S. D.


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