Marche Blanche

Il ne faut pas frapper les femmes

22 novembre 2004

Humiliées, battues, violées, menacées, tuées : ça suffit ! Et les femmes disent “assez”. La Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes sera l’occasion d’une seconde Marche Blanche à La Réunion dimanche prochain à Saint-Denis du Jardin de l’État au Barachois.

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Sophie, Florence, Ingrid, Marie-Céline... Chaque jour, la liste des victimes de la violence contre les femmes s’allonge. La ligne de SOS Violence (0262.30.12.02) est sans cesse sollicitée.
Dans le cadre de la Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes, instituée en 1999 par une résolution de l’ONU, la Fédération régionale de solidarité contre les violences (FRSCV) et les familles de victimes invitent chaque famille à se joindre à la Marche Blanche, dimanche 28 novembre 2004 à Saint-Denis.

Dimanche, 9 heures à Saint-Denis

Céline Lucilly, présidente de l’association, explique l’esprit de cette marche : "Vêtus de blanc et porteurs de fleurs blanches ainsi que de coupures de presse ou de photos de victimes, nous nous rendrons ensemble silencieusement du Jardin de l’État au Barachois pour y déposer le tout ainsi qu’une motion en Préfecture". Des témoignages et des prises de paroles finaliseront cette marche. Le rendez-vous est fixé à partir de 9 heures au Jardin de l’État, pour un départ à 10 heures. La marche sera suivie d’un pique-nique sur le front de mer.
Seize associations se sont réunies pour la réussite de cette opération citoyenne. Pour la présidente de l’Union des femmes réunionnaises (UFR), Huguette Bello : "On croit qu’il n’y a plus de problème, que les femmes on tout obtenu alors que le corps de la femme est une marchandise qui se négocie sans état d’âme. La violence masculine est l’une des premières raisons de décès chez les femmes. Il y a une urgence civile et politique".

Loin de l’égalité et du respect

Cette violence à l’égard des femmes est source de souffrances intolérables. "La brutalité conjugale est la plus universelle des violences, la violence domestique se termine trop souvent par un meurtre. Nous n’en pouvons plus de pleurer les disparitions de ces femmes assassinées par un homme violent", poursuit Huguette Bello.
La Réunion détient de tristes records en matière de viol et de violence à l’égard des femmes. Blessures tant physiques que psychiques, qui vont de l’insulte à l’agression sexuelle, dans l’espace privé, public ou professionnel. Par peur des représailles, nombreuses sont celles qui n’en parlent pas, qui ne portent pas plainte.
"La femme reste maintenue en bas, la force prime, nous sommes loin d’avoir conquis l’égalité et le respect", constate la députée, expliquant aussi le sens de cette marche : "dire notre émotion, notre indignation devant ces crimes commis à l’encontre des femmes pour alerter tous les pouvoirs, sur le besoin urgent d’accroître l’information dans les collèges, d’améliorer l’accueil dans les commissariats, d’aider les associations". Elle réclame aussi un traitement psychologique du violeur, demande que la surveillance des lieux de randonnée soit accrue.
Toutes les associations exigent que l’image de la femme ne soit plus utilisée pour servir les préjugés sexistes, elles attendent des maires, des procureurs, qu’ils empêchent la propagation des représentations dévalorisantes et pornographiques.

Un vrai numéro vert

Elle sollicite une véritable action politique pour mettre en place un vrai numéro vert d’écoute et de conseils, créer des centres d’accueil et d’hébergement pour toutes les femmes en détresse. Plus que tout, elles veulent que la loi soit appliquée rigoureusement et que des mesures soient prises pour qu’en aucun cas, l’homme violent reste au domicile conjugale tandis que la mère et ses enfants vivent dans la rue.
Elles s’élèvent contre le laxisme vis-à-vis de la prostitution à laquelle des femmes immigrées sont réduites sous la contrainte. Elles estiment que des mesures adaptées doivent permettre leur réinsertion sociale.
L’association AMARE (Association de la mère à La Réunion) se bat pour l’hébergement de jeunes femmes victimes de violences intrafamiliales, pour leur offrir un lieu de vie, de protection. Cette rupture, difficile, peut les aider à se reconstruire. Des hommes travaillent dans ces structures et participent à changer l’image qu’elles ont de l’homme. Il est aussi possible d’éduquer les petits enfants à jouer en quittant les relations de violence. Une des notions importantes, après l’éclatement du couple reste la parentalité.

Tout le monde est concerné

Des proches de Florence, disparue et victime de violence, ont du baume au cœur à voir le soutien des associations et insistent pour dire combien cette action est importante : "Chacun doit être solidaire, tout le monde peut être concerné", confie sa mère, Jacqueline.
Céline Lucilly estime que l’Éducation nationale doit jouer un rôle plus important pour un meilleur vivre ensemble, avec les familles. Or aucune campagne n’a encore été menée pour que ces violences cessent, pour en finir avec la culpabilisation des victimes réduites au silence de la honte, pour en finir avec l’impunité des agresseurs, pour en finir avec la prostitution. "La violence contre les femmes doit être bannie", clament les présidentes d’associations, ajoutant que "la libération des femmes c’est la libération de tous".

Vers un monde meilleur

Carmen Allié, présidente de Femmes chefs d’entreprises de La Réunion, travaille pour que son association soit le vecteur de ce message dans les entreprises. Monique Couderc, représentante du monde syndical, souligne combien le monde du travail est lieu de souffrances, d’agressions sexuelles, de harcèlement moral. Hier elle lançait un appel particulier pour que la maman d’Ahmed retrouve son fils, expulsé de La Réunion.
Le Groupe de dialogue inter-religieux de La Réunion apporte son soutien à la Marche Blanche de dimanche prochain et souhaitent sensibiliser toutes les communautés. La lutte pour la fin des violences à l’égard des femmes fait encore apparaître les dommages collatéraux de l’alcoolisme et pose le problème des armes en vente libre, non contrôlées.
Dernière à prendre la parole, la jeune Lou souhaite que tous, même les plus jeunes, s’associent à cette Marche Blanche vers un monde meilleur.

Eiffel


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