
Assemblée générale de la section PCR de Sainte Suzanne
2 juillet, parC’est dans une ambiance chaleureuse avec un état d’esprit fraternel que les délégués de la Section PCR de Sainte-Suzanne se sont réunis en (…)
24 juillet 2007
Marie-Claire Arel est chagossienne. Installée depuis peu à l’île de La Réunion, elle nous raconte le dur combat pour la reconnaissance du Chagossien et de son droit à la terre. Sa mère est aujourd’hui installée en Corse, alors que nombre des siens sont restés exilés à Maurice. Elle recherche du travail, comme femme de ménage.
Vous êtes chagossienne. Vous venez de quelle île ?
- Marie-Claire Arel. Moi, je suis de Peros Bhanos. J’y ai vécu assez longtemps, après je suis allée vivre avec ma famille sur l’île de Diego Garcia, pendant deux ou trois ans. J’ai quitté cette île vers l’âge de 8 ans.
Vous avez 50 ans cette année, vous aviez 8 ans quand vous êtes forcé de quitter Diego Garcia pour l’île de Maurice. Cela fait aujourd’hui 42 ans donc que vous n’avez pas revu votre archipel des Chagos, pour raison militaire. Quelles souvenirs vous reste-t-il de votre archipel ?
- Je n’ai pas vraiment de grands souvenirs. Il me reste les souvenirs d’une enfant de huit ans. J’ai la nostalgie de l’endroit où j’habitais. Quand je suis venue à Maurice, après une période, cela m’a manqué. J’avais envie de retourner chez moi, dans mon île. Mais je ne pouvais pas y retourner, cela me manquait.
Pourquoi vous ne pouviez pas ?
- On était venu en vacances à Maurice, parce que mon père était mauricien, et nous allions chez mes grands-parents du côté de mon père. Comme il y avait un va et vient entre Maurice et les Chagos, tout le monde venait passer leurs vacances. Et quand il y avait des malades aussi, ils allaient se soigner à Maurice, et après ils revenaient sur les Chagos. Ils pouvaient rester ainsi à Maurice, un mois, deux mois. Quand ils décidaient de revenir, ils le faisaient. Quand ma mère fit les démarches pour retourner au Chagos, on lui a fait savoir que non, ce n’est plus possible de regagner l’archipel, parce que c’était vendu.
L’île est vendue. Par qui ?
- Nous, on n’a pas su par qui et pourquoi l’île était vendue. On nous a informé que c’était comme ça. A cette époque, j’étais enfant, je ne savais pas ce que c’était que vendu. Et puis, au fur et à mesure, en grandissant j’ai appris pourquoi c’était vendu. J’avais aussi mes cousins et cousines qui étaient là-bas. Tous, on a appris comme ça qu’il fallait quitter l’archipel.
Des familles séparées
Vous étiez scolarisé à Diego Garcia. Tous les enfants de l’école se sont donc retrouvés à Maurice ?
- Une partie à Maurice, une partie aux Seychelles.
Et vous avez une partie de votre famille aux Seychelles, d’autres à Maurice.
- Moi, pas vraiment. Les cousins et cousines de ma mère se sont retrouvés aux Seychelles. Mais ma famille la plus proche était sur Maurice.
Et lorsque vous êtes arrivés à Maurice, comment vous êtes-vous habitués à ce nouveau cadre de vie ? C’était facile pour vous ?
- Pas du tout, c’était très difficile. Parce que premièrement, nous n’étions pas les bienvenus à Maurice. A cette époque-là, les Mauriciens disaient que nous étions des îlois.
Maurice aussi est une île.
- Il faut croire qu’à cette époque, l’île Maurice n’était pas une île, sûrement un pays.
D’ailleurs, l’île Maurice est devenue indépendante, par cette vente de l’archipel des Chagos.
- Voilà !
Mais, aviez-vous un collectif de chagossiens pour faire entendre votre voix ?
- Avant Olivier Bancoult, il y avait Fernand Mandarin qui s’occupait de la cause des Chagossiens, mais ça n’a pas marché. Il n’était pas transparent comme Olivier Bancoult.
Cette lutte, petite, l’avez-vous vécu ?
- A l’époque, je n’avais pas cela en tête. Mais je connaissais des personnes comme Charlésia, qui vit maintenant en Angleterre.
Et vous, à l’école, à Maurice, comment viviez-vous tout cela ?
- A l’école, c’était difficile, c’était dur. Pour un enfant chagossien de huit ans, c’était difficile de se faire des amis. On n’était pas intégré à la façon de vivre des Mauriciens. Là où j’étais à Diego Garcia, ce n’était pas comme à l’école de Maurice.
Une intégration difficile
Et pour les adultes, notamment en matière de travail. Trouvaient-ils facilement un emploi à Maurice ?
- Beaucoup n’ont pas pu trouver du travail, parce que le travail qu’ils faisaient sur l’archipel des Chagos n’était pas comme à Maurice. A Diego et à Peros, le travail était autour de la mer, et la production de coco.
Décrivez-nous un peu la vie aux Chagos. Quelle était le quotidien d’un Chagossien, sa journée de travail ? Ils étaient systématiquement pêcheurs ?
- Non, ils vont à la pêche pour eux, pour se nourrir. Mais le travail là-bas, les hommes ramassaient des cocos, pour faire de l’huile de coco. Et puis on retrouvait des charpentiers, des menuisiers, mais pas comme à Maurice.
Et donc, ces personnes-là, sitôt arrivées à Maurice, comment vivaient-elles s’ils n’avaient pas de travail ?
- Ils mangeaient dans les poubelles des gens. Moi, comme mon père était mauricien, heureusement j’avais un peu de chance. Mais, les autres non. Ma mère n’a pas travaillé, mais après la mort de mon père, elle a trouvé du travail. Mais là, c’était encore plus dur, parce qu’elle n’avait jamais travaillé à Maurice. Mon père travaillait à la municipalité de Vacoa-Phoenix.
Et aux Chagos, il faisait quoi ?
- Il était boutiquier.
Et ceux qui n’ont pas trouvé de suite du travail, ont-ils été indemnisés ?
- Non. Peut-être de ce qu’ils avaient. Mais aux Chagos, l’argent n’a pas la même valeur qu’à Maurice. C’est des bons, de l’échange, du troc.
Mais, vous n’avez pas été indemnisés par la suite ?
- En 1978, ou en 1979, les Chagossiens ont reçu chacun 790 roupies (15 euros) généreusement octroyés par la Reine d’Angleterre.
Une pauvreté imposée
Est-ce que nous pouvons parler de misère pour les Chagossiens arrivés à Maurice ?
- Beaucoup de misère, parce que, quand les Chagossiens sont arrivés à Maurice, ils n’avaient pas de maison. Ils n’avaient rien. On les a mis dans un bateau et on les a expédiés dans d’autres îles. On les enlève de chez eux, de leur île, on vient les prendre. Sitôt débarqués, on les met dans des maisons dépourvues de portes, de fenêtres, de vitres, pas de lits non plus, pas de meubles, rien. Parce que, quand les Chagossiens sont venus, ils n’ont pas été capables de ramener avec eux leurs affaires. Ils n’en avaient pas le droit. Ils sont venus avec ce qu’ils avaient sur eux, même pas capables de prendre quelques linges. Ceux qui ont pu prendre quelques affaires l’ont fait, mais d’une manière générale, ils sont venus sans rien. Le gouvernement mauricien fut obligé de donner un endroit pour habiter. Une partie est allée à Bois Marchand, une autre à la Baie du Tombeau. Ce sont les poubelles de la Baie du Tombeau et de Bois Marchand, qui les ont nourris. Ils ont fouillé toutes les poubelles pour trouver à manger.
Et actuellement, à Maurice, les familles chagossiennes ou d’origine chagossienne, sont-ils toujours dans cette situation-là ?
- Ah oui, quand tu te rends dans ces deux coins-là, tu trouves des bouts de tôles. Parce que, même si le gouvernement mauricien leur a donné de la terre, ils ont dû vendre cette terre pour pouvoir se nourrir, pour mettre deux linges sur eux. Et ils se sont trouvés plus miséreux que lorsqu’ils étaient arrivés. Parce qu’ils n’ont plus rien.
Et il y a eu des séparations de familles ?
- Il y a des femmes qui vivaient à Maurice, leurs maris avaient été envoyés aux Seychelles, jamais ils ont pu se retrouver. Certains avaient leur mère aux Seychelles, alors qu’ils vivaient à Maurice. Il y a plusieurs cas comme ça. Certains ont pu retrouver leurs familles avec le temps. D’autres étaient déjà morts. Par exemple, des enfants qui sont aux Seychelles, leur mère décède à Maurice, et l’apprennent longtemps après.
Et vous, comment le vivez-vous cette histoire ?
- Moi, je le vis avec beaucoup de colère et de tristesse. Parce que, malgré le fait que je n’avais que huit ans, quand ma mère a perdu mon petit frère et ma petite sœur, c’était vraiment dur pour nous. Quand elle est venue à Maurice, elle est venue avec cinq enfants. Deux sont morts très jeunes, un à 8 mois, l’autre à 3 ans. Quand elle a perdu ses deux enfants, elle avait envie de retrouver sa famille, retourner dans son pays. Mais ce n’était pas possible, parce que c’était ce moment-là où tous les Chagossiens devaient quitter les Chagos, et que l’on empêchait ceux qui étaient déjà à Maurice de se rendre sur leur archipel. Là, mon grand-père, ma grand-mère, mes tantes étaient venues en déportation. Et elle ne pouvait pas revoir sa famille. Tous les jours, elle pleurait, ne mangeait pas.
Un premier retour, et peut-être le dernier
Elle est toujours vivante, votre maman ?
- Oui, elle a 66 ans.
Elle a eu donc l’occasion de retourner sur l’archipel des Chagos ?
- Oui, c’était émouvant. Parce que, quand elle avait quitté les lieux, elle avait laissé toutes ses affaires. Mais quand elle est arrivée, tout était détruit.
Mais il y a des cimetières. Comment ont-ils pu rendre hommage à leurs aïeux ?
- Quand ils sont partis, c’est là qu’ils ont pu enfin nettoyer, faire la messe, après quarante ans qu’ils n’avaient pas revu leurs terres, ils en ont profité pour tout faire. Parce qu’ils ne savent pas quand ce sera encore possible de s’y rendre. Comme ma mère le dit, sa famille, ses grands-parents sont enterrés là-bas et ils ne peuvent rien faire pour honorer les leurs. Ils y étaient en mars 2006.
Vous continuez à mener votre lutte pour votre droit à la terre. Comment les chagossiens ont-ils ressenti de retrouver leur archipel natal ?
- C’était bien, ils étaient contents, cela leur a fait plaisir. Ceux qui étaient plus âgés que ma mère, ils étaient contents, parce que peut-être c’était la dernière occasion. Mais ils voudraient retourner vivre sur leur île. Mais, ils en sont privés.
Mais ça ce n’est pas possible ...
- Ca je ne le sais pas hélas !
Vous pensez qu’un jour le peuple chagossien pourra retourner chez lui ?
- Oui, si vraiment nous avons la même stratégie pour faire le nécessaire. Avec la force, nous sommes capables.
L’injustice royale
Parce que la Reine a émis son droit de veto pour interdire aux Chagossiens l’accès à leurs îles.
- Retourner oui, mais quand je ne le sais pas. Et la Reine, elle serait contente que quelqu’un décide de lui faire quitter sa terre ? Ça lui ferait plaisir ?
Depuis 40 ans, les Chagossiens entreprennent leur traversée du désert, sans même pouvoir entrevoir la terre promise. Certains sont aux Seychelles, d’autres en Angleterre, quelques-uns à La Réunion, beaucoup à Maurice. Est-ce que tous les Chagossiens peuvent se réunir pour mener une lutte commune ensemble ?
- Oui, c’est certain.
Et que pensez-vous du dernier jugement, donné en faveur des Chagossiens ?
- Ce dernier jugement disait « d’accord, les Chagossiens ont le droit de retourner sur leurs îles ». Donc, c’est bon. Mais, la Reine dit « Non, ce n’est pas possible ». Moi je trouve cela injuste. Comment peut-on dire oui un coup, et après dire non, parce que c’est elle la Reine.
Depuis l’âge de 8 ans jusqu’à aujourd’hui, vous n’avez jamais revu votre île ?
- Non.
Et vous disiez que cela vous ronge de l’intérieur ?
- Oui. Le dernier jugement, un peu comme l’équivalent de la cour de cassation, devrait bientôt être prononcé.
Pour l’heure, c’est comme un vase en terre qui se bat contre le pot de fer.
- C’est cela même.
Propos recueillis et traduits du créole mauricien par Babou B’Jalah
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Messages
2 août 2007, 20:49
marie-claire arele est ma mère est depuis mon enfance je sais la souffrance qu’elle porte sur ses épaules depuis l’age de huit ans moi je trouve que son histoire est vraiment triste ! ces personnes n’ont aucun coeur