Journée internationale pour 
l’abolition de l’esclavage

2 décembre 2006

Message du Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan :
« La Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage est un rappel : l’esclavage n’appartient pas au passé. Aujourd’hui encore, des millions d’hommes, de femmes et d’enfants sont achetés et vendus comme du bétail, réduits en servitude, maintenus en esclavage et utilisés pour certains rites ou pratiques religieuses ou transportés à l’étranger, où beaucoup sont contraints à la prostitution. Toutes ces formes d’esclavage sont ignobles et doivent être éliminées ».

L’esclavage existe encore de nos jours !

L’esclavage ne devrait plus exister de nos jours. Certes l’esclavage systématique de populations entières a été aboli, mais d’autres formes d’esclavage subsistent encore. L’ONU a adopté la Convention pour la répression et l’abolition de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui. A chacun de rester vigilant !
Ce jour du 2 décembre commémore la date anniversaire de l’adoption par l’Assemblée générale des Nations unies de la Convention pour la répression et l’abolition de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui, le 2 décembre 1949. La célébration de cette journée, tout en s’inspirant de l’esprit de l’abolition de la traite des Noirs, actualise le combat permanent contre toutes les autres formes d’esclavage moderne qui privent à de très nombreux êtres humains leurs libertés et leurs droits les plus élémentaires à la dignité, au travail libre, à la vie tout simplement.
Kofi Annan, a dit : « Bien des gens pensent sans doute que ce traité n’a plus lieu d’être au 21ème siècle. Or, il nous faut bien admettre que l’esclavage et la servitude restent encore trop fréquents, cachés sous les noms de travail obligatoire, travail forcé, exploitation de la main-d’œuvre enfantine et traite des êtres humains ».
Aujourd’hui, le travail forcé et l’exploitation sexuelle dont sont victimes les enfants, la prostitution des femmes, le traitement discriminatoire des travailleurs migrants, les agressions quotidiennes contre les droits de l’Homme, la détérioration des termes de l’échange, le poids de la dette inique et injuste ont autant de formes de privation de libertés synonymes d’un esclavage de type moderne.



Servitudes contemporaines partout dans le monde

L’organisation britannique Anti-Slavery International estime qu’il existe actuellement dans le monde 27 millions de personnes adultes soumises à un esclavage dit traditionnel.
Cette forme de servitude peut apparaître à l’occasion du prêt d’une somme relativement modique, dont le remboursement entraîne un endettement qui peut courir sur plusieurs générations et impliquer toute une famille, étant donné la faiblesse - ou l’absence - de revenu versé au travailleur engagé dans ce processus. Ce système d’asservissement est particulièrement répandu en Asie du Sud, en Inde, au Pakistan - où des lois d’abolition de la servitude pour dette furent votées en 1975 et en 1992 -, en Afrique et en Indonésie. En Amérique du Sud, l’enganche (engagement) pèse sur les mineurs de Puno et de Cuzco au Pérou, dans l’Amazonie brésilienne (défrichage des forêts). Plus de 500.000 Haïtiens travaillent comme braceros dans les plantations de République dominicaine dans des conditions signalées depuis longtemps comme similaires à l’esclavage. 
La réduction en servitude concerne une forte proportion de la population en Mauritanie, où l’esclavage fut aboli une nouvelle fois en 1981. Au Soudan, le contexte de guerre civile a permis, pendant les années 1980, la multiplication de milices opérant le déplacement et la mise en servitude de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants dans le Sud du pays. Les courants migratoires de femmes et d’enfants pour la prostitution et/ou le travail domestique sont particulièrement abondants vers le Moyen-Orient et de l’Est vers l’Ouest de l’Europe. Ces trafics concernent également des hommes mexicains et péruviens vers les Etats-Unis pour la vente et le colportage des rues et la mendicité organisée. 





Le travail des enfants

Dans le cas de l’exploitation du travail des enfants, l’emploi du terme “esclavage” est particulièrement conforme à une réalité très voisine de celui des siècles passés. Les moyens de recrutement, les types d’emploi et de rémunération à l’issue d’une vente, d’une cession par la famille ou par kidnappings sont des pratiques fréquentes. L’Organisation Internationale du Travail estime aujourd’hui entre 250 à 300 millions le nombre d’enfants âgés de 5 à 14 ans victimes du phénomène. Une situation liée à l’appauvrissement croissant de certains groupes de population, qui concerne essentiellement les continents en voie de développement (Afrique, Inde, Asie du Sud, Asie du Sud-Est, Amérique centrale et du Sud), mais aussi des pays dits développés où des enfants sont employés sans rémunération pour le travail dans l’entreprise familiale, sur de grandes plantations ou à l’usine.
 Le travail des enfants est particulièrement fréquent dans l’agriculture, dans la domesticité, l’industrie, l’artisanat, pour l’utilisation de machines délicates ou les travaux manuels très faiblement rémunérés. L’emploi d’enfants pour la vente des rues, dans le bâtiment, les briqueteries, les carrières, les mines, la fabrication manuelle d’objets divers est moins connue que leur présence dans les usines de fabrication de balles de base-ball ou de tapis. Les quelque 100.000 “restavek” Haïtiens, jeunes enfants de parents démunis placés chez des familles qui exploitent leur travail, ne connaissent pas un statut plus enviable. Des enfants sont enfin introduits en nombre croissant dans des réseaux de prostitution et sexuellement exploités dans des établissements touristiques. Un dernier cas de réduction en esclavage dénoncé par les O.N.G. est l’utilisation d’enfants comme soldats. Elle concernerait environ 300.000 enfants - âgés de 8 à 17 ans - selon la Coalition to Stop the Use of Child Soldiers. La fragilité de leur statut s’accroît avec le déplacement géographique, la perte de contact avec leur famille, la violence physique, l’isolement, l’impossibilité de communiquer avec l’environnement, la peur et la loi du silence.
Les exemples sont innombrables dans les rapports accumulés par les bureaux de l’ONU, de l’UNICEF, de l’OIT, d’Anti-Slavery International, de la Ligue des Droits de l’Homme et du Comité contre l’Esclavage Moderne (C.C.E.M.).
Le marché de Khartoum, au Soudan, offrait encore récemment des enfants à vendre pour quelques dizaines d’euros. Le 16 avril 1995, Iqbal Masih, 12 ans, qui avait travaillé plusieurs années dans une fabrique de tapis, était assassiné dans la banlieue de Lahore (Pakistan). Il venait de retrouver la liberté avec l’aide du Front de libération des travailleurs en servitude du Pakistan, devenant ainsi un symbole pour la lutte contre le travail des enfants que certains considérèrent comme dangereux pour leurs intérêts.





Lutter contre l’esclavage aujourd’hui

En 1974, l’ONU créait à Genève un Groupe de travail sur les formes contemporaines de l’esclavage dans le cadre de la Commission des droits de l’Homme. Elle ajoutait aux pratiques sociales susceptibles d’être qualifiées d’esclavage, l’apartheid, le colonialisme, l’exploitation des toxicomanes. La Convention des droits de l’enfant adoptée par les Nations unies le 20 novembre 1989 évoque les droits civiques, politiques, économiques et sociaux des enfants (article 32). Le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) initié en 1992 a abouti sur « l’interdiction des pires formes de travail des enfants » (âgés de moins de 18 ans), adoptée à Genève le 17 juin 1999. Entrée en vigueur en septembre 2002, elle concerne l’esclavage, la guerre, la prostitution et le trafic de stupéfiants. 

La Cour Pénale Internationale a défini par le Statut de Rome, en juillet 1998, les actes qualifiés de « crimes contre l’humanité » parmi lesquels « la réduction en esclavage, (...) fait d’exercer sur une personne un quelconque ou l’ensemble des pouvoirs liés au droit de propriété, y compris dans le cadre de la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants ». Le Bilan 2000 du Système des droits humains à l’ONU observait au sujet des « formes contemporaines d’esclavage » que « la servitude pour dettes et le travail servile violent de nombreux droits de la personne, notamment le droit à la santé, le droit à l’éducation, le droit à la liberté et la sécurité de la personne, et le droit de choisir librement son emploi ».
La pauvreté étant considérée comme un « élément favorisant la perpétuation de l’esclavage », la dette internationale apparut comme « facteur aggravant », de même que « la discrimination sous toutes ses formes ».
 La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne signée le 7 décembre 2000 interdit l’esclavage, le travail forcé et la traite des êtres humains (article 5 du Chapitre I - Dignité).
Un rapport de la Commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes du Conseil de l’Europe consacré à « l’esclavage domestique » émet une série de recommandations, en l’absence de qualification de l’esclavage domestique par les Codes pénaux des Etats membres.
En France et en Grande-Bretagne, les O.N.G. interviennent pour porter une assistance sociale et juridique aux victimes introduites dans le pays avec un visa touristique - périmé au terme de 3 mois et le plus souvent subtilisé par l’employeur - afin qu’elles obtiennent, dans un premier temps, un titre de séjour provisoire pour motif humanitaire. En janvier 2002, un projet de loi était adopté par l’Assemblée nationale, visant à « traduire dans la loi certaines des propositions (...) sur les diverses formes de l’esclavage moderne qui visent à combattre la traite des êtres humains et à en reconnaître les victimes ».


Commémorer

Plusieurs journées commémoratives du souvenir de la traite transatlantique et de l’esclavage ont été fixées. Ainsi, la date du 23 août a-t-elle été adoptée par l’UNESCO comme “Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition”.
La nuit du 22 au 23 août 1791 marqua en effet le début de l’insurrection des esclaves de Saint-Domingue qui mena à l’abolition de l’esclavage dans la colonie en 1793-1794, puis, après une guerre que perdirent les troupes de Napoléon Bonaparte en 1803, à l’indépendance de l’île - sous le nom de Haïti - le 1er janvier 1804. 

En France, le 27 avril a été retenu comme date de référence pour la célébration de l’abolition de l’esclavage par le Gouvernement provisoire de 1848. Elle est fixée au 22 mai en Martinique, au 27 mai en Guadeloupe, au 10 août en Guyane et au 20 décembre à La Réunion, dates locales d’entrée en vigueur du décret d’abolition.
 Enfin, le 2 décembre, décrété “Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage”, évoque le 2 décembre 1949, lorsque l’Assemblée générale des Nations unies adopta la Convention pour la répression et l’abolition de la traite des êtres humains.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus