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Le rassemblement du 25 janvier 2025 à La Réunion, contre la délinquance perçue comme “rapatriée” de Mayotte, met en lumière la peur de l’inconnu. Ce phénomène témoigne de la peur irrationnelle de l’autre, alimentée par l’incompréhension et des stéréotypes. Pourtant, cette peur pourrait être transcendée en rappelant les racines communes entre Réunionnais et Mahorais, renforçant ainsi la solidarité et l’unité face aux défis sociaux et économiques.
La peur est une émotion primaire, parfois irrationnelle, qui peut modeler les comportements sociaux, notamment lorsqu’elle se nourrit de l’inconnu. En ce 25 janvier 2025, une centaine de manifestants se sont rassemblés devant la préfecture à Saint-Denis, pour « alerter sur la montée de la délinquance à La Réunion ». Ce mouvement, né sur les réseaux sociaux, traduit une peur partagée par une grande partie de la population de l’île : la peur d’une violence qu’ils associent à l’arrivée d’individus venus de Mayotte, qu’ils qualifient de « délinquants rapatriés ». Un phénomène qui, sous prétexte de dénoncer la criminalité, soulève des questions sur la nature même de cette peur. Car au-delà des chiffres, des actes de violence et des perceptions, cette peur semble avant tout nourrie par l’incompréhension et l’anxiété face à l’inconnu.
L’argument de la violence “transférée” à La Réunion est au cœur du discours des manifestants. Des termes virulents, à peine voilés d’insultes, sont proférés à l’encontre des Mahorais, accusés de déstabiliser le tissu social réunionnais. Un raccourci facile, certes, mais qui occulte les raisons plus complexes qui sous-tendent ce phénomène. Pour Eve Mallet, l’une des organisatrices du rassemblement, « le citoyen n’est pas respecté ». La violence, qui semble augmenter selon les témoignages de certains, serait due à l’arrivée de nouvelles populations, notamment des enfants « livrés à eux-mêmes », qui, selon elle, seraient issus de familles mahoraises et pourraient être responsables des agissements violents.
Cette situation fait partie d’un ensemble plus vaste de problèmes socio-économiques, dont la pauvreté, le chômage et l’isolement des jeunes, qui affectent aussi bien les Réunionnais que les Mahorais. Mais cette violence est-elle vraiment “rapatriée” ou n’est-elle pas plutôt un miroir de la société réunionnaise, où se mêlent des tensions sociales, économiques et historiques ?
Cette peur de l’inconnu, que certains stigmatisent comme une « peur des Mahorais », résonne étrangement avec la réalité historique de l’île. La Réunion, comme l’archipel des Comores, a une histoire marquée par les migrations et les métissages. En effet, les Réunionnais d’aujourd’hui ont, pour nombre d’entre eux, des ancêtres venus des Comores. Les habitants venus de l’archipel des Comores voient leur population augmenter à La Réunion. Jusqu’à présent, ces populations ont été intégrées au fil du temps, avec des liens culturels et familiaux qui les unissent à cet archipel. La peur de l’autre, qui semble surgir aujourd’hui, n’est-elle pas simplement une répétition d’une peur ancienne, un écho de l’histoire, alors même que les Réunionnais partagent un héritage commun avec les Mahorais ?
Pourtant, plutôt que de considérer les Mahorais comme « l’autre », « l’étranger », il est nécessaire de transcender cette peur en reconnaissant les racines communes qui unissent ces peuples. La peur de l’inconnu, une émotion humaine par excellence, doit être dépassée pour laisser place à une solidarité plus large.
Cette histoire commune devrait en effet les encourager à construire un avenir partagé, à accueillir les nouveaux arrivants non pas comme des étrangers, mais comme des frères et sœurs d’un même archipel, unis par une histoire de migration et d’échanges.
L’argumentation de certains manifestants, qui réclament une plus grande sévérité envers les auteurs de violences et une application stricte de la loi, repose sur l’idée que « le citoyen n’est pas entendu ». Cependant, cette demande soulève une question plus large : la réponse à la violence est-elle uniquement répressive ? La violence est le produit d’une multitude de facteurs sociaux et économiques qui ne peuvent être résolus par une simple mesure répressive.
Il est important de comprendre que la violence, bien qu’individuelle dans son expression, est souvent le résultat d’un environnement propice à son développement. La Réunion, comme bien d’autres régions du monde, fait face à des inégalités profondes, notamment dans les quartiers populaires où la précarité règne et où l’avenir des jeunes semble souvent bouché. Ces jeunes, qu’ils soient Mahorais ou Réunionnais, grandissent dans un contexte où l’accès à l’éducation, à l’emploi et à une vie digne est restreint. La violence qu’ils manifestent est souvent un cri désespéré face à un avenir incertain.
La peur de l’inconnu ne doit pas nourrir les préjugés, ni la violence symbolique ou réelle à l’égard de ceux qui sont perçus comme différents. Les Réunionnais, porteurs d’une histoire marquée par les migrations et le métissage, sont appelés à dépasser cette peur pour construire une société plus solidaire et plus juste. La Réunion ne doit pas être une « île à peur », mais une île de fraternité et de solidarité.
M.M.
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