Décès d’Aafifoudine Aboudou

Le combat pour la vérité et la justice continue

19 juillet 2010, par Geoffroy Géraud-Legros

Afin d’honorer la tradition musulmane, les proches et amis d’Aafifoudine Aboudou se sont retrouvés samedi dernier, soit 40 jours après le décès toujours non élucidé du jeune lycéen. L’occasion, aussi, pour les parents de la victime et l’Association vérité et justice pour Aafifoudine (AVJA), d’aller à la rencontre de la population pour demander que toute la lumière soit faite sur ce tragique évènement. Une demande citoyenne, qui n’est pas satisfaite aujourd’hui.

C’est par un geste fort qu’a débuté ce jour de mémoire : après s’être rassemblés à La Chaloupe, des jeunes ont rituellement parcouru l’itinéraire menant à La Possession, au cours duquel a disparu Aafifoudine Aboudou. Pendant ce temps, d’autres se retrouvaient pour un parcours à vélo dans la ville du Port, organisé avec le concours de l’association Trans’Port Vélo Ville (TVV). Rejoints à la mi-journée par des citoyens venus de toute l’île, les deux groupes se sont rassemblés le temps d’une prière au cimetière paysager du Port. De l’après-midi jusqu’au soir, des activités se sont succédé, permettant les échanges entre les participants. Soutenue par la Mairie du Port, des commerçants et plusieurs associations, cette initiative a permis à tous ceux que ce drame a ému de continuer à faire vivre la mémoire du jeune homme. Une manière aussi, pour ces Réunionnais que le racisme et les préjugés prennent trop souvent pour cibles, de se faire connaître du reste de la population.

« Nous ne sommes pas satisfaits »

Objectif atteint : après une journée consacrée à des hommages et à des activités récréatives, les citoyens se sont retrouvés autour d’un repas fraternel, à quelques mètres de la maison où vivaient le jeune homme et sa famille. L’occasion de fêter les nouveaux bacheliers, dont Aafifoudine aurait dû faire partie, mais surtout de dire que le combat pour la recherche de la vérité n’a pas cessé. Car c’est un constat amer que tirent aujourd’hui la famille, les proches du jeune homme et les membres de l’association : « on a l’impression que tout le monde s’en fiche », lâche une jeune fille, évoquant le déroulement de l’enquête. « La famille n’est pas satisfaite, nous ne sommes pas satisfaits », ajoute Rachid Atoumani, l’un des fondateurs de l’AVJA. « Nous avons l’impression que les recherches ne poursuivent que certaines pistes, et en délaissent volontairement d’autres… sans raison valable ». Intervenant spontanément dans la conversation, un jeune homme s’interroge : « pourquoi les gendarmes privilégient-ils les recherches dans l’entourage du jeune homme, et mettent-ils si peu d’empressement à regarder du côté des étudiants, de l’environnement scolaire d’Aafifoudine ? ».

Que s’est-il passé ?

Pour Saylane, le beau-frère d’Aafifoudine, d’importantes zones d’ombres demeurent : « qu’on nous dise combien de personnes sont mortes dans des circonstances similaires, dans des circonstances qui laissent autant d’inconnues ? », demande-t-il, relevant que face aux nombreuses zones d’ombre qui persistent, « les enquêteurs n’ont aucune solution rationnelle »… et de souligner « que tout est loin d’être clair. Vous connaissez les circonstances du décès, très étranges. Mon beau-frère était sain d’esprit. C’était un sportif. C’était un jeune homme studieux : il préparait le Baccalauréat. Et il n’était pas seul : il y avait un encadrement. Alors, que s’est-il passé ? Il faut chercher, chercher encore. Nous attendons beaucoup du résultat des enquêtes ».

« Pour les enquêteurs, l’affaire semble déjà réglée »

« En réalité », renchérit un autre homme, « beaucoup d’entre nous ont l’impression que ceux qui ont la charge de l’enquête préjugent du résultat. Pour eux, il s’agit d’un accident, point à la ligne. Ils n’aiment pas qu’on évoque d’autres hypothèses. C’est comme s’ils faisaient une enquête parce qu’il faut bien en faire une, mais sans faire de zèle… tout simplement, parce que dans leur tête, l’affaire est déjà réglée. Pourquoi ? Est-ce parce l’Académie est mise en cause ? Est-ce pour des raisons politiques ? Ou est-ce parce que nous sommes Comoriens ? ».

Geoffroy Géraud-Legros

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