Baisse inquiétante des signalements de violence intrafamiliale dans un contexte de confinement

Le coronavirus et violences contre les femmes : vigilance renforcée

3 avril 2020

Les mesures sanitaires en vigueur instaurées par le gouvernement sont jugées essentielles par l’État pour faire face à la pandémie du coronavirus. Cependant, la promiscuité, l’isolement sont des terreaux favorables aux actes de violence à l’égard des femmes et des enfants.

Après 15 jours de confinement, une vigilance accrue est de mise, alors que l’Etat constate une baisse préoccupante des sollicitations et des appels aux forces de l’ordre. Il est essentiel d’assurer une continuité du service public pour détecter les nouvelles situations, orienter, accueillir, accompagner, protéger et mettre à l’abri les femmes souhaitant révéler des faits.

I. La situation des violences conjugales constatées

Constat de baisse
Alors qu’il n’y a aucune raison objective d’observer une telle dynamique, la baisse des sollicitations est manifeste et alarmante.
- Selon les forces de l’ordre, le nombre de faits déclarés et le nombre d’interventions sont en diminution.
- La police nationale révèle 38 plaintes pour violences conjugales du 17 au 24 mars 2020, contre 58 cas sur la même période en 2019 (soit une diminution de 34 %).
- La gendarmerie annonce une baisse du nombre d’interventions pour les différends familiaux depuis le début du mois : 117 interventions sur la semaine du 2 au 8 mars, 102 du 9 au 15 mars (-12,8 %), et 99 du 16 au 22 mars 2020 (-2,9 %).
- Les associations d’aide aux victimes signalent qu’elles ne reçoivent quasiment plus d’appels des victimes (une quinzaine de situations traitées en une semaine). Quelques-unes tentent de garder le contact avec les situations en cours de suivi. Les relations sont plus aisées pour les victimes déjà séparées des auteurs. A contrario elles semblent impossibles lorsque la victime se retrouve confinée avec l’auteur.
- Le 115, pour une mise à l’abri d’urgence, informe que le nombre d’appels de femmes victimes de violences se réduit depuis la période de confinement.
- Au niveau de la justice, le nombre d’affaires déclarées pour violences conjugales est également à la baisse.

Ce constat semble en décalage avec ce qui est pressenti. Dans des conditions de confinement, les enfants et les femmes vivent dans un climat de pression permanente, enfermés dans une cohabitation ininterrompue où les motifs pour enclencher les cycles de violences se multiplient.
Cette situation interpelle et peut s’expliquer par deux raisons majeures :

- Soit les victimes pensent que personne n’a le droit de circuler en dehors des motifs règlementaires, et qu’en conséquence, les prises en charge habituelles ne sont pas assurées.
- Soit elles ne peuvent pas, en présence des auteurs de violences, agir et alerter sans craindre pour leur vie.
Conscients que le confinement peut freiner toutes tentatives de révélation des faits, plusieurs mesures susceptibles d’assurer les conditions optimales pour leur porter secours pendant la crise sanitaire ont été déployées.

II. Les mesures locales en vigueur pendant la crise

A. Les acteurs locaux sont encouragés à communiquer le plus largement possible afin d’informer la population, les victimes ne doivent pas se considérer seules face aux agissements violents peuvent toujours solliciter l’aide des associations, des forces de l’ordre, des travailleurs sociaux. Tous les dispositifs de mise à l’abri d’urgence, de protection, d’accompagnement social, juridique et psychologique restent mobilisables pendant le confinement.

B. Les associations d’écoute et d’accompagnement des victimes de violences sont toujours joignables. Les 7 lieux d’accueil, d’écoute et d’orientation, les 2 accueils de jour et le Planning familial sont disponibles pour toutes saisines relatives aux violences domestiques. Elles se sont organisées pour assurer des permanences en continu, des partenariats se sont renforcés entre elles pour accompagner efficacement les victimes.
Le réseau VIF propose d’étendre exceptionnellement son champ d’intervention en offrant aux professionnels du Centre Hospitalier de l’Ouest (urgences, maternité, pédiatrie, en gynécologie obstétrique, etc.), de les aider dans la gestion des dossiers de violences intrafamiliales en effectuant la mise en lien avec les services externes concernés. Ce nouveau partenariat présente le double intérêt d’alléger le personnel soignant et de proposer aux femmes victimes une prise en charge ciblée. Une expérimentation qu’il conviendra de dupliquer dans les 3 autres arrondissements.
Face aux difficultés administratives et financières consécutives à la crise sanitaire, ces associations pourront bénéficier des mesures annoncées par le gouvernement tels les délais de paiement des échéances sociales et fiscales ou le rééchelonnement des crédits bancaires.

C. La mise à l’abri des femmes victimes de violences s’est renforcée. Le 115 maintient son principe de réponse systématique pour les femmes victimes de violences. En partenariat avec la CAF, une nouvelle structure d’accueil d’urgence des femmes victimes et de leurs enfants a vu le jour récemment : 30 places supplémentaires complètent désormais les 22 places existantes des Structures d’accueil d’urgences temporaire (SAUT).
Ainsi depuis une semaine, une nouvelle équipe de travailleurs sociaux et techniques (gardiennage et logistique) accueille les femmes victimes de violences ; des entretiens psychologiques leur sont proposés par l’ARIV (Antenne réunionnaise de l’institut de victimologie).
D. Les dispositifs de protection des femmes victimes sont mobilisables. Les forces de l’ordre sont pleinement mobilisées, les 8 ISCG en poste assurent à distance des accompagnements des victimes en étroite collaboration avec les commissariats de police et les brigades de gendarmerie. Les téléphones grave danger (TGD) sont toujours attribués (3 depuis le début du confinement). Les juridictions assurent des permanences pénales priorisant le traitement des situations de violences conjugales. Les titres de séjour, sur décision du préfet, sont prolongés de 3 mois renforçant ainsi la protection des femmes étrangères victimes de violences conjugales.

E. L’alcool est un facteur causal des violences intrafamiliales. Dans cette période de confinement qui expose plus encore les femmes et les enfants victimes de violences, le préfet interdit la vente à emporter d’alcool de 17h à 6h sur l’ensemble du territoire. Cette mesure entre en vigueur immédiatement jusqu’au 15 avril.

III - Les espaces nationaux d’écoute et d’orientation sont toujours opérationnels en métropole et outre-mer

• Le 39 19, Violences Femmes Info, poursuit l’écoute des femmes victimes de violences appelant via un fixe ou un portable.
• Le numéro d’appel pour l’enfance en danger, le 119, continue d’être en service. Gratuit depuis un fixe ou un portable, il continue à être joignable 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. Notre vigilance doit redoubler en cette période. Tout témoin de violence commise sur un enfant, même auditif, même dans le doute, ne doit pas hésiter à composer le 119.
• La plateforme de signalement des violences sexuelles et sexistes reste active arretonslesviolences.gouv.fr. Elle permet aux victimes, sans obligation de déclarer leur identité, d’entrer en contact avec des forces de l’ordre formées aux violences sexistes et sexuelles, de bénéficier d’assistance et de conseils, d’être orientées vers les dispositifs locaux d’accompagnement et de prise en charge sociale et/ou psychologique. Elle est active 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et accessible depuis un ordinateur, une tablette ou un smartphone. Ce sont des modalités plus adaptées à la période de crise actuelle.

Sont en cours d’application à La Réunion, le numéro d’alerte par SMS 114, l’alerte donnée par les pharmaciens de l’île, et les permanences des associations dans les grandes surfaces.

Contacts utiles pendant le confinement

les associations d’écoute et d’accompagnement des victimes de violences conjugales
afect : 0692 61 76 59 - [email protected]
amafar-epe (accueil de jour et laeo) : 0262 30 53 30 (de 9h à 16h) - [email protected]
ariv : 0692 61 08 88 - [email protected]
cevif : 0692 14 58 45 - [email protected]
femmes solid’air ! : 0692 23 32 23 - 0692 36 53 91 - 0692 26 53 52 - [email protected]
Réseau VIF : 0262 96 04 24 (du lundi au vendredi de 8h à 12h et de 13h à 16h) [email protected]
UFR : 0262 45 57 07 - [email protected]
Femmes des Hauts, Femmes d’Outre-mer (accueil de jour) : 0692 01 20 86 – 0692 06 53 53 [email protected]
Planning Familial : 0692 47 08 70 - 0693 13 51 37 - 0692 77 46 12 – [email protected]

Pour une demande de téléphone grave danger

Le Réseau VIF et l’ARAJUFA poursuivent leur activité durant cette période. Elles continuent à distance à évaluer les situations de danger et à accompagner les personnes.
Réseau VIF : 0262 96 04 24 - [email protected]
ARAJUFA : 0692 95 40 70 - [email protected]

Les plateformes d’écoute nationales

 
3919
Les écoutantes du 39 19 disposent d’un transfert d’appel pour continuer à assurer à domicile une écoute à distance avec des horaires limités : du lundi au samedi, de 9h à 19h (heures de métropole). Rappelons que ce numéro n’est pas un numéro d’urgence.

arretonslesviolences.gouv.fr
Plateforme de signalement en ligne des violences conjugales, sexuelles, sexistes, gratuite, anonyme, sécurisée., 24h/24, 7j/7
La plateforme d’urgence nationale pour l’enfance en danger

119
Numéro national dédié à la prévention et à la protection des enfants en danger ou en risque de l’être, gratuit depuis un fixe ou un portable.
Accessible 24h/24 et 7j/7

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