Les 10 ans de l’Unité de Consultations et de Soins Ambulatoires

Les détenus(es) bénéficient-ils réellement de soins ?

22 octobre 2005

L’Unité de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) du Centre hospitalier (CHD) de Félix Guyon fête ses 10 ans d’interventions médicales auprès des détenus réunionnais. Jeudi matin, un débat sur les soins en prison, une visite de l’UCSA du centre pénitentiaire du Port et du quartier de détention des mineurs a été proposé à des intervenants. Ce même jour en France, l’Observatoire international des prisons (OIP) expose un bilan sur les conditions de soins et de vie des détenus.

D’après la loi n°94-43 du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et la protection sociale "la prise en charge sanitaire des personnes détenues doit être assurée par le service public hospitalier avec l’affiliation des bénéficiaires au régime général d’assurance maladie". Le 1er mars 1995, le CHD de Félix Guyon signe un protocole d’accord pour la création d’une UCSA à La Réunion. Les soins donnés aux détenus sont semblables à ceux donnés à une personne libre normalement.

À partir de la seconde guerre mondiale

"Après la seconde guerre mondiale, les détenus commencent à bénéficier réellement de conditions de soins. Des États signent la convention internationale des Droits de l’Homme, la convention des Nations Unies contre les tortures, la convention européenne des Droits de l’Homme...", rappelle Virginie Castillon, juriste. En France, la loi du 18 janvier 1994 permet l’entrée de l’hôpital dans les prisons. "L’infection par le virus du SIDA a fait vaciller le fragile équilibre du système de soins en milieu pénitentiaire (1). Les prisons se trouvent dans un véritable état d’urgence sanitaire" (2).

Entorses aux pieds et insuffisances respiratoires

Au sein des cellules réunionnaises,"on dénombre peu de cas liés aux hépatites et au SIDA",relève Virginie Castillon. Aux UCSA, tout entrant bénéficie d’une consultation et d’une mise à jour des vaccins. Un rendez-vous avec le dentiste s’impose aussi. Pour ces soins, les consignes de sécurité doivent être respectées. À l’occasion de la visite de l’USCA, un jeune détenu diabétique sous bonne escorte effectue ses soins. Une infirmière se trouve à ses côtés. Jean-François Lucas, kinésithérapeute au CHD de Félix Guyon et détaché à la prison du Port recense "de nombreuses entorses aux pieds et des insuffisances respiratoires". Il classe les patients en 3 catégories "les détenus patients, les détenus polis et les détenus humains". Au fil des séances des liens se nouent, mais le secret médical reste préservé.

Une population carcérale jeune et défavorisée

À La Réunion, la population carcérale présente 2 aspects : elle est jeune et défavorisée. Régulièrement des actions de prévention, les addictions et la contraception notamment, sont menées auprès d’eux pour une éducation à la santé. Ce volet est l’une des priorités de l’UCSA. Mais d’autres questions restent pour l’instant sans réponse valable. Elles demandent une réflexion poussée : "Quelle est la place de la prison au sein de la société ? Comment donner davantage de sens aux actions de prévention ? Les structures pénitentiaires sont-elles adaptées aux handicapés ? Comment prendre en charge les maladies lourdes et accompagner un détenu en fin de vie ? Travailler en prison, cela doit être un choix avant tout ?"

L’OIP présente un rapport sur les prisons françaises

Suite à ces interrogations, M. Marco, le Directeur des établissements pénitentiaires de La Réunion et M. Bouvier Muller, le Directeur du CHD de Félix Guy ont conduit un groupe de professionnels vers l’UCSA et le quartier des mineurs. Malgré des avancées visibles, le chemin reste encore long pour redonner à l’ensemble des détenus leur dignité d’être humain. Coïncidence ou pas, le jour de cette visite de l’UCSA de la prison du Port et du quartier des mineurs, l’OIP (voir encadré) expose un rapport sur l’état des prisons françaises. Il estime "qu’elles se trouvent dans un état dramatique".

(1)(2) Source : http://www.senat.fr

Jean-Fabrice Nativel


An plis ke sa

oDes UCSA aux maisons d’arrêt de Saint-Denis et de Saint-Pierre et une au centre pénitentiaire du Port
Le CHD Félix Guyon avec son UCSA couvre en médecine physique la maison d’arrêt de Saint-Denis (111 places dont 22 destinées aux femmes) et le centre pénitentiaire du Port (la maison d’arrêt 58 places, le centre de détention 310 places, la maison centrale 116 places, le centre de détention pour mineurs 60 places, le quartier disciplinaire et d’isolement 18 places). L’UCSA du Groupe hospitalier Sud Réunion intervient à la maison d’arrêt de Saint-Pierre.

o1.065 personnes sont détenues dans les prisons réunionnaises
Au 17 octobre 2005, 1.065 personnes sont détenues dans les prisons réunionnaises, soit un taux d’occupation moyen de 136,5%. Parmi elles, on compte 185 détenus de moins de 25 ans. L’état de santé de ces détenus se caractérise par les poly-toxicomanies, le diabète et des pathologies cardio-vasculaires et une hygiène bucco-dentaire dégradée.


Prisons en France : rapport accablant

Selon l’OIP , "les 185 prisons françaises sont dans un état de surpopulation et d’hygiène dramatique pour les détenus"
Le jeudi 20 octobre 2005, Patrick Marest, Délégué national de l’Observation internationale des prisons (OIP), a présenté un rapport sur les 185 prisons françaises. "Elles sont dans un état de surpopulation et d’hygiène dramatique pour les détenus . Les conditions se sont aggravées par la politique du gouvernement actuel" , juge l’OIP. "La dégradation de la situation ne doit rien à une fatalité qui résulterait de la dangerosité des personnes détenues. Elle résulte de choix politiques" , souligne Patrick Marest.
"Le taux de suicide en détention (115 morts en 2004) est 6,4 fois plus élevé que la moyenne française, les soins médicaux sont insuffisants, voire inexistants, alors que 70% à 80% des détenus souffrent de troubles psychiatriques et qu’un tiers sont toxicomanes à leur entrée en prison", relève le rapport. "La population carcérale française était de 57.163 personnes au 1er octobre pour 51.144 places, soit un taux d’occupation de 112%. En 2002, le gouvernement avait annoncé un programme de construction de 30 nouvelles prisons d’ici à 2007", rappelle l’OIP.


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