Surpopulation carcérale dans les prisons françaises

Les détenus réclament justice

22 juillet 2004

« Ils multiplient les plaintes pour dénoncer leurs conditions d’incarcération et la surpopulation, qui atteint des records ». Telles sont les premières lignes d’un article de Boris Thiolay paru dans “l’Express” du 19 juillet dernier que nous reproduisons ci-après, qui dénoncent des conditions de vie déplorables des détenus dans des prisons surpeuplées et insalubres. À La Réunion, les prisonniers subissent le même sort.

Les prisons françaises font face à un vent de révolte inédit : des détenus attaquent le ministère de la Justice pour dénoncer leurs conditions d’incarcération. Le 20 juillet, le tribunal de grande instance de Brest devait examiner la plainte de Patrice Cubizoles pour "traitement inhumain et dégradant". En détention provisoire depuis 2001, ce prisonnier de 46 ans, séropositif, partage 9 mètres carrés avec deux autres personnes, dans des conditions de promiscuité et d’hygiène déplorables. Une situation devenue banale, alors que la loi prévoit des cellules individuelles.
"Nous réclamons la désignation d’un expert indépendant pour démontrer que la surpopulation carcérale bafoue la Convention européenne des droits de l’Homme", explique Vincent Omez, avocat de Patrice Cubizoles. Deux plaintes similaires, pour "mauvais fonctionnement de la justice", ont été déposées à Caen en janvier dernier, trois autres vont l’être à Nantes.

"Un climat de tension et d’insécurité permanentes"

Avec 63.652 détenus pour 49.595 places - avant la grâce présidentielle du 14 juillet, qui concerne environ 3.500 personnes -, les prisons enregistrent des taux d’occupation record (128,3% en moyenne, 260% à la maison d’arrêt de Béziers). La politique de “tolérance zéro” face à la délinquance a généralisé le recours à l’incarcération : on dénombre actuellement 22.000 personnes en détention provisoire.
Ce trop-plein carcéral suscite depuis plusieurs semaines une mobilisation élargie. Le 8 juillet, la Conférence des bâtonniers (représentants des avocats) réclamait des "mesures d’urgence" face à la "situation explosive". D’autant que la surpopulation affecte non seulement les détenus, mais aussi leurs familles et l’ensemble des personnels pénitentiaires. "À la prison de Loos-lès-Lille [Nord], un “entrant” attend plus d’un mois avant d’obtenir son premier parloir", indique Jean-François Forget, secrétaire général adjoint de l’Union fédérale autonome pénitentiaire (syndicat majoritaire parmi les surveillants). "Quant aux surveillants, ils travaillent dans un climat de tension et d’insécurité permanentes".
Des voix s’élèvent pour réclamer un plafonnement du nombre de prisonniers. "On ne peut plus incarcérer à tout-va", affirme Christine Boutin (UMP), l’une des 57 parlementaires ayant récemment visité un centre pénitentiaire à l’appel de l’Observatoire international des prisons. "La situation est si scandaleuse qu’elle pousse plus sûrement les détenus vers la récidive que vers la réinsertion". En avril 2001, le Sénat avait adopté une proposition de loi visant à améliorer les conditions de détention dans les maisons d’arrêt les plus surchargées. Faute d’avoir été examinée par l’Assemblée nationale, elle est restée lettre morte.


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