L’importation de l’épidémie de coronavirus à La Réunion n’a pas amélioré la situation

Les femmes premières victimes de la situation sociale « hors-normes » de La Réunion

8 mars 2022, par Manuel Marchal

L’égalité entre les femmes et les hommes, notamment en termes de salaires et d’accès à des postes à responsabilités, fait partie des Objectifs de développement durable ratifiés par la France. Cet ODD doit être atteint en 2030. Les données les plus récentes de l’INSEE à ce sujet datent de 2017, avant que la pandémie de COVID-19 n’accentue encore les inégalités. Elles montrent que sans un changement fondamental de politique, cet ODD ne sera pas atteint dans 8 ans. Les femmes sont plus touchées par le chômage et quand elles ont un emploi, c’est le temps partiel et donc un salaire partiel pour un tiers d’entre elles. Une des conséquences les plus dramatiques de ces inégalités est le taux de pauvreté des femmes élevant seules leurs enfants : 61 %.

L’Organisation des Nations unies (ONU) a défini 17 objectifs à l’horizon 2030. L’objectif 5 vise à parvenir à l’égalité entre les femmes et les hommes en :

- mettant fin à toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles, notamment en matière de rémunération ou d’accès à toutes les filières professionnelles ;
- éliminant de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles ;
- veillant à ce que les femmes participent pleinement et effectivement aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique, et y accèdent sur un pied d’égalité.

Plus touchées par le chômage, près d’une salariée sur trois à temps partiel

L’étude INSEE Flash n°197 publiée le 8 mars 2021 présente des données datées de 2017. Ces données soulignent que cet Objectif de développement durable est encore loin d’être atteint.
Tout d’abord, « seulement 42 % des femmes occupent un emploi en 2017, soit 8 points de moins que les hommes ».
Les femmes sont également contraintes à occuper des postes plus précaires :

« Les Réunionnaises travaillent nettement plus souvent à temps partiel : 28 % contre 13 % des hommes. La moitié de ces femmes à temps partiel sont en situation de sous-emploi subi : elles souhaiteraient travailler davantage ».

Un temps partiel signifie un salaire plus faible qu’un temps complet. Les conséquences sont nombreuses, notamment en termes de retraites avec comme seul horizon le minimum vieillesse.

Écartées des postes à responsabilités, salaires plus faibles de 7 % en moyenne

Outre un temps de travail réduit, leur salaire est plus faible : « Elles touchent ainsi en moyenne 12,5 euros de l’heure, contre 13,4 euros pour les hommes, soit un écart de 7 % ».

« Moins souvent en emploi, les femmes occupent en outre rarement des postes à responsabilités. Par exemple, seules un quart d’entre elles dirigent des entreprises de 10 salariés ou plus, et seules un quart occupent un des quelques 200 emplois d’encadrement supérieur ou de direction dans la fonction publique à La Réunion. De plus, seules 37 % des entrepreneurs sont des femmes »

.
Si « 9 % des femmes en emploi sont enseignantes, qui est la profession la plus représentée », l’INSEE constate que 27 % des salariées « occupent des postes peu valorisés d’agente d’entretien, d’aide à domicile ou aide ménagère, de vendeuse, d’aide soignante ou d’infirmière ».

Une des conséquences : 61 % des femmes seules avec des enfants sous le seuil de pauvreté

Une des conséquences de ces inégalités, est la taux de pauvreté important touchant les femmes qui élèvent seules leurs enfants.

« Les femmes vivant seules avec leurs enfants sont plus souvent pauvres : 61 % vivent sous le seuil de pauvreté à La Réunion en 2015, contre 44 % des hommes en familles monoparentales et 34 % des couples avec enfants. Plus le nombre d’enfants est élevé, plus le taux de pauvreté est important : il culmine à 79 % pour les mères seules avec trois enfants ou plus ».

L’INSEE apporte une explication : « les mères isolées cumulent les facteurs de risques de pauvreté. Leur faible niveau d’études (une sur deux seulement dispose d’un diplôme qualifiant) et la problématique de la garde des enfants constituent des freins à leur insertion professionnelle : seules un tiers sont en emploi. »

La pandémie COVID-19 a accentué les inégalités

Des études ont montré que la pandémie de coronavirus a eu un impact négatif sur l’activité économique, favorisant l’augmentation du chômage et de la pauvreté dans le monde. Les femmes ont été les plus touchées. Une étude de l’OIT le révèle pour l’Amérique latine et la Caraïbe :

« Les secteurs d’activité où les mesures d’isolement social ont eu le plus d’impact (commerce, restaurants et hôtels, et activités de loisirs, entre autres) sont à forte intensité de main-d’œuvre féminine. Par ailleurs, l’impact a été plus important dans l’emploi informel et dans les micro, petites et moyennes entreprises, où l’emploi féminin est également prédominant ».

Aucune raison ne permet de dire que La Réunion peut faire exception à cette tendance. Au bout de de 76 ans d’intégration de notre île à la France en tant que département français, les femmes premières victimes de la situation sociale « hors-normes » de La Réunion.

M.M.

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