Visite de logements insalubres à Saint-Gilles les hauts

Les nouveaux misérables

29 avril 2006

Le 18ème Salon de la Maison a ouvert ses portes hier. Un autre Salon, celui de l’insalubrité des logements, se tient depuis plus de 50 années au chemin Champ de merle à Saint-Gilles les hauts, à Saint-Paul. Les membres de la section du Parti communiste réunionnais de Saint-Paul ont proposé hier en début d’après-midi une visite de ces familles des hauts, victimes de la misère.

Hier en début d’après-midi, Huguette Bello, députée, Emmanuel Séraphin, Jean-Marc Gamarus, Jean-Claude Mélin de la section du Parti communiste réunionnais (PCR) de Saint-Paul et les bénévoles de l’association Momon papa léla de Saint-André ont visité un “Salon de la Maison” pas comme les autres. Il se tient tous les jours depuis plus d’une cinquantaine d’année au chemin Champ de merle à Saint-Gilles les hauts. Plus de 80 Réunionnais(es) vivent ou survivent au sein de maisons délabrées. Jusqu’à hier, ils n’avaient pas reçu de répulsifs pour se préserver du chikungunya.

Plusieurs générations sous le même toit

Ces familles cachent leur honte. Elles n’invitent personne chez eux. Les toilettes se situent à l’extérieur de leur toit. Elles sont dépourvues d’éclairage. Par temps de pluies, les toilettes et les habitations sont inondées. Les pièces sont étroites. Ils dorment à 2, à 3 voire même plus. Plusieurs générations cohabitent dans ces lieux misérables. Cependant, ces hommes et ces femmes accordent de l’intérêt à cet environnement. Ils sont nés là, leurs parents et enfants aussi.
Ces foyers ne demandent pas la charité. Au moment des élections, ils ne refoulent aucun candidat. Mais depuis plus de 4 décennies, ils entendent le même refrain, les mêmes promesses. Le matin en ouvrant leur porte, ils aperçoivent un golf verdoyant et très étendu et entretenu. Ils constatent aussi la construction de belles maisons avec piscines. Eux, avec peu de moyens, s’associent pour l’entretien d’un espace. Il sert de terrain de football, mais pour combien de temps encore ? Pour passer le temps, ils organisent des “batay coq”.

Réhabiliter au plus vite

Voilà comment vivent en ce début de 21ème siècle des familles de Saint-Gilles les hauts. Huguette Bello dresse le même constat "à Bouillon, Bel air, Canal la boue", des quartiers du berceau du peuplement de La Réunion. Elle dénonce "le manque d’ambition et de volonté de la majorité de Saint-Paul pour éradiquer la pauvreté sur son territoire". Cette municipalité "paie depuis des années 330.000 euros de pénalités. Elle manque à son devoir de construction de logements sociaux" tout simplement, déplore-t-elle. Il est urgent de donner à ces femmes tout particulièrement un logement digne de ce nom.
Pour Emmanuel Séraphin, "la résorption de ces habitats insalubres incombe principalement à l’État et au Conseil général". "Que font les conseillers généraux saint-paulois ?", s’interroge-t-il. Jean-Marc Gamarus s’inquiète car "ils sont très peu à se préoccuper des attentes de ces pauvres". Jean-Claude Mélin précise que "des familles nécessiteuses attendent des logements depuis trop longtemps et ne voient rien venir". Il est temps selon lui de mettre en route à Saint-Paul "une véritable politique en faveur de la réalisation de logements sociaux". La famille "Momon papa lé la est présente pour soutenir ces femmes victimes de misère", indique le porte-parole de l’association, Patrick Savatier.

Jean-Fabrice Nativel


Plus de 48 ans d’insalubrité

Irène Moidina vit dans une case - si on peut appeler ça une case - depuis plus de 48 ans. Elle a élevé seule ses enfants. 3 marmailles vivent encore au sein du foyer. Ils dorment dans un espace de 3 mètres sur 3. Irène Moidina occupe un espace identique. Certes, il se trouve insalubre. Mais Irène Moidina le tient propre. Elle a économisé pour le rajout d’une pièce qui sert de cuisine, de salle de bains. Elle nous montre 2 récipients qui font office de machine à laver manuelle. Les WC sont situés à l’extérieur de la case. Elle décrit sa condition de mère de famille avec fierté. Élever seule des enfants dans des conditions épouvantables, il faut le faire. En période de pluie, la boue submerge les toilettes et les habitations. Elle a recours aussitôt aux balais serpillières. Prochainement, un de ces enfants fêtera sa première communion. Elle veut lui offrir un moment inoubliable malgré tout. Et les familles du coin mettront la main à la pâte.

J.-F. N.


"Vivre dans un quartier humanisé mais pas délabré"

Pour Huguette Bello, députée et présidente de l’UFR, "l’éradication de la pauvreté représente un des défis économiques et éthiques les plus sérieux et les plus urgents à La Réunion comme dans le monde. Il est manifeste que la pauvreté est un problème multidimensionnel ayant un impact sur chaque aspect de la vie, allant de la dignité et du bien-être individuel". Elle suggère "la création d’une couverture logement universelle qui garantie l’accès et le maintien dans une habitation décente". Devant tant de détresse, elle réclame en toute urgence "la construction de logements sociaux, la remise en état des logements insalubres ou leur remplacement rapide". Ces mesures permettront notamment à ces familles de Saint-Gilles les hauts "de vivre dans un quartier humanisé mais pas délabré".

J.-F. N.


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