Étudiante malgache sortie de clandestinité

Marie-Naoisa en sursis provisoire

15 décembre 2004

Marie-Naoisa Zaranony, l’étudiante malgache qui se cachait depuis la fin novembre pour ne pas être reconduite à la frontière, a obtenu lundi une autorisation de séjour jusqu’à la fin juillet 2005, qui lui permet de finir son année scolaire. Elle prépare avec l’ARFOBAT un BTS d’assistante de gestion des entreprises.

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Mais elle reste dans une situation très précaire, la Préfecture ne lui ayant accordé son titre de séjour provisoire que sous un chantage à peine déguisé : si elle n’accepte pas de partir après juillet, pas d’autorisation provisoire.
Marie-Naoisa est entrée régulièrement à La Réunion le 3 décembre 2002. Le lendemain, 4 décembre, elle a fait une demande de naturalisation, restée suspendue à l’obtention d’un titre de séjour qui ne lui a jamais été accordé. D’où les difficultés surgies cette année. Il y a quelques mois, Marie-Noisa s’est mariée à La Réunion avec un compatriote. "Avant de me marier, j’ai demandé si cela n’aurait pas d’impact sur mon dossier. On m’a assuré que non mais je vois maintenant que ce n’est pas si sûr...".
A plus d’un titre, la jeune femme a le sentiment d’être flouée, ballottée. "Je n’ai accepté la limite de juillet que pour pouvoir poursuivre mes études. Je ne veux pas repartir. J’ai ma famille ici aussi : quatre frères et sœur, cette dernière née à La Réunion... Je ne comprends pas pourquoi on nous fait cela. Nous ne faisons rien de mal ; des études, c’est tout...".
Son mari, entré avec un visa provisoire, est reparti après trois mois. Le jeune couple est donc séparé de fait, Marie-Naoisa restant ici pour passer son BTS... jusqu’à ce que des fonctionnaires zélés s’aperçoivent que sa demande de 2002 était restée sans réponse. À qui la faute ?
Pourquoi aussi n’a-t-elle obtenu qu’un accord sur les deux requis pour son contrat de travail ? Sa demande d’habilitation a été validée : depuis le 17 novembre 2003, elle a obtenu l’accord d’habilitation à conclure un contrat de qualification (n°110342) mais il faut un deuxième accord, donné par la Direction du travail, qui n’est jamais venu. Pourquoi ?
N’y a-t-il pas, dans ces atermoiements administratifs, une volonté délibérée de créer des failles, une précarité faite “sur mesure”, qui met ces étrangers en situation de dépendance et de fragilité permanentes ? Ceci n’est pas acceptable, s’agissant de citoyens de l’océan Indien qui ne font que répéter ce que nous avons toujours faits entre les îles depuis trois siècles : circuler, échanger, travailler, mêler nos cultures et nos ressources. Que l’administration veille à écarter des trafiquants ou des délinquants, tout le monde l’admettra. Mais qu’elle s’immisce dans les relations multiséculaires tissés entre les peuples de la région, c’est un abus qui tient plus de la prérogative coloniale que d’une recherche de bonne gouvernance dans une terre de droit.
Jointe hier au téléphone, Marie-Naoisa nous a confié son désarroi. "Je souffre vraiment beaucoup. Je n’arrive plus à me concentrer sur rien. Je vais tout faire pour pouvoir m’inscrire... Il ne manque plus que le contrat", dit-elle. Pourquoi leur manque-t-il toujours quelque chose ? Elle vient de passer deux à trois semaines enfermée dans une pièce. "Tourner en rond dans une chambre avec rien d’autre que la télé, ça n’est pas pour moi. J’aime bouger, j’aime travailler ; c’est tout ce qui compte pour moi. Tous mes camarades étudiants et mes collègues de travail pourront vous le dire", ajoute-t-elle.

P. David


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