Non à l’expulsion de la famille Nourdine

21 janvier 2008

Au nom de quelle injustice une famille réunionnaise peut-elle être expulsée au bon vouloir de l’aberrance administrative ? Voilà maintenant que celle qui fut tant félicitée par une ministre comme modèle d’intégration, se voit maintenant sous la menace de l’expulsion. Que l’on soit cohérent, ma parole...

(Photos BBJ)

Réunionnais, d’origine comorienne, mahoraise, mohélienne, malgache, ou encore “zorèy”, étaient là sur le parvis des Droits de l’Homme, à Champ Fleuri, pour dire NON. Non à l’expulsion d’une famille exemplaire, sans problème, qui est en règle avec la loi. N’allons pas rouvrir le grand débat sur l’immigration. Ici, à La Réunion, normalement nous n’avons plus besoin de le repéter : nous sommes tous immigrés. Une famille d’origine comorienne est-elle réunionnaise ? Oui. Et le cas de la famille Nourdine témoigne de l’incroyable effort d’intégration. Cette famille est réunionnaise. Un jour, on la présente comme un modèle, que même des réunionnais devraient suivre. Un autre jour, c’est une famille consignée à résidence, parce que sous la menace d’une expulsion. On peut parler ici d’incohérence administrative. Plutôt même dire, c’est une aberration, qu’il va falloir réparer au plus vite. Avant demain en tout cas, puisque la famille Nourdine risque fort d’être expulsée ce mardi. Les Réunionnais doivent réagir, politiques aux côtés du simple citoyen. C’est pour relancer l’appel qu’une centaine de personnes se sont réunis sur la parvis des droits de l’Homme, pour une fois de plus rappeler la détresse d’une famille qui ne demande qu’à rendre service à la société réunionnaise. Et elle a d’ailleurs déjà rendu ces services. Pourquoi donc expulser un modèle d’intégration ?

Rendez-vous aujourd’hui devant la préfecture

Mayotte est-elle terre française ? Qu’on nous le dise. Normalement, cette collectivité territoriale est française, et ne devrait pas tarder à bénéficier du statut départemental. Comment peut-on expliquer qu’une administration française, et justement si elle est à Mayotte, confierait des papiers sans valeur ? Comment expliquer que des papiers communiqués par La France donc ne soient pas valables sur une autre terre française ? Mayotte est une terre française. Et comme telle, les titres de séjour transmis par l’administration française sur son sol, ne doit pas être mis en doute. Sinon, c’est l’administration française qui douterait elle-même de ses propres documents. Quelle incohérence ! Hier, un recours à la décision préfectorale a été déposé au Tribunal administratif. Aujourd’hui, à 9 heures, c’est devant les grilles de la Préfecture que le rendez-vous est fixé, pour que ce problème trouve une issue favorable. Il faut que l’on arrache cette victoire contre l’aberrance administrative, une aberrance qui détruit des familles. Disons NON à la politique du chiffre qui consiste à virer tout azimut des personnes qui contribuent au développement de notre île, à l’enrichissement culturel. Rendez-vous tenu !

Bbj


Déclarations

• Madi Saindou, Président de l’Association des Mohéliens

« C’est dramatique .. »

« Nous vivons cette situation comme quelque chose de dramatique. Parce que c’est une famille parmi les familles, qui sont arrivées à La Réunion, qui sont intégrées à La Réunion. Le père n’est pas un délinquant. C’est quelqu’un qui a fait des études, qui est bilingue. Aujourd’hui, au niveau culturel comorien, il s’est bien intégré. On se retrouve à la mosquée. Il est un père de famille responsable. Donc, on ne voit pourquoi cette situation ? Même si je suis de Mohéli, je soutiens carrément cette cause. Cette famille vit aujourd’hui sous le couperet d’un arrêté d’expulsion, alors qu’elle avait été présentée comme famille modèle à la secrétaire d’Etat Fadéla Amara. C’est un contraste, vraiment. L’AMAFAR, qui est une association qui est là pour aider les familles, a montré que c’était une famille modèle, que les enfants étaient scolarisés. On a vu comment ces enfants avaient des très bonnes moyennes. On a vu que le père travaillait. Au niveau social, il était intégré. Aujourd’hui, les familles comoriennes, mahoraises, mohéliennes, et anjouanaises, trouvent que ce serait une véritable injustice, si un papier de séjour de Mayotte n’est pas reconnu à La Réunion. Mais, c’est impensable aujourd’hui que l’on détruit cette famille là, parce que l’on dit que Mayotte est une collectivité territoriale, que La Réunion c’est un département, mais tous les deux sont des territoires français. Mayotte est une terre française. On ne peut pas avoir deux mesures, une qui vaut pour Mayotte, une autre pour La Réunion. Et on est toujours en territoire français. »

• Catherine Gaud, vice-présidente du Conseil Régional

« Nous sommes tous des immigrés »

« On devrait soutenir cette famille uniquement par devoir d’humanité, par devoir de fraternité, et par devoir de solidarité. Cette famille est un modèle d’intégration. Elle a d’ailleurs été présentée à Madame Fadéla Amara, la secrétaire d’Etat, comme une réussite, puisque est né français, qu’il a fait des études importantes. Il a 5 années après le bac. Il a toujours travaillé, notamment comme réceptionniste dans des hôtels, jusqu’au moment où l’on a averti son employeur qu’il devait cesser de l’employer, parce que lui-même risquerait quelque chose. Donc on l’a mis lui-même dans une situation embarrassante. Monsieur et Madame ont un enfant qui est né à Mayotte, qui pour moi est une terre française. Monsieur a encore une carte de séjour qui est valable à Mayotte. Cette famille est intégrée, elle paye son loyer, Monsieur a une carte de sécurité sociale, ils paient leurs impôts, et au-delà de ça, ils rendent considérablement service à la communauté de La Réunion. Pourquoi ? Monsieur donne des cours de soutien scolaire, il parle anglais, il donne des cours d’anglais. Il aide donc à l’intégration, il aide donc au succès des petits Réunionnais et petites Réunionnaises, et des petits Comoriens, et des petits Mahorais, et des petits êtres humains en général. Car nous sommes la communauté des hommes et des femmes de la Terre. Je voudrais dire aussi que ce à quoi nous nous heurtons, c’est un problème administratif, un problème de loi qui est complètement aberrante. Et je crois que le travail des politiques lorsque la loi est aberrante, lorsqu’elle n’est pas juste, lorsque l’on fait du chiffre pour arriver à tout prix au quota des 25.000 expulsions, cela entraîne des tragédies individuelles. Il faut le dénoncer. Lorsque notre pays se met au banc des nations des Droits de l’Homme, parce qu’il exige que l’on fasse une prise de sang, qui est si difficile à réaliser, pour vérifier au plus profond des êtres, dans leurs gênes, dans leurs ADN, que oui des parents ont le droit d’avoir leurs enfants avec eux, je crois que l’on ne peut pas être d’accord. C’est tout simplement une question de valeurs, une façon de se conduire. Je voudrais dire que La Réunion est une terre d’immigrés. Nous sommes tous des Réunionnais arrivés de quelque part. Au début, il n’y avait pas ici d’habitants sur cette terre. Et c’est de l’arrivée successive, de l’apport successif, de l’enrichissement successif, d’êtres humains qui sont venus de Madagascar, d’Afrique, de l’Inde, des Comores, de Chine, de l’Europe, que s’est formée la nation réunionnaise. Elle s’est même inventée une langue, la langue créole, pour pouvoir se comprendre avec toutes ses origines différentes. Une société est toujours en mouvement, et la société réunionnaise continue à se fabriquer. Elle n’est pas figée à un moment donné. Nous devons absolument faire en sorte que cette famille reste à La Réunion. Parce que cette famille exemplaire enrichit La Réunion, et les Réunionnais. Et ce serait une injustice, mais phénoménale, que de la laisser repartir. Alors, tous nous devons nous mobiliser. Je crois que tous les politiques devraient être là aujourd’hui. Au nom de l’humanité, au nom de la justice, au nom de la patrie des Droits de l’Homme qu’est La France, il faut tout faire pour les aberrations administratives ne fassent tomber le couperet sous une famille, qui a été mise sous le feu de projecteur, une fois comme modèle d’intégration, une fois montrée du doigt pour qu’elle rentre chez elle. (...) Je demande à tous les Réunionnais, à toutes les Réunionnaises, de se mobiliser, de faire acte de fraternité, de faire acte de solidarité, uniquement au nom de ce que nous sommes tous, des êtres humains ».

• Sudel Fuma, politique, historien, président de la Chaire de l’UNESCO

« Est-ce que l’on peut condamner une famille qui est un modèle d’intégration ? »

« Il y a une famille qui est une victime aujourd’hui, victime d’une injustice que nous ne pouvons pas accepter. Victime aussi, quand nous pensons à notre histoire. Nous sommes tous issus de la même origine, c’est-à-dire les Réunionnais viennent de Madagascar, des Comores, d’Afrique, d’Inde. Et ici, nous avons réussi à former ensemble, une société, malgré ses défauts, mais qui aujourd’hui est une société où tout le monde a pu s’intégrer. Et là, nous avons le cas de la famille Nourdine. (...) Fadéla Amara a reçu cette famille, en disant que cette famille est un modèle d’intégration. Est-ce que l’on peut condamner une famille qui est un modèle d’intégration ? Est-ce que l’on peut accepter cela ? On ne peut pas. Mon intervention ici est en tant que politique, mais au-delà de la politique, en tant que militant de la vie associative, de président de la Chaire de l’UNESCO. La Chaire de l’UNESCO a pour vocation la défense notamment de l’interculturalité. L’interculturalité, ce sont nos liens, ce sont toutes les valeurs qui ont fait nos îles. Et ces valeurs, on ne peut pas comme ça les bafouer. Aujourd’hui, face à ce symbole (ndlr : le parvis des Droits de l’Homme de Champ Fleuri), je rêve - et mon rêve demain sera réalisé - que ceux qui ont en main l’autorité judiciaire, soient responsables, et que cette famille reste à La Réunion. Parce que juridiquement, au-delà de la solidarité, au-delà du sentiment humain qui est le nôtre pour la défense de cette famille, cette famille bénéficiait d’un certificat de résidence à Mayotte. Et donc Mayotte est une terre française, La Réunion n’est-elle pas une terre française ? A ce niveau, on doit être mobilisé. On doit être plus nombreux, montrer que l’on est présent. On doit montrer qu’on ne laisse pas bafouer notre droit. Et ce n’est pas seulement le droit de français, ce sont les Droits de l’Homme. »

Propos recueillis par Bbj


Famille Nourdine

La mobilisation ne faiblit pas avec deux nouveaux rassemblements prévus lundi

Ils étaient environ 150 à s’être réunis sur le parvis des Droits de l’Homme à Champ Fleuri pour apporter leur soutien à la famille Nourdine qui est sous le coup d’un arrêté d’expulsion. Je ne reviendrai pas sur le fond de l’affaire qui est parfaitement clair, "Témoignages" dans son édition de samedi a développé la situation.
Saouzia et Rachad Nourdine ainsi que leurs enfants sont assignés à résidence jusqu’à mardi midi date prévue de leur expulsion.
La communauté comorienne s’est mobilisée et a trouvé dans l’urgence un avocat à la famille Nourdine pour palier à la défection du précédent juriste qui avait refusé de continuer à la défendre. Lundi 21 janvier à 9 heures du matin, le comité de soutien appelle tous ceux qui le souhaitent à venir le rejoindre pour remettre une pétition à Monsieur le préfet.
Ce comité de soutien espère que de nombreux réunionnais et ressortissants de toutes les communautés seront présents devant les grilles de la Préfecture pour appuyer cette pétition. Lundi après-midi, la mobilisation devrait continuer avec un nouveau rassemblement, cette fois devant le tribunal de Saint Denis à 15 heures. Une chose est certaine c’est que la famille Nourdine ne sera apparemment pas lâchée et que l’émotion est vive face à cette expulsion injuste et incompréhensible.

"L’immigration choisie selon Hortefeux

Le coup de massue qui vient de s’abattre sur la famille Nourdine est symptomatique de la politique de Nicolas Sarkozy en matière d’immigration. "L’immigration choisie" qu’il disait ! Or que voyons nous dans cette affaire ? Une famille parfaitement intégrée qui travaille et vit depuis dix ans sur le territoire français, une famille d’un niveau intellectuel assez élevé (N’oublions pas que c’est un critère selon "N"), des enfants scolarisés et sans aucun problème et voilà qu’en urgence, on décide de les renvoyer dans un pays où ils n’ont plus véritablement d’attaches ! Comme à l’accoutumée les représentants du gouvernement choisissent le dernier jour de la semaine pour commettre un méfait, il est évident que le choix du vendredi est parfaitement bien calculé.

Un modèle d’intégration...

Lors de la visite de la secrétaire d’Etat Fadela Amara le 19 octobre 2007 aux Camélias à Saint Denis, c’est la famille Nourdine qui a été choisie comme modèle d’intégration. Fadéla Amara s’est empressé de ce faire prendre en photo avec les membres de cette famille, la Secrétaire d’État a rendu un hommage appuyé à notre île qui savait si bien cultiver les différences, allant jusqu’à prétendre qu’elle allait nous "piquer" toute nos bonnes idées. Ce serait risible si cela n’était pas aussi dramatique. Une réflexion me vient à l’esprit, si la turbulente ministre décide de nous piquer nos idées, espérons qu’elle ne parle pas de celles du Préfet de La Réunion qui n’a qu’un objectif, expulser les "modèles d’intégration", car la France métropolitaine peut trembler ! Décidément cette affaire pue et on doit se mobiliser, si on laisse faire cette expulsion c’est la porte ouverte à toutes les injustices.
Décidément cette histoire est véritablement un camouflé à tout ce que "N" promet en matière d’immigration choisie.
Notre Préfet ne serait-il pas en train de passer par dessus l’Etat ? Lorsqu’on lit le rapport de la commission Jacques Attali pour "la libération de la croissance française", on est en droit de penser qu’on marche sur la tête, ce rapport apporte de l’eau au moulin de ceux qui défendent la famille Nourdine. En effet, que dit ce rapport dont Nicolas Sarkozy a assuré « qu’il ferait ce que la commission proposerait » ? C’est l’article 15 qui nous intéresse tout particulièrement :
15e décision : « Encourager la mobilité géographique (par la création d’une bourse Internet du logement social) et la mobilité internationale (notamment par une procédure plus souple de délivrance de visas aux étudiants, artistes travailleurs, chercheurs et scientifiques en particulier dans les secteurs en tension). » L’immigration peut permettre de remédier à des pénuries de main-d’oeuvre. Il va manquer des informaticiens et des cadres technico-commerciaux.

Tous sur le Blog de Fadéla Amara !

La secrétaire d’Etat Fadéla Amara est présente sur la toile et puisqu’elle se dit honnête et droite, pourquoi ne pas saisir de l’opportunité qui nous est offerte par le truchement de son blog pour l’avertir que la famille qu’elle citer en exemple va être expulsée parce que selon Monsieur le Préfet les Nourdine n’ont pas le droit de vivre sur notre territoire (après avoir cotiser, payer leurs impôts et travailler pour la France).
Voici l’adresse du blog : (http://fadela-amara.net/blog/) Il faut inonder ce carnet web de commentaires avant mardi midi.

Philippe Tesseron
http://tesseron.blogspace.fr/


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?

Messages

  • Son permis de séjour était valable sur le teritoire de la collectivité territoriale de Mayotte, c’est délibérement et en violation de la loi qu’il est venu s’installer à la Réunion alors il faut arrêter de raconter des bobards. La Constitution Française prévoit que les territoires d’outre mer peuvent avoir une législation spécifique alors pourquoi s’étonner aujourd’hui que le permis de séjour n’était valide que sur le territoire de Mayotte ? le plus curieux c’est de constater que ceux la même qui contestent le caractère français de mayotte sont maintenant les premiers à dire que puisque Mayotte est française, c’est la même législation qui doit s’appliquer sur tout le territoire de la république. Chiche alors commençons alors par supprimer le droit local qui donne au Cadi, la gestion de tout un pan du droit. La République Française n’est pas un self service ou on choisit les règles à appliquer selon les envies et les intérêts du moment.


Témoignages - 80e année


+ Lus