Débat hier sur Radio Première

Plus que jamais, l’importance du combat contre toutes les formes de racisme et d’inégalités à La Réunion

24 août 2012

Hier après-midi, sur la chaîne radio de Réunion 1ère, l’animateur Claude Montanet a eu une excellente idée : animer un débat sur le problème du racisme à La Réunion aujourd’hui. Les interventions des auditeurs comme celles des invités ont confirmé la justesse et l’importance de ce combat que mène le Parti communiste réunionnais depuis sa fondation en 1959 : la lutte contre toutes les formes de racisme, de discriminations et autres injustices dont est victime le peuple réunionnais depuis sa naissance, il y a trois siècles et demi. Ainsi, cette émission, très intéressante, a montré à quel point nous devons soutenir l’union des Réunionnaises et des Réunionnais pour renforcer ce combat aujourd’hui.

Ce débat a été lancé par Claude Montanet suite aux injures racistes lancées mardi dernier par Gigi Becali, président du Steaua Bucarest, qui a déclaré dans les colonnes d’onlinesport qu’il refuse de recruter dans son club de foot roumain l’attaquant international français Florent Sinama-Pongolle uniquement en raison de sa couleur de peau. En effet, malgré les talents de ce footballeur réunionnais international évoluant au Sporting Portugal, il a été rejeté par Gigi Becali parce qu’« il est noir… ».
Cet homme d’affaires et politicien de Roumanie, en Europe de l’Est, a déjà été dénoncé à plusieurs reprises pour avoir tenu de tels propos. Ainsi, récemment, il avait qualifié de « gitans » les joueurs du club adversaire du Steaua, le Rapid Bucarest.

« Éviter toutes les formes de communautarisme »

Voilà pourquoi, dès le début de l’émission hier entre treize et quatorze heures, les quatre invités ont exprimé leur solidarité avec notre compatriote, victime de cette injure raciste. Outre ce premier point positif dont "Témoignages" est solidaire, ils ont eu ensuite des échanges très intéressants sur le sujet principal du débat : le problème du racisme aujourd’hui à La Réunion.
Tout d’abord, Éric Murin, président du CRAN-Réunion (Conseil représentatif des associations noires), a rappelé que « le racisme est un délit réprimé par la loi », mais que « cela ne l’empêche pas d’exister dans notre pays », où beaucoup de personnes sont « toujours asservies sur le plan ethnique et social ». Aline Hoarau, professeure d’Histoire, a plaidé dans le même sens en témoignant que dans les écoles, on constate à quel point « les "ti-kaf" sont souvent stigmatisés, mis au fond de la salle de classe et en échec scolaire » ; elle a ajouté que « les causes de ce problème sont profondes », qu’il faut notamment « améliorer la connaissance de notre Histoire pour éliminer les souffrances » et « éviter toutes les formes de communautarisme ».

Le racisme au profit des classes dominantes

Le sociologue Laurent Médéa a confirmé les analyses des précédents intervenants, en rappelant que dans deux ouvrages qu’il a publiés ces dernières années, on trouve des données scientifiques sur l’existence et l’ampleur du racisme à La Réunion. (1) Celui-ci se manifeste de nombreuses façons et il frappe notamment les Réunionnais dont les ancêtres sont d’origine malgache, africaine et comorienne. Ces personnes sont victimes de discriminations, voire de mépris au niveau de la formation, de l’emploi, des moyens de vivre, des responsabilités, etc., avant tout en raison de la couleur de leur peau.
Bien sûr, d’autres Réunionnais sont également victimes de ce scandaleux et inadmissible non-respect de leur égalité avec les autres personnes ainsi que de leurs droits fondamentaux comme de leur dignité. Ces méfaits, pérennisés par la colonisation du pays, ont été dénoncés par le militant associatif Jean Jo, qui a mis l’accent sur les divisions que créent dans notre société les comportements racistes, au profit des classes dominantes.

« Alon prann anou an min »

Les interventions de plusieurs auditeurs ont abondé dans le même sens, en soulignant l’importance de renforcer l’union des Réunionnais dans la lutte contre le racisme, mais aussi contre toutes les autres formes d’injustices et d’oppressions. Car il y a un lien étroit entre, d’une part, les inégalités socio-économiques, culturelles, linguistiques, religieuses et politiques qui traversent notre société et d’autre part, le poids du système commercial, financier et institutionnel en place, qui vise avant tout à diviser le peuple réunionnais afin de mieux l’exploiter et le dominer.
Autrement dit, il y a un lien étroit entre le racisme ethnoculturel et l’apartheid social sur lequel est basée notre société. De même que le peuple réunionnais lui-même est globalement, en tant que tel, victime d’une forme de racisme, puisque ses droits fondamentaux et son identité ne sont pas respectés. Voilà pourquoi nous retiendrons cette précieuse invitation de "Gro Kaf", qui appelait de Saint-Leu : « Alon prann anou an min », et cette conclusion de Laurent Médéa : « Il faut changer les mentalités, l’idéologie des personnes ; et les médias comme l’enseignement ont une lourde responsabilité à ce sujet ».

Correspondant

(1) "Kaf" (Zarlor Éditions, 2009) et "Délinquance juvénile à La Réunion" (Zarlor Éditions, 2011).


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