Violences faites aux femmes…

Pour que cela cesse !

13 février 2010, par Cinthia Fontaine

L’Union des Femmes Réunionnaises (UFR) souhaite alerter l’opinion sur les actes de violences faites aux femmes. Deux victimes ont apporté leurs témoignages, pour ne plus subir des violences, elles ont souhaité sortir du silence.

« Il faut arrêter ça. Trop de femmes vivent leurs quotidiens dans l’insécurité permanente. Aucune classe sociale n’est épargnée » -, souligne Huguette Bello, présidente de l’Union des Femmes Réunionnaises (UFR). A La Réunion, 15% des appels qui arrivent au "115" proviennent de femmes battues. Un tiers des femmes vivant dans le monde subissent des violences qu’elles soient physiques ou morales. En France, une femme meurent sous les trois jours sous les coups. « Ce n’est pas un phénomène typiquement réunionnais. Ce n’est pas une résultante du système esclavagiste. Mais ici les femmes osent porter plainte et relever la tête. Le problème est que le personnel qui les reçoit n’a souvent aucune formation pour gérer ce genre de cas. Il y a souvent une difficulté de contact, d’écoute comme d’entente et de suivi des victimes. Nous devons tout faire pour stopper ça, pour mettre en place une loi cadre comme cela c’est fait dans d’autres pays, en Espagne et au Canada. Cela ferait réfléchir les "bourreaux" » ajoute-t-elle.
Catherine a souhaité témoigner à visage découvert. « Il m’a fait mal, mais je refuse d’avoir peur », dit-elle. Elle montre des photos qu’elle a prises elle-même et qui témoignent de la violence des coups. « La 1ère fois, il avait bu, c’était un 14 octobre, il m’a mis un coup de boule. J’ai eu trois points de suture. Puis il a promis de ne plus recommencer, je l’ai cru ».

« Pendant 25 minutes, il m’a frappé… »

L’ex-compagnon de Catherine travaille dans une banque. Elle, coiffeuse, était en stage à l’époque. Elle avoue être restée pour son enfant même si ce n’est pas lui le père. « Cela faisait peu de temps que nous étions ensemble quand nous avons choisi de cohabiter, surtout sur son insistance et sur celle de mon enfant ». Un mois plus tard, les coups reviennent. « Pendant 25 minutes, il m’a frappé, coups de poing au visage, coups de pieds dans les côtes. Malgré mes supplications, il n’a pas arrêté. Après, je suis restée trois jours sans soin, couchée. Je n’avais plus la capacité de réagir. J’ai repris conscience quand ma bouche s’est infectée, j’avais plusieurs dents cassées. J’ai appelé le "115". J’ai été soignée, j’avais une côte fêlée et trois côtes cassées. Le médecin m’a donné cinq jours d’ITT. Cependant, je n’ai pas bénéficié d’aide psychologique pendant dix jours. On m’a orienté vers un mauvais service. Le 19 novembre, j’ai porté plainte, l’affaire est passée le 8 janvier au tribunal de police, mais il n’a pas été véritablement condamné. Il a eu deux ans d’obligation de bonne tenue. J’ai écrit au procureur. Je pense que cet homme mérite le Tribunal correctionnel, mais pour l’instant je n’ai pas eu de réponse. Je me sens coupable d’avoir imposé ça à mon enfant, même si je sais que ce n’est pas moi la coupable ».

« On m’a dit "reviens demain"… »

Amélie (nom d’emprunt) prend la parole à son tour, sa voix est faible et rapidement les larmes lui montent aux yeux. Amélie vit dans la peur, pour elle et pour ses quatre enfants de 3 à 12 ans. Elle a la malchance de travailler au même endroit que son tortionnaire. Elle a dû quitter l’appartement dont elle est propriétaire car « il a cassé la serrure ». Elle vit actuellement chez sa mère et a dû changer ses horaires de travail. L’autre jour, elle n’a pas retrouvé son petit garçon à l’école, son père l’avait enlevé. Elle n’a pu le récupérer qu’à 18h30. Amélie ne s’est pas sentie entendue par la gendarmerie. « Le 10 août, je suis partie porter plainte, on m’a dit "reviens demain", et le lendemain on m’a dit pareil. Une autre fois, les gendarmes sont intervenus, l’un d’eux m’a crié "tais-toi quand c’est moi qui parle", et il a pris la défense de celui qui l’a bat, en disant "il a bien le droit de voir son enfant" ». Amélie raconte peu à peu son calvaire : « Il m’accuse de coucher avec mes collègues par exemple, alors il prend le droit de me faire ce qu’il veut, il m’oblige ». Huguette Bello prend alors la parole pour apporter son soutien, « c’est d’un viol, qu’il s’agit, il faut porter plainte. L’UFR sera là pour vous aider à prendre un avocat. C’est important de passer par la justice pour vous protéger, vous et vos enfants ». Mais Amélie a peur, elle veut juste que tout cela s’arrête…, la fin de ses tortures.
Pour la présidente de l’UFR, il faut que les femmes aillent porter plainte, pour que les violences cessent. Mais il faut aussi former les employés (policiers et personnels de justice) qui accueillent les victimes, pour une meilleure écoute des victimes qui doivent être entendues. Et surtout, il faut des moyens et une volonté de l’Etat. Car dans l’Ouest, par exemple, il n’existe toujours de centre d’hébergement d’urgence. Ce qui après le traumatisme des violences, ajoute alors souvent, pour les enfants notamment, le traumatisme de la perte des repères.

CF

Huguette Bello

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