Droits humains
Recul du gouvernement sur l’état d’urgence et la déchéance de nationalité
François Hollande renonce à la réforme de la Constitution
Hier à la sortie du Conseil des ministres, le président de la République a fait une déclaration dans laquelle il annonce le retrait du projet de loi constitutionnelle prévoyant l’inscription de l’état d’urgence et de la déchéance de nationalité dans le texte fondamental de la République. C’est un grave échec pour le gouvernement. Les organisations de défense des droits humains saluent cette décision.
Hier à la sortie du Conseil des ministres, le président de la République a fait une déclaration dans laquelle il annonce le retrait du projet de loi constitutionnelle prévoyant l’inscription de l’état d’urgence et de la déchéance de nationalité dans le texte fondamental de la République. C’est un grave échec pour le gouvernement. Les organisations de défense des droits humains saluent cette décision.
Le 16 novembre dernier, François Hollande était intervenu devant le congrès des députés et sénateurs réunis à Versailles. Dans son discours, le chef de l’État avait annoncé qu’il comptait charger le gouvernement de présenter une loi inscrivant l’état d’urgence et la déchéance de nationalité dans la Constitution. Au terme de son discours, le président de la République avait été longuement applaudi, puis les parlementaires avaient même chanté la Marseillaise.
4 mois plus tard, le président de la République a fait hier une déclaration dans laquelle il renonce à son projet. Il rejette sur l’opposition la responsabilité de l’échec. Pour que la loi constitutionnelle puisse être adoptée, elle devait être votée dans les mêmes termes à l’Assemblée et au Sénat, puis par la majorité des trois cinquièmes des députés et sénateurs réunis en congrès. Les divergences entre Sénat et Assemblée nationale sont apparues au sujet de la déchéance de nationalité.
Vive opposition
Annoncée au moment où l’émotion consécutive aux attentats de Paris était encore très forte, le projet avait rencontré une forte opposition. Plusieurs organisations de défense des droits humains, comme Human Rights Watch, ont constaté d’inquiétantes dérives dans l’application de l’état d’urgence. Alors inscrire un tel moyen de répression dans la Constitution a inquiété.
Quant à la déchéance de nationalité, c’est un concept inspiré par l’extrême droite et repris à son compte par le gouvernement. Le débat a eu lieu au cœur du pouvoir. La volonté du président de la République s’est alors imposée, entraînant la démission de Christiane Taubira, ministre de la Justice. Tout cela a abouti au résultat d’hier : l’état d’urgence et la déchéance de nationalité ne seront pas inscrits dans la Constitution.
Ce renoncement est considéré comme une victoire par plusieurs organisations. Néanmoins, la bataille contre le recul des libertés continue car le gouvernement veut encore renforcer la répression.
La bataille continue
Pour la Ligue des droits de l’Homme, « il restera la tentative de modifier la Constitution en adoptant une thématique d’extrême droite et en y introduisant un régime d’exception de plus. Si la LDH ne peut que se féliciter de l’abandon d’une réforme inutile et nuisible, elle déplore que le gouvernement, sa majorité et l’opposition poursuivent leurs efforts pour limiter un peu plus nos libertés au travers du projet de loi sur la réforme de la procédure pénale. Elle appelle les députés et les sénateurs à revenir à la raison en refusant d’adopter ce texte ».
Pour sa part, le Syndicat de la Magistrature note que « le retrait est salutaire mais ne doit pas faire illusion : il ne signe pas la fin de l’érosion des libertés, qui se joue en catimini dans les débats parlementaires expédiés sur le projet de loi Urvoas « renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale », qui introduit dans le droit commun assignations à résidence et retenues administratives directement inspirées de l’état d’urgence ».