Accessibilité des bureaux de vote aux personnes handicapées

Une question d’égalité

27 mars 2004

Les personnes handicapées de notre île, estimées à 120.000, aimeraient, elles aussi, pouvoir participer au débat démocratique et faire le choix de nos futurs élus aux élections cantonales et régionales. À moins de se faire accompagner pour accomplir leur devoir citoyen, les handicapés moteurs sont confrontés à des barrières infranchissables, en raison du manque d’aménagement adapté des bureaux de vote. Le vote perd, pour eux, tout son caractère indépendant et confidentiel. Déficients visuels et personnes atteintes de surdité n’ont, quant à eux, aucun outil d’information des différentes listes, de leurs propositions, ni même d’éléments pour cerner les compétences des collectivités.
L’Europe a déjà mis en place plusieurs alternatives (plaquettes en braille, site Internet à reconnaissance vocale...) pour leur permettre d’avoir les moyens de mieux comprendre les enjeux politiques et d’avoir accès aux différentes professions de foi des candidats en lice. La Réunion est en retard. Les associations pour l’intégration des personnes handicapées profitent de ces élections pour interpeller nos élus, ainsi que la population. En poursuivant, pour ce second tour, l’initiative d’élaborer un état des lieux de l’accessibilité des bureaux de vote, c’est une première étape vers la prise de conscience que tous les moyens pour favoriser l’intégration des citoyens handicapés ne sont pas exploités. Une démarche commune et fédératrice pour briser les barrières de l’ignorance et consolider les acquis de notre cohésion sociale.

"On est là pour en parler"

Gilbert Barcaville, marié, père de deux enfants, auteur, compositeur et interprète de talent, mène "une vie presque normale". Presque, car il est atteint de cécité, mais "on est là pour en parler", nous confie-t-il, disposé à faire partager le quotidien de son handicap. Gilbert n’accuse pas nos élus, "ils ne sont pas méchants au point de ne pas vouloir, l’élu est altruiste, il est là pour ratisser large". Pour lui, c’est souvent l’ignorance la véritable coupable de l’exclusion des personnes handicapées, car si l’on devait parler des mentalités à faire changer, "on pourrait marteler les choses, cela durerait pendant des heures". Le constat que l’on peut faire en période électorale, c’est que : "Je n’ai jamais voté. Je n’ai ni accès aux professions de foi des parties, ni aux bulletins. Tant que les informations des différents programmes ne seront pas intégrées, - avec le braille, les systèmes électronique et vocal... -, je ne pourrais pas faire mon choix moi-même. Comment bénéficier du droit à la confidentialité du vote, comment voter à bulletin secret, si d’une part l’isoloir n’est pas adapté et que je ne peux reconnaître les bulletins ? Le vote, c’est une liberté individuelle, caché dans l’isoloir".
À l’évidence, la démarche est impossible, à moins de laisser quelqu’un voter pour soi au détriment d’un choix démocratique et autonome. "Travailler avec les associations est une bonne chose, mais ça n’est pas à elles de faire de l’humanitaire, pas à elles de publier un million de bulletins en braille, et ce n’est d’ailleurs pas ce que je préconise forcément. Aujourd’hui, avec l’électronique, les progrès de l’informatique, on n’a plus d’excuse. Il faudrait déjà faire un état des lieux des non-voyants susceptibles de voter. De petites choses doivent être décidées en amont. Il faudrait élaborer une charte, une clause commune qui permettrait aussi bien aux personnes handicapées qu’aux personnes âgées de pouvoir bénéficier d’adaptations valables pour tous. Nou lé amem de réfléchir, nou pe aport solision".
Parce que la personne handicapée n’est pas malade, qu’elle possède toutes ses capacités de discernement (sauf handicap mental lourd), qu’elle a le droit de choisir et de participer à la vie de la cité, élus comme population ne peuvent rester sourds à leur appel pour le respect des droits humains et démocratiques. La différence est une richesse, pas un obstacle.

Estéfany


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Pour apporter votre soutien à l’état des lieux des bureaux de vote, appelez Radio Arc en Ciel, demain, de 10 à 12 heures et de 14 à 18 heures, aux 0262 20 45 47 / 0692 82 67 10 / 0692 71 11 59. Prenez en compte les marches, la largeur de l’isoloir, la hauteur de la tablette comme de l’urne.


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